Sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation : trois textes en consultation
Le cadre réglementaire du nouveau dispositif des sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation (SNCRR), issu de la loi Industrie verte, est en consultation jusqu’au 3 juillet. Il s’agit de favoriser les politiques volontaires de restauration des milieux naturels menées par les collectivités territoriales et les acteurs socio-économiques mais aussi de répondre aux ambitions de renaturation des espaces et de compensation carbone.
La loi Industrie verte (article 15) a renouvelé le dispositif existant en matière de compensation écologique par l’offre, en créant les sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation (SNCRR), codifié dans un nouvel article L.163-1-A du code de l’environnement. Des précisions réglementaires sont attendues entre autres sur les modalités d'agrément et de suivi des SNCRR, destinés à succéder au régime des sites naturels de compensation (SNC) introduits par la loi Biodiversité de 2016 mais très peu mis en oeuvre (seul le SNC Cossure dans les Bouches-du-Rhône porté par CDC Biodiversité a fait l'objet d'un agrément ministériel en 2021).
Ces précisions font l'objet de trois textes - un décret en Conseil d’Etat, un décret simple et un arrêté - soumis à consultation publique jusqu’au 3 juillet prochain. "Les SNCRR permettront la mutualisation et l’anticipation des mesures compensatoires, y compris de nature volontaire, ce qui concourt à une meilleure efficacité écologique et participe d’une démarche de planification écologique dans les territoires", souligne le ministère de la Transition écologique. Le changement de terminologie vise en effet à favoriser la multifonctionnalité du dispositif en l’ouvrant à d'autres situations que la seule compensation au titre de la séquence "éviter, réduire, compenser" (ERC). La réforme permet de s'articuler avec d’autres projets de restauration de la biodiversité dans les territoires - avec la perspective du zéro artificialisation nette (Zan) à horizon 2050 -, et notamment ceux procédant de l'engagement volontaire des acteurs territoriaux.
Identifier le gain écologique
Les projets de textes précisent la procédure qui vise à s’assurer "de la pertinence écologique des opérations de restauration proposées", relève la notice de consultation. Préalablement à leur mise en place, ces sites doivent faire l’objet d’une procédure d’agrément préalable, dont les modalités simplifiées sont fixées par décret. La délivrance de l'agrément prend notamment en compte "le gain écologique attendu, l’intégration du site dans les continuités écologiques mentionnées au titre VII du livre III, sa superficie et les pressions anthropiques s'exerçant sur ce site". L’agrément ne prend donc plus en compte "l’état écologique final visé" des opérations de restauration et de renaturation, mais seulement le gain escompté pour répondre aux difficultés rencontrées pour qualifier précisément des gains écologiques, par définition, incertains.
Le projet de décret en Conseil d’Etat prévoit la délivrance déconcentrée par les préfets de régions et l’instruction en DREAL ainsi que la consultation des conseils scientifiques régionaux du patrimoine naturel (l’avis préalable du Conseil national de la protection de la nature était auparavant requis pour les SNC). Il tire également les conséquences de la loi Industrie verte, concernant la notion de proximité fonctionnelle entre le site endommagé et le lieu accueillant les mesures de compensation. La proximité géographique en est une composante, mais ne constitue plus en elle- même une obligation légale dans la nouvelle rédaction.
Modalités de vente des unités de compensation
Le projet de décret simple porte quant à lui sur les modalités de fonctionnement et de suivi des SNCRR, ainsi que le contenu de l’agrément préalable. Il détaille les conditions de l’agrément délivré aux personnes physiques ou morales, les éléments constitutifs de l’agrément, ainsi que la nature et les modalités de vente des unités de compensation, de restauration ou de renaturation (UCRR).
Ces unités pourront être vendues sous forme de prestations de services à des maîtres d’ouvrage qui ont des obligations de compensation (dispositif actuel) ; être vendues à des personnes physiques ou morales qui souhaitent contribuer à la restauration de la biodiversité de manière volontaire (par exemple : politique RSE des entreprises, collectivités qui souhaitent préserver la qualité de leurs espaces naturels, assureurs qui souhaitent contribuer à la diminution des risques naturels) ; ou être utilisées par le créateur du SNCRR lui-même ("l’opérateur") pour contribuer à la restauration de la biodiversité de manière volontaire, ou pour répondre à ses propres obligations de compensation. Les UCRR représenteront des gains écologiques développés et maintenus sur toute la période de validité de l’agrément (au moins trente ans). L’opérateur pourra les commercialiser dès l’obtention de l’agrément. Les UCRR acquises ne pourront en revanche être revendues, et ne constitueront pas un marché secondaire.
Enfin, le projet d’arrêté détaille le contenu de la demande d’agrément et (en annexe) les nombreux critères d’évaluation de la pertinence écologique des opérations de restauration, de renaturation ou de développement d’éléments de biodiversité menés dans les SNCRR.
En février dernier, le ministère a soumis à consultation une demande d’agrément en tant que "site naturel de compensation" du projet de restauration écologique "Abbaye de Valmagne" (34) portée par la société Biotope et la famille d’Allaines, propriétaires du site et du projet de restauration écologique "Cros du mouton" (83), constituée par la société CDC Biodiversité. S’ils sont agréés - en application de l’article L. 163-3 du code de l’environnement dans sa rédaction antérieure à la loi Industrie verte -, ces sites seront considérés comme des "sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation", est-il précisé.