Loi Montagne - Réforme des unités touristiques nouvelles : le décret en consultation
Le ministère de l'Environnement vient de mettre en consultation, jusqu'au 19 avril prochain, le volet urbanisme de la nouvelle loi Montagne promulguée il y a à peine trois mois, le 29 décembre dernier. Comme le ministre de l’Aménagement du territoire s’y était engagé auprès du Conseil national de la montagne (CNM), défavorable à une révision des unités touristiques nouvelles (UTN) par ordonnance, la loi comprend dans son article 71 une réforme de leur procédure d’autorisation. Le ministre s'était également engagé à ce que le décret d'application soit présenté devant l'instance consultative avant publication. C'est chose faite.
Lors de sa réunion plénière ce 20 mars à Bourg-d'Oisans (Isère), sous la présidence de Jean-Michel Baylet, le CNM a ainsi approuvé les premiers décrets d’application de la loi Montagne. Les discussions à propos du projet de décret fixant les seuils applicables aux nouvelles UTN "ont permis de clarifier le débat et d’apaiser les craintes des professionnels de l’économie touristique en confirmant que le nouveau régime ne constituerait pas un frein à leur dynamique d’investissement en préservant l'équilibre entre développement des territoires et respect de l’environnement", s'est félicitée la présidente de l'Association nationale des élus de la montagne (Anem) Marie-Noëlle Battistel.
A l'écoute des élus de montagne, le texte apporte à travers la réforme des UTN une série d'assouplissements aux règles d'urbanisme plutôt pressentis du côté des associations de protection de l'Environnement (FNE, Frapna) comme une porte ouverte à l'urbanisation. Fraîchement réélu à la tête de la commission permanente du CNM, le député PRG des Hautes-Alpes, Joël Giraud se réjouit du "compromis" trouvé. Les opérateurs de remontées mécaniques ont ainsi accepté le principe des UTN pour les liaisons interdomaines et la redéfinition des zones vierges dans le code de l’Environnement (c'est-à-dire les espaces naturels non aménagés mais "accessibles gravitairement depuis les remontées mécaniques mais ne revenant pas gravitairement sur une piste de ski ou un départ de remontée mécanique du même domaine skiable"), fait-il notamment valoir.
Seuils des unités touristiques nouvelles
La réforme des UTN consacre une procédure désormais entièrement liée aux documents de planification. Si les UTN dites "structurantes" (qui se substituent aux UTN de massif) continuent d’être planifiées à l’échelle des schémas de cohérence territoriale (Scot,) les conditions de réalisation des UTN dites "locales" (auparavant UTN départementales) devront, quant à elles, être précisées par les plans locaux d'urbanisme (PLU). Ces deux nouvelles catégories sont définies par décret en Conseil d'Etat au regard de seuils.
C'est précisément le principal objet du texte mis en consultation. Entrent notamment dans le champ des UTN structurantes, les liaisons entre domaines skiables alpins existants, "ces projets ayant des impacts importants sur le développement touristique des collectivités de montagne", explique le ministère. A noter également, l'abaissement du seuil de soumission à UTN structurante de 25 ha à 15 ha des golfs (soumission à UTN locale en deçà de 15 ha), "eu égard à la consommation foncière induite et aux conséquences pour l’activité agricole prégnante en zones de montagne". Le décret retient la qualification d’UTN structurante pour les ascenseurs valléens (transport par câble). "Ces projets correspondent à des opérations lourdes avec un montage économique et financier complexe à équilibrer, qui engage durablement les territoires, à une échelle bien plus large que les communes ou communautés de communes, ce qui milite pour une planification à l’échelle d’un bassin de vie et donc du Scot", indique le ministère.
Pour les terrains de camping, le projet de décret remplace les seuils exprimés en nombre d’emplacements par des seuils surfaciques (UTN structurantes pour une superficie supérieure à 5 hectares), "plus pertinents au regard de l’objectif de planification", justifie le ministère. Le texte augmente également de 300 à 500 m2 le seuil de soumission des hébergements et équipements touristiques à UTN locale. Le seuil de soumission des extensions de refuges de montagne à UTN locale est quant à lui porté à 200 m2 (contre 100 m2 auparavant) "afin de favoriser la politique de rénovation des refuges de montagne".
Par ailleurs, les Scot et les PLU pourront par eux-mêmes identifier leurs propres UTN en deçà des seuils réglementaires. Toutefois, "sur un marché de plus en plus concurrentiel (...), nombre de projets d’équipement touristique relevant des UTN ne peuvent être anticipés avec suffisamment d’avance pour être planifiés par un Scot ou un PLU", relève l'Anem. Des procédures dérogatoires d’autorisation préfectorale au cas par cas sont donc maintenues pour permettre la réalisation d’UTN sur des territoires sans Scot ou PLU ou lorsque ces derniers ne les ont pas prévus.
Jusqu'au 1er janvier 2019 (soit un report de deux ans), ces projets d’UTN pourront en outre déroger à l’obligation renforcée d’urbanisation limitée (prévue par la loi Alur, article L.142-4 du code de l’urbanisme) en attendant l'élaboration du Scot, très en retard en montagne. A l'article 73, la loi introduit enfin la possibilité de construction d'annexes de taille limitée (garages, piscines ou abris de jardin) aux bâtiments existants en zone de montagne en discontinuité de l’urbanisation existante. Cet assouplissement n'est toutefois applicable "que dans les communes dotées d’un PLU", précise le décret.