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Téléphonie mobile - Résorption des zones blanches : les infrastructures à la charge des collectivités, les associations d'élus protestent

Suite à la décision prise par l'Etat, en lien avec les opérateurs de téléphonie mobile, de faire financer la résorption des zones blanches par les communes, les associations d'élus locaux demandent une refonte de la gouvernance sur le sujet. Elles regrettent que les collectivités, considérées comme principal bailleur, aient été systématiquement exclues des discussions entre l'Etat et les opérateurs, dont les choix techniques soulèvent de nombreuses questions.

A contre-courant de la communication gouvernementale de ces derniers mois, la résorption des zones blanches prévue pour la fin de l'année 2016 sera finalement à la charge des collectivités. Plus précisément, ce sont les communes qui sont pour l'instant toujours exclues de toute couverture mobile qui devront financer les points hauts (pylônes) nécessaires. Et ce, pour un service qui sera bien souvent minimal et incomplet. Alors que tout semblait indiquer une prise en charge des frais par les opérateurs, ou, à défaut, par l'Etat, l'ambiguïté a été levée au cours de l'automne et les associations d'élus locaux (1) se sont retrouvées au pied du mur, forcées de réagir. Prévues dans la loi "Macron I" (2) votée en août 2015, ces dispositions ont, semble-t-il, été décidées entre l'Etat et les opérateurs sans consultation des élus locaux. Face à cette situation, les associations d'élus locaux ont décidé de faire cause commune et demandent une refonte de la gouvernance des déploiements.

Les infrastructures mobiles à la charge des collectivités

La couverture mobile est un levier de développement majeur pour les territoires et la fin des zones blanches marquait une étape importante vers plus d'égalité. Une égalité désormais mise à mal par l'article 129 de la loi "Macron I", qui stipule que l'obligation de couverture n'intervient pour les opérateurs qu'"au plus tard six mois après la mise à disposition effective des infrastructures par les collectivités territoriales". Obligeant ainsi les 238 communes situées en zone blanche, mais également celles abritant l'un des futurs 800 sites stratégiques (zones d'activité économiques, touristiques…), à déployer préalablement les infrastructures nécessaires. Ces collectivités devront alors débourser des sommes bien souvent supérieures à 100.000 euros pour un point haut et son raccordement électrique. Dans un contexte budgétaire difficile, aussi bien pour les communes que pour les départements, ce surpoids dans les finances locales risque de pénaliser encore davantage les territoires les plus fragiles malgré les 30.000 euros d'aides prévues par l'Etat. Enfin, bien que reconduit dans la loi de finances pour les déploiements très haut débit, le Fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) a été supprimé fin décembre pour les infrastructures mobiles en zones blanches. Un nouveau coup dur.

Une communication de l'Etat à contre-courant

En faisant peser sur les communes le poids des déploiements, l'Etat a pris les collectivités à contre-pied et s'inscrit en faux par rapport à sa propre communication sur le sujet. A chacune de ses interventions, le gouvernement a surtout cherché à mettre en avant son engagement en faveur du numérique dans les territoires et n'a jamais réellement insisté sur le rôle qu'auraient à jouer les collectivités. Se montrant déterminé à résoudre la question des zones blanches, il semblait définitivement résolu à contraindre les opérateurs à agir et l'entrée en vigueur de la loi "Macron I" n'a pas infléchi son discours, resté sensiblement le même. Et ce, aussi bien aux Comités interministériels aux ruralités (mars et septembre 2015), qu'après l'accord trouvé avec les opérateurs (mai 2015) ou lors du Conseil national de la montagne (septembre 2015). Une cohérence des mots qui s'est pourtant traduite par une inflexion des actes, car dans le même temps, les élus ont vu poindre de plus en plus clairement la nouvelle réalité. Les collectivités auraient à financer des déploiements sur lesquels elles n'ont jamais été consultées, ayant été exclues de toutes les discussions entre l'Etat et les opérateurs.

Les zones blanches nécessitent une nouvelle gouvernance

Courant décembre, les associations d'élus locaux ont adressé conjointement un courrier de protestation au Premier ministre. Courrier dans lequel elles s'interrogent sur l'attitude de l'Etat à l'égard des territoires et attendent de lui un engagement ferme, via le Fonds d'aménagement des territoires qui pourrait bénéficier du produit de la vente de la bande 700 MHz pour 2,8 milliards d'euros en novembre. Elles remettent en cause la gouvernance actuelle qui les désigne comme principal financeur sans pour autant leur donner voix au chapitre. En ce sens, elles estiment que l'ambition affichée par l'Etat en matière de résorption des zones blanches est trop faible et ne répond plus aux réalités du terrain. La définition très restrictive de "suppression des zones blanches" laisse de larges pans du territoire non couverts et crée de la frustration chez les administrés, dont les usages en mobilité sont fortement mis à mal. Une responsabilité que les élus locaux, désormais principaux bailleurs, ne peuvent et ne veulent assumer seuls. Elles questionnent également la pertinence des technologies promues. Là où la 4G correspondrait aux besoins de territoires largement exclus du très haut débit, les opérateurs et l'Etat se sont entendus pour déployer de la 2G et de la 3G. Technologie qu'elles estiment "déjà daté[e] et le sera encore plus d'ici quatre ou cinq ans". C'est ainsi que les administrés de ces territoires se trouveront doublement pénalisés : ils financeront des infrastructures qui ne couvriront pas forcément leur domicile et dont la qualité des services sera inférieure aux standards actuels. Enfin, elles appellent les opérateurs à faire preuve de plus de transparence afin qu'ils fournissent des informations tarifaires et techniques précises sur les débits et la qualité des services.

(1) AMF, ANEM, AMRF, ADCF, France Urbaine, ADF, Avicca, APVF.
(2) Loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques.

 

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