Archives

Services publics - Refonte de la carte judiciaire : lancement de la consultation

La refonte de la carte judiciaire démarre mercredi par l'installation d'un "comité consultatif". Cette réforme suscite déjà une grogne à laquelle se sont joints nombre d'élus locaux.

La ministre de la Justice, Rachida Dati, doit présenter mercredi 27 juin aux principaux acteurs concernés "les orientations, le calendrier et la méthode de travail" de la réforme de la carte judiciaire. Cette réforme "sera un axe majeur de la modernisation de la justice", souligne-t-on au ministère.
Tout en promettant la concertation et une application progressive de la réforme, la garde des Sceaux n'a pas caché vendredi à Bobigny que cela passerait par la suppression de certaines des juridictions existantes. "Une justice proche des citoyens, ce n'est pas une justice située à dix kilomètres de chez soi. C'est une justice qui juge dans des délais raisonnables, dans des termes compréhensibles et qui respecte les justiciables", a expliqué Rachida Dati qui a plaidé pour un recours aux nouvelles technologies afin de rapprocher tribunaux et justiciables.
L'inquiétude est forte dans de nombreux tribunaux, où les avocats se sont fait entendre dès la semaine dernière. Et elle ne semble pas faiblir. Ce lundi encore, les avocats des barreaux de Péronne (Somme) et Saint-Omer (Pas-de-Calais) ont rejoint le mouvement de grèves et de manifestations qui se sont multipliées un peu partout en France.
Pour le président du Conseil national des barreaux, Paul-Albert Iweins, "si une réforme de la carte judiciaire pouvait paraître nécessaire afin de mieux répartir les moyens de la justice sur le territoire national", il est hors de question de s'arrêter à la "solution simpliste" qui consisterait à retenir une cour d'appel par région et un tribunal de grande instance (TGI) par département. "Un tribunal c'est la présence de l'Etat dans une région, il est inconcevable qu'il y ait un désert judiciaire", prévient pour sa part Franck Natali, président de la Conférence des bâtonniers de province.

 

Résistances

Un "comité consultatif" sera installé mercredi 27 juin à la Chancellerie et devrait se réunir à nouveau "à l'automne" après des consultations locales menées en parallèle par les chefs de cour d'appel et les procureurs généraux. La concertation se veut "la plus large", associant non seulement les professions juridiques et judiciaires mais aussi les élus, et "tenant compte évidemment des spécificités locales", assure le ministère. Lequel dément l'existence de tout "schéma préétabli" de réforme, de "carte toute faite". En sachant toutefois que pour Rachida Dati, les premières décisions doivent intervenir "dès la fin de l'année".
L'organisation géographique de la justice repose actuellement sur la répartition de 35 cours d'appel et 181 TGI. Ce découpage du territoire - qui se décline aussi en 185 tribunaux de commerce, 275 conseils de prud'hommes, 475 tribunaux d'instance et de police, autant de tribunaux de proximité - n'a pas été révisé depuis 1958. Les partisans d'une réforme font valoir que cette carte n'est plus adaptée à l'évolution démographique du pays, certains tribunaux subsistant en l'état dans des zones qui se sont dépeuplées alors que d'autres manquent de moyens, entre autres dans les zones périurbaines socialement difficiles.
Si la réforme devait être conforme au programme UMP de la campagne présidentielle, elle consisterait à adapter le nombre de cours d'appel à celui des régions administratives et à ne maintenir qu'un TGI par département.
Par le passé, plusieurs gouvernements avaient évoqué cette réforme mais avaient dû faire marche arrière devant l'ampleur des résistances exprimées, entre autres par les élus locaux. Dans une interview au Monde, Jacques Commaille, chercheur au CNRS, auteur de l'ouvrage "Territoires de justice, une sociologie de la carte judiciaire", explique en ces termes ce qu'il qualifie de "blocage" : "Chaque région souhaite conserver sa cour ou son tribunal comme un attribut de statut symbolique et avance des arguments forts pour son maintien (...). Les réformes sont rendues impossibles par cette volonté des collectivités concernées de garder leurs tribunaux." Et Jacques Commaille d'assurer que le gouvernement actuel "échouera" lui aussi s'il attend les élections municipales...

 

C.M., avec AFP

 

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis