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Recyclage du papier :  un rapport esquisse des solutions pour sauver la filière

Dans un contexte incertain pour plusieurs usines françaises, la commission du développement durable de l'Assemblée nationale vient de publier un rapport visant, en vingt recommandations, à améliorer les performances de la filière du papier recyclé.

Ce mercredi 27 janvier, la commission du développement durable de l'Assemblée nationale a rendu le bilan de sa mission d'information sur la filière du recyclage du papier. Dans un contexte de crise, doublé d'une "baisse continue de la consommation de papier graphique", les travaux parlementaires, dirigés par les députées Isabelle Valentin et Camille Galliard-Minier, établissent vingt recommandations visant à renforcer les filières du papier et du carton recyclés. "Nous avons constaté que la filière n'était pas suffisamment structurée", affirme Isabelle Valentin. "On a une opportunité de limiter le déplacement de la matière à recycler, d'autant qu'une quantité importante de papier continue à partir en Europe", souligne également Camille Galliard-Minier. L'impact écologique du recyclage du papier a fait l'objet d'une étude de chercheurs de l'université de Yale et de University College London, parue en octobre dans la revue Nature Sustainability. Bilan : la production de papier recyclé consomme plus d'énergies fossiles que celle de papier issu de fibres vierges. Inverser la tendance et structurer une filière font donc partie des enjeux soulevés par les travaux de la mission, qui pourrait aboutir sur une série d'amendements ou un nouveau projet de loi. 

Souveraineté et incitations

Parmi ses souhaits, plusieurs traitent directement de la "souveraineté économique" promise par Emmanuel Macron. Les parlementaires préconisent par exemple d'accroître "les volumes de papier recyclé français dans les produits de papeterie", calendrier avec "taux d'incorporation croissant" à l'appui. La création d'un label papetier, avec un pourcentage de fibre recyclée ou, à défaut, une classification de performance sur le modèle du recy-score, sont encouragés. Sur le terrain des incitations, le rapport rebondit sur le volet "rénovation énergétique" du plan de relance en demandant une bonification spécifique au dispositif "MaPrimeRénov'" pour les entreprises du bâtiment utilisant de la ouate de cellulose, isolant fabriqué à partir de papier recyclé.
Il préconise également de faire passer de 10 à 20% le bonus de l'éco-contribution pour les papiers composés majoritairement de fibres recyclées. "Les prix changeants posent une difficulté. Une garantie de reprise à prix unique des matières recyclées pourrait aussi être une proposition", précise Camille Galliard-Minier. En prévision d'un nouveau cahier des charges de l'éco-organisme Ecofolio/Citeo, renouvelé en 2022, le rapport demande en effet au gouvernement de se pencher sur cette garantie basée sur le modèle de la REP "Emballages" et sur un fonds de compensation "pour atténuer l'ampleur de la fluctuation des prix de reprise".
Les collectivités territoriales sont elles aussi mises à contribution : elles pourraient "s'engager à acheter du papier bureautique recyclé systématiquement" et réfléchir à "installer des points d'apport volontaire dédiés aux papiers-cartons ou aux seuls papiers graphiques". Elles pourraient aussi s'engager avec d'autres acteurs - monde éducatif, parents d'élèves, éditeurs ...- à organiser "de manière systématique" la collecte dans les établissements scolaires des manuels rendus obsolètes par la révision des programmes. Autre préconisation de la mission : "soutenir de manière renforcée les démarches volontaristes des collectivités ultramarines tendant à créer ou améliorer la collecte, le tri et la valorisation des déchets, notamment pour les papiers-cartons et y compris dans le cadre d’une coopération avec les pays voisins".
Les conclusions tendent aussi à appliquer les règles édictées au plastique pour les emballages alimentaires (allant dans le sens de la fin du plastique à usage unique en 2040) pour le papier et le carton avant une prochaine révision du cadre juridique européen sur le sujet. Enfin, elle envisage une campagne de communication pour tester la perception des consommateurs sur un "papier moins blanc". 

Un secteur en difficulté 

Ces propositions ont notamment été motivées par l'annonce de la mise en vente, en juillet dernier, de l'usine Chapelle Darblay (Seine-Maritime) par son propriétaire finlandais UPM, entraînant le licenciement de 200 salariés. L'usine, seule en France à fabriquer du papier journal 100% recyclé, a jusqu'au mois de juin pour trouver un repreneur et multiplie les opérations de prospection. "Les pouvoirs publics ont une responsabilité politique à préserver un établissement qui endosse une responsabilité sociale et environnementale exemplaire", presse le rapport, allant jusqu'à affirmer que "l'abandon du site s'inscrirait à rebours de l'enjeu majeur de la réindustrialisation de la France". Le site de Chapelle Darblay, s'il est emblématique, n'est pas le seul à être menacé. Fibre Excellence, fabricant de pâte à papier, n'a toujours aucun repreneur pour son usine de 280 salariés à Tarascon (Paca). Le groupe Etex a lui aussi décidé de se retirer de la papeterie de Bègles (Gironde), rendant tout aussi incertain le sort de 90 salariés.

 

 

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