Services des impôts dans les territoires ruraux : Gérald Darmanin abat ses cartes
Au cours d'une visite de trois jours dans le Limousin, le ministre de l'Action et des Comptes publics a inauguré la nouvelle politique d'accès aux services de la Direction générale des finances publiques (DGFIP) dans les territoires ruraux. En concertation avec les élus locaux, Gérald Darmanin entend mettre en place des modalités rénovées d'accueil des usagers. Il promet même des "moyens humains" supplémentaires.
Après avoir fermé près de 1.200 trésoreries et services en dix ans, dont un nombre élevé dans les zones rurales, la Direction générale des finances publiques (DGFIP) entend faire son retour dans ces territoires où prédomine "un sentiment d'abandon". En déplacement pendant trois jours dans le Limousin, le ministre de l'Action et des Comptes publics a confirmé aux élus locaux et aux agents de la direction cette ambition qu'il avait présentée pour la première fois au début de l'été 2018.
Le ministre n'est pas venu les mains vides. A Cussac (Haute-Vienne), mercredi soir, puis à Lavaveix-les-Mines (Creuse), jeudi en fin d'après-midi et, enfin à Saint-Ybard (Corrèze), vendredi matin, Gérald Darmanin a présenté des cartes de l'implantation des services départementaux des impôts à l'horizon de quelques années (à télécharger ci-dessous). Des documents élaborés par les préfets et les directeurs des finances publiques des trois départements. Les élus locaux présents avaient a priori de quoi se réjouir s'ils devaient s'en tenir au nombre de lieux d'accueil de proximité. Ce nombre pourrait en effet sensiblement augmenter : en Haute-Vienne, il passerait de 15, aujourd'hui, à 21 à l'avenir et dans la Creuse, département dont la densité de population est trois fois plus faible, la présence de la direction pourrait croître de 16 lieux d'accueil à 23. La Corrèze serait encore mieux lotie avec 33 implantations – contre 21 actuellement.
Maisons de services au public, agents mobiles…
Pour parvenir à ces objectifs, la DGFIP n'ouvrirait pas de nouvelles trésoreries. Bien au contraire, les cartes laissent à penser que leur nombre devrait continuer à se réduire, en tout cas dans les prochaines années. A court terme toutefois, Gérald Darmanin a décrété le gel des fermetures de trésoreries dans le Limousin, selon son entourage.
Pour étendre la présence de la DGFIP, les agents assureraient des permanences dans des maisons de services au public (MSAP), ces lieux réunissant sous le même toit plusieurs administrations. Pour se rapprocher des usagers, la direction envisage également, durant la période de déclaration de l'impôt sur le revenu notamment, d'équiper un véhicule avec lequel des agents se rendront de village en village. Le ministre entend "réinventer la façon dont est rendu le service public des impôts dans les territoires", affirme son cabinet. Il jure qu'on est très loin d'une opération de communication : le ministre s'engage, insiste-t-il, à augmenter jusqu'à 30% "la présence humaine" de la DGFIP dans les zones rurales.
Gérald Darmanin aura-t-il les moyens de ses ambitions, alors que Bercy voit ses effectifs fondre d'année en année ? La numérisation et la suppression de la taxe d'habitation vont permettre de redéployer des agents, assure-t-on à Bercy. A ces facteurs d'économies, on pourrait ajouter la création d'agences comptables avec les hôpitaux et les collectivités territoriales, qui va se développer à la faveur d'une disposition de la loi de finances pour 2019.
Implanter des emplois publics dans les territoires ruraux
Les élus locaux des départements de Haute-Vienne, de la Creuse et de Corrèze auront jusqu'à septembre pour discuter et se mettre d'accord sur la carte des futurs lieux d'accueil de la DGFIP. La mise en œuvre de la carte définitive interviendra à partir de l'an prochain.
Quatre autres départements "pilotes" sont engagés dans une démarche similaire : le Nord, le Pas-de-Calais, le Loiret et le Loir-et-Cher. Les projets de "réimplantation territoriale" de la DGFIP y seront présentés ultérieurement.
Dans les territoires ruraux – ceux qui se situent dans les départements expérimentateurs, mais pas seulement – Bercy entend par ailleurs "déconcentrer" un certain nombre de services qui n'ont pas de fonction de guichet (par exemple ceux qui sont en charge du cadastre et de la publicité foncière) et qui sont aujourd'hui localisés en région parisienne ou dans les métropoles régionales.
Hasard de calendrier ? Le déplacement de Gérald Darmanin a débuté le jour où la Cour des comptes présentait un rapport sur l'accès aux services publics dans les territoires ruraux. Le gendarme des dépenses publiques y dresse notamment un état des lieux sans détour de la présence des services des impôts. En 2016, leur "réseau infra-départemental, très dense, correspond à 4.261 implantations", soit 5,6 % de moins qu'en 2011, indique-t-il. Les magistrats pointent également "la multiplication des petites, voire très petites unités", qui "entraîne des difficultés d’accès" et "une moindre qualité du service pour l’usager". Ils concluent que "l’adaptation et le resserrement du réseau de la DGFiP sont rendus inéluctables par les progrès du numérique".