Simplification du droit de l’urbanisme : le gouvernement mise sur la proposition de loi Huwart

Généralisation du permis d’aménager "multisites", délais de recours raccourcis, renforcement des outils d’ingénierie, dérogations au PLU pour l’ensemble des communes tendues... La proposition de loi déposée par le député Harold Huwart contient plusieurs mesures de simplification en matière d’urbanisme pour permettre aux projets de sortir plus vite de terre.

Parmi le train de mesures de simplification et d’aide aux élus impliqués dans la construction de logements annoncées par la ministre du Logement, Valérie Létard, lors de son déplacement au Marché international des professionnels de l'immobilier (Mipim), le 11 mars dernier (lire notre article), figure une proposition de loi de simplification dédiée à l’urbanisme et à l’habitat portée par le député Harold Huwart (Liot/Eure-et-Loir). Déposé début avril sur le bureau de l’Assemblée nationale, le texte devrait être examiné en séance le 15 mai prochain, après son passage devant la commission des affaires économiques. Trois axes de simplification y sont proposés. 

Redonner de la souplesse aux documents d’urbanisme

C’est l’objet de l’article 1er pour répondre aux lourdeurs liées à l’élaboration et à l’évolution des documents de planification en matière d’urbanisme. À titre d’exemple, il existe aujourd’hui quatre procédures distinctes d’évolution des plans locaux d’urbanisme (PLU), applicables selon les modifications qui y sont apportées, illustre l’exposé des motifs. Le texte propose tout d’abord de muscler les outils opérationnels d’aménagement sur lesquels les collectivités peuvent s’appuyer. Il est notamment prévu d’étendre le périmètre des établissements publics fonciers locaux (EPFL) aux communes compétentes en matière de document d’urbanisme membres d’un EPCI. Le texte prévoit également d’élargir les missions pouvant être confiées par les collectivités aux sociétés publiques locales d’aménagement d’intérêt national (SPLA‑IN), en les chargeant de la maintenance et de l’entretien des équipements d’intérêt collectif, dont elles se voient déjà confier la construction ou la réhabilitation. 

S’agissant des documents d’urbanisme, il est proposé de supprimer la caducité des schémas de cohérence territoriale (Scot), "pour que les collectivités territoriales puissent mieux maîtriser le 'cycle de vie' de ces documents". D’autant qu’un tel mécanisme de caducité n’existe pas pour les PLU. L’évolution de ces derniers est par ailleurs facilitée. Le texte élargit les cas dans lesquels la procédure de modification simplifiée s’appliquera au PLU, en augmentant de 20% à 50% le seuil de majoration de construction au‑delà duquel une procédure de modification doit être mise en place. 

Un autre assouplissement concerne les obligations de solarisation et de végétalisation pesant notamment sur les bâtiments publics, et fait passer le seuil d’obligation d’au moins 500m2 d’emprise au sol à 1.100 m2. 

Simplifier la délivrance des autorisations d’urbanisme

À l’article 3, le texte prévoit également de généraliser la possibilité de recourir au permis d’aménager dit "multisites". Cet outil - aujourd’hui réservé à certains périmètres comme les projets partenariaux d’aménagement (PPA) et les opérations de revitalisation de territoire (ORT) - permet de faciliter l’instruction des autorisations d’urbanisme d’opérations complexes touchant des parcelles non contigües. Autrement dit, "c’est un gain de temps et de ressources tant pour les collectivités territoriales ou services compétents que pour les porteurs de projets", souligne l’exposé des motifs. 

L’accélération des procédures doit aussi concerner les éventuels recours déposés contre les autorisations et documents d’urbanisme. C’est pourquoi le texte - article 4 - raccourcit le délai pour introduire un recours gracieux à un mois, au lieu de deux actuellement. Il met en outre fin au caractère suspensif du recours gracieux, "permettant de gagner jusqu’à quatre mois". 

Pour lutter contres les constructions illégales et le phénomène de "cabanisation" constaté au sein des zones agricoles, forestières ou naturelles, la proposition de loi renforce les sanctions de la police de l’urbanisme. Le cas échéant, le paiement d’une amende au plus égale à 30.000 euros pourra être ordonné. L’astreinte qui accompagne la mise en demeure est quant à elle doublée à 1.000 euros par jour de retard. Le montant total des sommes résultant de l'astreinte est relevé à 100.000 euros (contre 25.000 euros). 

Faciliter la production de logements sociaux 

Un dernier axe vise à "produire du logement libre et social adapté aux besoins" en donnant "davantage de souplesse" aux PLU. "Ces souplesses doivent permettre la production de logements abordables mis à disposition de travailleurs ponctuels pendant quelques années, avant de pouvoir venir augmenter l’offre de logements sociaux pérennes du territoire", détaille l’exposé des motifs. "Plusieurs territoires ont ainsi été identifiés comme pouvant accueillir plusieurs centaines, voire plusieurs milliers d’emplois, dans le cadre de politiques industrielles et économiques menées de façon volontariste par les élus locaux, en lien avec l’État. Ces territoires ont expérimenté depuis plusieurs années de nouveaux types de logements, notamment sociaux. Toutefois, ces réflexions et expérimentations se heurtent parfois à des difficultés qui ralentissent la production de logements dont la production est pourtant nécessaire", relève le député eurélien. 

À l’article 2, le texte prévoit d’adopter le cadre de la résidence hôtelière à vocation sociale (RHVS), et ce de manière temporaire pour une durée maximale de cinq ans. L'exploitant de la RHVS, qui doit être agréé par le préfet, s'engage en principe à réserver au moins 30% des logements à des personnes en grande difficulté sociale, désignées par le préfet, par des collectivités territoriales ou des associations. Par dérogation, ce pourcentage pourrait donc être abaissé de façon à accueillir des travailleurs de manière temporaire et ciblée sur les territoires présentant des enjeux particuliers d’industrialisation. 

Enfin, le texte étend le champ d’application des dérogations au PLU, aujourd’hui uniquement applicables dans les zones où s’applique la taxe sur les logements vacants, en les élargissant à l’ensemble des communes tendues. Il facilite également la transformation des zones d’activité ou zones tertiaires, pour faciliter la reconversion des friches et des entrées de ville. Cet article permet à l’autorité compétente pour délivrer l’autorisation d’urbanisme d’autoriser un projet de réalisation de logements nonobstant un PLU qui n’avait prévu qu’une vocation monofonctionnelle pour ces zones. Une démarche qui fait directement écho aux propositions portées par le député démocrate Romain Daubié (Ain) dans le cadre de sa proposition de loi visant à faciliter la transformation des bureaux en logements. Victime de la dissolution, cet autre texte devrait faire son retour dans l’agenda parlementaire, comme l’a également confirmé, Valérie Létard. 

 

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