RER métropolitains : le Sénat adopte la proposition de loi mais s'inquiète du financement des projets
Le Sénat a très largement adopté en séance ce 23 octobre la proposition de loi déjà votée en juin à l'Assemblée pour permettre le déploiement de RER métropolitains dans une dizaine de grandes villes. Mais le financement de ces projets au coût élevé suscite toujours des inquiétudes que le ministre chargé des transports a tenté de dissiper.
Après l'Assemblée nationale mi-juin (lire notre article), le Sénat s'est positionné très largement à main levée ce 23 octobre en faveur de la proposition de loi qui donne un cadre juridique aux grands projets de "services express régionaux métropolitains" (Serm), l'équivalent des RER en Ile-de-France. Ce texte prévoit d'élargir les missions de la Société du Grand Paris, rebaptisée Société des grands projets (SGP), pour mettre sur les rails ces systèmes de transport dans au moins dix grandes villes, comme Bordeaux, Lille ou Grenoble, où des projets sont en cours. Portée initialement par Jean-Marc Zulesi, député Renaissance des Bouches-du-Rhône, la proposition de loi fait suite à une promesse d'Emmanuel Macron en novembre 2022 (lire notre article), renouvelée en septembre avec l'annonce d'une enveloppe immédiate de 700 à 800 millions d'euros pour lancer "13 projets" (lire notre article).
Modèle économique : "la grande inconnue"
Devant les sénateurs, le ministre des Transports Clément Beaune a donné plus de précisions, évoquant "767 millions d'euros en entrée de discussion avec les régions", dans le cadre des contrats de plan Etat-régions. La plupart des bancs ont toutefois fait part de leur scepticisme, alors que le coût total des Serm est estimé entre 15 et 20 milliards d'euros par le conseil d'orientation des infrastructures. "Nous avons un devoir de vigilance. Il ne faut pas promettre de miracles sans pouvoir les financer", a grincé Franck Dhersin (groupe centriste). "Le modèle économique et financier des Serm reste la grande inconnue", a renchéri le rapporteur Philippe Tabarot (Les Républicains).
Le ministre a tenté de rassurer le Sénat : les 767 millions ne sont "pas un financement exhaustif et définitif", a-t-il promis, demandant néanmoins aux régions de mobiliser "une somme analogue". "L'Etat sera au rendez-vous, il faudra que les collectivités le soient aussi", a-t-il lancé face à des parlementaires qui peinent à voir venir dans leurs territoires la "nouvelle donne ferroviaire" de 100 milliards d'euros d'ici 2040 promise par la Première ministre Élisabeth Borne.
Pour obtenir des garanties, les sénateurs ont voté en commission la tenue d'une conférence nationale de financement d'ici le 30 juin 2024 (lire notre article). Ils ont également modifié en partie le texte, en élargissant la définition des services express régionaux métropolitains à des alternatives au ferroviaire. Les Serm englobent ainsi désormais des services de cars express au profit des territoires les plus éloignés, les réseaux cyclables ou encore le covoiturage et l'autopartage. Le rôle des collectivités territoriales, régions en tête, dans le processus de labellisation des Serm a aussi été renforcé, de même que dans la désignation de la SGP comme maître d'ouvrage.
Prise en compte de la question de la sûreté dans le cadre du déploiement des Serm
En séance, les sénateurs ont adopté de nouveaux amendements visant notamment à mieux prendre en compte la question de la sûreté dans les transports dans le cadre du déploiement des Serm. A l'initiative du rapporteur, ils ont ainsi prévu, lorsque le contrat d’objectif départemental de sûreté dans les transports n’a pas été conclu dans le ou les départements concernés par un Serm, que le représentant de l’État réunisse les parties prenantes en vue d’une conclusion de ce contrat dans un délai de douze mois suivant l’obtention du statut de Serm par arrêté du ministre chargé des transports. Les sénateurs ont aussi voulu faire participer les associations d’usagers à la concertation préalable au lancement d’un projet de Serm et renforcer l'interopérabilité des services d'information des voyageurs et de billettique.
Le texte, qui fait l'objet d'une procédure accélérée (une lecture par chambre) doit maintenant être examiné en commission mixte paritaire (CMP).