Réussite éducative : le territoire influe plus que le niveau social
Une vaste compilation de données de la direction de l'Évaluation, de la Prospective et de la Performance offre un portrait géographique complet de l'éducation en France. D'où il ressort que les élèves des territoires urbains denses s'en sortent mieux que le rural éloigné, indépendamment de leur niveau socioéconomique.
C'est un portrait extrêmement complet de l'éducation en France que propose la direction de l'Évaluation, de la Prospective et de la Performance (Depp) du ministère de l'Éducation nationale. Intitulé "Géographie de l'école", un document publié le 29 juin 2021 répond en 112 pages et 36 fiches thématiques à toutes les questions que l'on peut se poser sur la géographie scolaire de notre pays. De la taille des classes à la place de l'enseignement privé, du niveau des élèves aux résultats du baccalauréat, les statistiques présentées académie par académie – et parfois à une échelle plus fine – mettent en lumière des disparités territoriales plus ou moins marquées et fournissent "des clés de réflexion aux acteurs de l’éducation et de la formation [pour] les guider dans la réalisation de diagnostics territoriaux", comme le souligne la Depp.
Dans une analyse présentée en fin d'ouvrage, l'expert de la Depp, Fabrice Murat explique qu'"en matière de caractéristiques sociales, de réussite et de parcours scolaire, les disparités territoriales en France sont particulièrement marquées". Peut-on pour autant juxtaposer les cartes du premier chapitre, consacré à l'environnement social, économique et familial, et celles du quatrième chapitre, consacré aux parcours scolaires et aux résultats ? La réponse est négative. "La réussite scolaire d’un canton est imparfaitement liée à son niveau social", décrypte Fabrice Murat. L'illustration en est donnée avec l'exemple du diplôme national du brevet (DNB).
"Offre de formation moins diversifiée"
Si les cantons les plus favorisés socialement ont souvent une note moyenne plus élevée, l'expert remarque que "la relation n’est pas parfaite". Les grandes métropoles ne ressortent pas avec des résultats scolaires nettement meilleurs et l’ouest de l’Île-de-France, zone pourtant très favorisée socialement, se détache très peu en termes de réussite au DNB. Quant au bassin méditerranéen, il est "en sous-réussite scolaire". À l'inverse, en Bretagne et Pays de la Loire, les cantons en réussite scolaire paraissent bien plus nombreux que ce que laisse attendre le milieu social. Dans le même ordre d'idées, le nord de la France ressort moins en termes de difficultés scolaires que ce que l’IPS (indice de position sociale) de ses habitants pouvait laisser attendre.
Ce n'est donc pas uniquement dans le niveau socioéconomique qu'il faut chercher une logique aux écarts de parcours scolaires. Selon Fabrice Murat, "le type de territoire a une grande importance". Ainsi, "les communes rurales se distinguent par un déficit en termes d’orientation vers la voie générale et technologique (GT), qui peut être en partie relié à des aspirations personnelles et professionnelles différentes, mais aussi à une offre de formation moins diversifiée", pointe l'expert. A contrario, le taux de passage en seconde GT est assez élevé (68% contre 57% dans les communes rurales éloignées) dans les communes urbaines denses, lesquelles, si elles sont assez favorisées socialement, comptent toutefois "beaucoup de variabilité dans [leur] population entre des communes très défavorisées et d’autres très favorisées".
Confirmant de précédents travaux, la "Géographie de l'école" conclut que dans l’ensemble des académies, les zones rurales éloignées et l’urbain éloigné sont plus défavorisés que les zones périphériques et l’urbain dense.