Romans-sur-Isère : un parcours de chaussures monumentales vers le musée (26)
« Capitale de la chaussure » au XXe siècle Romans-sur-Isère a créé un musée municipal en hommage à cette activité. Afin de lui redonner visibilité et attractivité, la ville a bâti un parcours de chaussures monumentales dans son centre historique.
Prépondérante pendant la Première Guerre Mondiale, l’activité de la chaussure devient mono-exclusive à Romans-sur-Isère à partir de l’Entre-Deux-Guerres. Charles Jourdan crée sa première usine en 1923 et, dans les années 1950, près de 200 entreprises produisent des souliers de luxe, notamment les marques Kélian et Robert Clergerie. Mais à partir de 1970, la forte concurrence internationale, notamment asiatique, fait s’effondrer les exportations qui représentaient la moitié du chiffre d’affaires du secteur. Kelian ferme ses portes en 2005, puis Jourdan en 2007.
Les savoir-faire et l’activité perdurent
Pour autant, les savoir-faire perdurent et dans la mémoire collective Romans-sur-Isère reste associée à la chaussure de qualité. Le secteur cuir-chaussure représente encore 770 emplois sur le territoire de Valence-Romans-Agglo -dont 150 uniquement sur la fabrication de souliers-, et 2.000 emplois dans le nord de la Drôme. L’image de capitale de la chaussure reste vivace et l’industrie se renouvelle : de nouvelles marques et de nouveaux ateliers sont régulièrement créés.
Le musée de la chaussure de Romans-sur-Isère a été créé en 1971. « Il présente une activité qui a façonné notre ville au XXe siècle et en a fait la renommée. Il incarne une partie de notre histoire, rappelle la septième adjointe déléguée au rayonnement culturel et aux musées de la ville de Romans-sur-Isère, Florence Maire. Ce musée, c’est en quelque sorte un éloge du savoir-faire Romanais, il représente une partie de l’ADN de la ville. Car chaque Romanais ou presque a dans sa famille une personne qui a travaillé dans le monde de la chaussure. Le musée, c’est un peu notre dénominateur commun. »
Concilier les missions d’un Musée de France et un rôle économique
Directrice des affaires culturelles de Romans-sur-Isère, Laurence Lopez précise : « Le musée est 100 % municipal, mais labellisé Musée de France, car il présente, entre autres, l’histoire de la chaussure. Nous présentons une collection du XVIIIe siècle, confiée en dépôt par le Musée du moyen-âge-Thermes de Cluny, à Paris. Ainsi que des modèles du XIXe siècle, notamment Hellstern (Paris, 1870-1970) et de nombreuses pièces du XXe et du XXIe siècle, cette dernière collection étant basée sur les sneakers… » Le musée couvre toutes les missions d’un musée de France : fonction régalienne (conservation préventive) et enjeu de politique publique (médiation vers tous les publics et notamment les scolaires). Mais il est aussi bien ancré dans le tissu économique local : « Nous sommes en lien avec la Direction régionale des affaires culturelles, la Drac, d’un côté, et avec le monde de la chaussure et des accessoires de mode, de l’autre. Des chausseurs historiques ont contribué à l’enrichissement de la collection sous forme de dons », poursuit la directrice.
Le musée de la chaussure est installé dans l’ancien couvent des Visitandines, un site de 7.000 m2 classé monument historique. Il représente un écrin pour les collections prestigieuses du musée. Cependant, celui-ci avait dû fermer en 2019, suite à un violent épisode de grêle qui avait gravement endommagé la toiture. Il a réouvert en 2020… deux mois avant la pandémie de Covid 19.
C’est donc pour mettre à nouveau en lumière le musée que les acteurs culturels de la ville ont eu l’idée de signaler sa présence en dehors de ses murs en créant un parcours jalonné par dix chaussures monumentales qui indiquent la direction de l’établissement dans différents points de la ville. Ces insolites « monuments » sont fabriqués en résine moulée à partir de la numérisation de modèles soigneusement sélectionnés dans la collection du musée, agrandis à l’échelle de l’espace public, puis coulés, poncés, polis et peints. Réalisé grâce au soutien de la région Auvergne-Rhône-Alpes, ce projet a également été soutenu par la Banque des Territoires qui a participé au financement des études préalables, dans le cadre de la démarche Action Cœur de Ville.
Négociations avec l’ABF
Ce parcours étant implanté dans le périmètre du centre historique, de longues négociations ont été menées avec l’Architecte des Bâtiments de France (ABF) : « Nous avons argumenté sur le sens donné à l’opération, et garanti la qualité de la future production, » poursuit la directrice, qui a mené les négociations avec l’ABF, mais aussi avec la SNCF pour la pose d’une chaussure monumentale sur le parvis de la gare, et avec diverses copropriétés pour informer les riverains concernés que les souliers seraient éclairés la nuit. De marché public en discussions, la préparation a duré quelque huit mois pour les dix premières chaussures, un peu moins longtemps pour les suivantes. Deux autres souliers monumentaux sont en cours de réalisation.
« En termes d’attractivité, c’est un plus pour la ville, poursuit la directrice. Les Romanais apprécient, nous n’avons d’ailleurs enregistré aucune dégradation, car cela fait sens, les habitants se sont approprié ces chaussures. »
En temps « normal » (hors covid) le musée entre 25 000 et 30 000 visiteurs par an (cf tableau ci-dessous), notamment des jeunes et des scolaires. « Les jeunes constituent notre cible privilégiée », ajoute la directrice des affaires culturelles. La tarification est d’ailleurs adaptée, avec une gratuité jusqu’à 18 ans. En 2018, les moins de 18 ans représentaient 20 % du public.
Dix personnes (équivalent temps plein) travaillent en ces murs. Des projets sont menés avec les enseignants de la ville, et aboutissent à une exposition dans le cadre de la Nuit des musées. Des ateliers enfants/parent sont également organisés.
La ville s’est engagée depuis deux ans dans une étude de programmation pour revaloriser ce site patrimonial. L’élue précise : « La modernisation du musée est l’un des grands objectifs de ce mandat car le musée n’est pas une belle endormie qui témoigne de notre passé, c’est un élément d’attractivité indéniable pour notre territoire. A deux pas de la cité de la chaussure et en lien avec les nombreux créateurs toujours présents dans notre centre-ville, le musée s’inscrit pleinement dans le parcours de visite romanais, entre tourisme de loisirs et tourisme commercial ».
Focus budget
Recettes de fonctionnement (le musée a été fermé en 2019 pour travaux, puis en 2020 pour cause de pandémie)
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Billetterie
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Boutique
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Prestations (audio-guides +visites) |
total
|
2016 |
82 848 € |
23 821 € |
4 426 € |
111 095 € |
2017 |
75 949 € |
25 771 € |
7 048 € |
108 768 € |
2018 |
69 769 € |
25 931 € |
5 053 € |
100 753 € |
Dépenses de fonctionnement (hors masse salariale)
2016 |
48 116 € |
2017 |
66 140 € |
2018 |
81 163 € |
Banque des Territoires :
Sur le projet de nouvelle signalétique du Musée de la Chaussure (dont les chaussures monumentales), participation de la Banque des Territoires au financement des études préalables.
Budget 24 800 € HT – participation BDT = 50 % (12 400 €)
Commune de Romans-sur-Isère
Nombre d'habitants :
Florence Maire
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