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Référé précontractuel : vérifier avant de signer !

Dans un arrêt du 20 juin 2018, le Conseil d’Etat a précisé le régime relatif à la notification du référé précontractuel. Les conséquences de cette notification sont importantes puisqu’elles permettent de déterminer si une collectivité est en droit de signer un marché ou encore si la voie du référé contractuel est ouverte à un candidat évincé.

En l’espèce, la ville de Paris avait lancé une procédure pour la passation d’un marché portant sur le nettoiement, l’entretien et l’aménagement des espaces verts du boulevard périphérique extérieur. Candidate pour le lot n°2, la société Cercis avait, suite à son éviction, saisi le juge du référé précontractuel du tribunal administratif (TA) de Paris. Ce dernier a prononcé un non lieu à statuer, estimant qu’il ne pouvait plus être saisi d’un tel référé, ni d’un référé contractuel car le marché avait été valablement signé. La société a alors formé un pourvoi en cassation devant le Conseil d’Etat.
En l’espèce, le recours en référé précontractuel avait été notifié à la collectivité le 19 décembre 2017. Toutefois, n’ayant pas pris connaissance de cette notification, la ville a signé le même jour le marché en litige. C’est seulement quelques heures après la signature du contrat qu’elle a pris connaissance du recours. Se posait donc la question de savoir si le référé précontractuel devrait être considéré comme notifié au moment de l’envoi de la requête à la collectivité ou lors de la prise de connaissance effective par la ville. De la réponse à cette question dépendait aussi le fait de savoir si un référé contractuel pouvait se substituer au référé précontractuel.

Rappel de l’interaction entre référé précontractuel et contractuel

Le Conseil d’Etat a tout d’abord rappelé les règles en la matière. En effet, un référé contractuel ne peut être introduit que dans le cas où la collectivité, alors qu’un référé précontractuel lui a été notifié, a signé le marché public, sans respecter l’article L. 551-14 du code de justice administrative (CJA). Cette disposition prévoit un délai incompressible pendant lequel le contrat ne peut être signé. Il s’étend "de la saisine du tribunal administratif et jusqu'à la notification au pouvoir adjudicateur de la décision juridictionnelle".
En l’espèce, le contrat a été signé le 19 décembre. Que cette signature soit légale ou non, le juge du TA ne pouvait plus statuer sur le référé précontractuel, ce recours valant uniquement pour les marchés publics non signés.
Sur ce point, le Conseil d’Etat a validé la position du TA. Il n’a toutefois pas confirmé le raisonnement adopté concernant la recevabilité du référé contractuel.

Acheteurs publics : soyez vigilants avant de signer

Quand elle a saisi le TA, la société évincée demandait au juge de statuer sur le fondement d’un référé précontractuel et, à titre subsidiaire, sur le fondement d’un référé contractuel. Après avoir refusé de statuer en référé précontractuel, le TA a également estimé qu’il ne pouvait statuer en référé contractuel. Selon lui, le délai de l’article L. 551-14 du CJA avait bien été respecté, ce qui empêchait de transformer le référé précontractuel en référé contractuel. Pour vérifier si la ville de Paris avait bien respecté le délai qui l’empêchait de signer un contrat lorsqu’un référé précontractuel lui est notifié, le TA s’est fondé sur l’heure de la prise de connaissance effective du recours par la ville. Cette prise de connaissance étant intervenue après la signature du marché, le juge a estimé que le référé contractuel ne pouvait être examiné.
Le Conseil d’Etat n’a toutefois pas validé ce raisonnement. Il a rappelé que pour vérifier le délai pendant lequel la collectivité ne pouvait signer le marché, le point de départ devait être fixé à l’heure de la réception de la notification par la ville. Ce qui compte est donc la réception de la notification annonçant le dépôt d’un référé précontractuel et non pas l’heure de lecture de ce message. Le Conseil d’Etat a donc annulé l’ordonnance contestée mais il a rejeté sur le fond le référé contractuel de la société Cercis.

Référence : CE, 20 juin 2018, n° 417686
 

 

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