Sécurisation de la chasse : le Sénat dégaine une proposition de loi

Délit d'alcoolémie, formation renforcée, obligation de déclaration publique préalable des battues au grand gibier... : le sénateur LR de l'Ain Patrick Chaize a déposé ce 3 février une proposition de loi en phase avec les principales dispositions retenues par le gouvernement dans son plan pour mieux sécuriser la pratique de la chasse. Ce plan s'inspirait du reste largement des recommandations de la mission de contrôle du Sénat dont Patrick Chaize était rapporteur.

Avec sa proposition de loi "visant à améliorer la sécurité de la pratique de la chasse" déposée ce 3 février, c'est un véritable texte "clé en mains" que le sénateur LR de l'Ain Patrick Chaize a fourni à la secrétaire d'État à l'Écologie, Bérangère Couillard. Cette dernière avait présenté le 9 janvier dernier une série de mesures reprenant des recommandations formulées par la mission de contrôle du Sénat sur la sécurité à la chasse en septembre dernier dont Patrick Chaize était justement le rapporteur (voir notre article). Il s'agit maintenant de passer aux travaux pratiques et en premier lieu d'"inscrire la sécurité des chasseurs et des tiers comme un pré-requis à la pratique de la chasse", comme le stipule explicitement l'article 1er du texte. "S'il est évident qu'aucun chasseur n'est aujourd'hui indifférent à la sécurité, se fixer l'objectif de tendre vers le zéro accident impose que chacun s'en saisisse et travaille dans ce but", souligne le sénateur dans l'exposé des motifs du texte.

Formation renforcée pour tous les chasseurs

La proposition de loi (art. 2) entend renforcer les possibilités de sanction des chasseurs ayant des comportements dangereux au sein des associations communales de chasse agréées (Acca), à travers l'intervention du président de la fédération départementale des chasseurs concernée. Afin de s'assurer que les chasseurs connaissent les gestes d'urgence, alors qu'un accident peut survenir dans des zones reculées, elle instaure aussi l'obligation de présenter une attestation de formation aux premiers secours lors de la candidature au permis de chasser (art.3). Il s'agirait du certificat de compétences de prévention et secours civiques de niveau 1 (PSC1), déjà obligatoire depuis 2016 au sein de l'Éducation nationale.

"La formation décennale à la sécurité souhaitée et mise en place par les chasseurs est une avancée importante mais le non-respect de cette obligation n'est pas aujourd'hui sanctionné", regrette le sénateur qui souhaite aussi conditionner la validation annuelle du permis de chasser à l'accomplissement de cette formation dans un délai de dix ans (art.4). Par ailleurs, ce même article 4 introduit l'obligation pour les chasseurs de fournir à cette occasion un certificat médical d'aptitude. En outre, comme dans le code de la route, un nouveau certificat sera exigé à la suite d'une suspension du permis de chasser.

Harmonisation des règles de sécurité

Le texte introduit également plusieurs évolutions des règles de sécurité à la chasse et vise à assurer leur harmonisation au niveau national (art.5). Il généralise ainsi le port d'un gilet fluorescent pour toutes les actions de chasse à tir collectives. Un volet pratique est aussi prévu au sein de la remise à niveau décennale. Il inscrit en outre dans le code de l'environnement la matérialisation obligatoire de l'angle de tir sécurisé et donc des zones où celui-ci est dangereux (zone de 30° autour des points à protéger), la formation des organisateurs de battue et l'utilisation d'un témoin de chambre vide pour garantir la sécurisation des armes. Il interdit les tirs vers les zones dangereuses comme les voies de circulation ou les bâtiments et les tirs sans identification formelle du gibier. Le texte invite également le ministre chargé de la chasse à harmoniser et à compléter ces règles de sécurité. Ce même article 5 précise les missions des commissions de sécurité des fédérations départementales des chasseurs, celles-ci devant notamment signaler toute mise en danger de la vie d'autrui ou risque d'utilisation dangereuse d'une arme de chasse aux autorités compétentes. Ces commissions devront également mener, avec l'Office français de la biodiversité (OFB), des audits de sécurité des territoires où des accidents ou incidents auront eu lieu. Par ailleurs, la souscription d'une assurance responsabilité civile pour les organisateurs d'actions de chasse collective à tir au grand gibier ou de destruction est rendue obligatoire (art.6).

Le texte crée en outre une obligation de déclaration publique préalable des chasses collectives au grand gibier et sanctionne son non-respect ainsi que, de manière égale, l'utilisation de ces données pour empêcher le déroulement de l'action de chasse déclarée (art.7). Une infraction spécifique en cas de sabotage, dégradation ou destruction d'un équipement contribuant à la sécurité de la chasse est également créée. L'article 8 de la proposition de loi permet au préfet de s'assurer de la conformité du schéma départemental de gestion cynégétique (SDGC), à la loi, notamment en termes de sécurité.

Sanctions accrues

Le texte aligne aussi le droit de la chasse sur le code de la route en matière d'usage de l'alcool et de stupéfiants (art.9). "Cette limite s'appliquera dans le cadre de toute action de chasse ou de destruction et pourra être contrôlé par les officiers et agents de police judiciaire de la gendarmerie et de la police nationales et, dans certaines conditions, des agents de police judiciaires adjoints", indique l'exposé des motifs. Comme pour les automobilistes, la proposition de loi instaure un délit d'alcoolémie pour les chasseurs, puni de deux ans d'emprisonnement et de 4.500 euros d'amende. Le texte prévoit également d'aménager l'échelle des peines complémentaires en cas d'accident de chasse, "notamment pour punir plus sévèrement les homicides ou blessures involontaires suite à un tir direct sans identification", en prévoyant le retrait systématique du permis de chasser avec interdiction d'en solliciter un nouveau pendant dix ans (art.10). Il entend également améliorer le suivi des armes et l'effectivité des inscriptions au fichier national des personnes interdites d'acquisition et de détention d'armes – Finiada (art.11).

Les policiers municipaux se voient accorder les mêmes compétences que les gardes champêtres en matière de police de la chasse (art. 12), "afin de permettre aux maires, et notamment à ceux n'employant pas de gardes-champêtres, de traiter de ces questions", justifie l'exposé des motifs. Le texte entend en outre autoriser les gardes chasse particuliers et les agents de développement assermentés des fédérations départementales des chasseurs à relever l'identité des personnes qu'ils souhaitent verbaliser (art.13). Pour le sénateur, "c'est une avancée attendue pour favoriser le développement d'une police de la chasse de proximité en appui de l'OFB".

Afin de contribuer au dialogue entre les chasseurs et les différents acteurs de la nature, la proposition de loi vise à permettre aux fédérations départementales des chasseurs et aux fédérations départementales de pêche et de protection des milieux aquatiques de participer à l'élaboration des plans départementaux des espaces sites et itinéraires (art. 14). Enfin, l'article 15 a pour objet d'assurer l'application des dispositions de la proposition de loi outre-mer.

 

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