Reconstruction après les émeutes : le projet de loi présenté en conseil des ministres

Le projet de loi d'urgence autorisant le gouvernement à légiférer par ordonnance "pour la reconstruction des bâtiments et équipements publics" dégradés lors des émeutes sera examiné par le Parlement dès mardi. Les assouplissements prévus portent sur l'urbanisme, la commande publique et les modalités de financement.

Le projet de loi "Urgence pour la reconstruction des bâtiments et équipements publics" qui avait été annoncé début juillet par Emmanuel Macron devant quelque 300 maires réunis à l'Elysée (voir notre article du 4 juillet 2023) a été présenté ce mercredi 13 juillet en conseil des ministres. Il sera soumis au Sénat dès mardi puis deux jours plus tard à l'Assemblée. Suivront des ordonnances, prévues durant l'été. Le texte consiste en effet à habiliter le gouvernement à prendre des mesures par ordonnances, dans un délai maximum de trois mois. Mais l'idée est bien d'aller plus vite encore même s'il faudra "quelques semaines pour stabiliser le dispositif", notamment par rapport à certaines obligations européennes, a indiqué le ministre Christophe Béchu en présentant le projet de loi à la presse.

Ces mesures porteront sur "trois domaines permettant une accélération" de "la reconstruction des bâtiments dégradés" au "cours des violences urbaines". Ces trois domaines correspondent aux trois articles de ce texte court, dont la première version en comptait quatre : l'urbanisme, la commande publique et les règles de financement.

Urbanisme

En matière de règles d'urbanisme, il s'agira de clarifier "les conditions dans lesquelles on peut reconstruire à l'identique, en particulier en précisant que même s'il y a eu des modifications des documents d'urbanisme dans l'intervalle, la reconstruction est possible", a résumé Christophe Béchu. La notion de reconstruction à l'identique sera en outre "légèrement" élargie pour pouvoir y inclure la prise en compte de nouvelles normes de sécurité ou environnementales. Par ailleurs, les travaux pourront être déclenchés dès le dépôt de la demande d'autorisation, "les délais auxquels l'administration est tenue" seront raccourcis et "le silence de l'administration vaudra approbation".

Commande publique

S'il y aura bien toujours obligation de consultation et de "comparaison d'offres différentes", le gouvernement envisage de "supprimer l'obligation de publicité" qui "entraîne des semaines incompressibles pendant lesquelles vous devez attendre des offres". L'objectif étant de permettre aux collectivités locales de "se saisir tout de suite de plusieurs offres pour ensuite pouvoir déclencher les travaux", en deçà d'un certain seuil qui n'est pour l'heure pas précisé. Une simplification des allotissements est également prévue. On suppose que c'est sur ce volet passation de marchés que la conformité aux règles européennes devra être prise en compte.

Financement

En termes de modalités de financement, deux mesures. D'une part, "la récupération de TVA se ferait dans l'année en cours pour ne pas qu'il y ait d'avances à faire", et non deux ans plus tard. D'autre part, l'obligation de participation minimale des communes au financement du projet de reconstruction sera supprimée. "Il y a une règle de participation minimale obligatoire des collectivités : normalement, le porteur de projet, le bénéficiaire, doit mettre au moins 20% de la somme globale et peut espérer jusqu'à 80% de subventions. Nous créons la possibilité d'un zéro reste à charge pour les collectivités concernées", a expliqué le ministre, qui prévoit en outre de "déplafonner les montants de subventions auxquelles normalement les EPCI sont tenus quand il s'agit d'aller aider les communes qui sont sur leur territoire". Ces deux mesures répondent, on le sait, à deux demandes exprimées par l'Association des maires de France.

Christophe Béchu a en revanche bien précisé que l'objet de ce texte n'était pas d'apporter de nouvelles aides ou sources de financement : "Il n'y a pas d'engagement budgétaire du gouvernement dans le cadre de ce projet de loi. Nous fixons les règles. La question ensuite du financement, de ce point de vue, elle n'a pas varié", a-t-il déclaré, évoquant le rôle des assureurs… mais aussi des émeutiers eux-mêmes, qui pourraient "financer une partie des dégâts au travers des amendes pénales" ou des travaux d'intérêt général. Or l'AMF a pour sa part demandé la mise en place par l'État, dans le cadre d'une loi de finances rectificative, d'un "fonds d'urgence exceptionnel" pour "financer la reconstruction et compenser les pertes induites par la fermeture des services publics".

Le ministre a rappelé qu'en attendant la loi et les ordonnances, une circulaire a été prise pour rappeler aux préfets les solutions possibles d'accélération à droit constant (voir notre article du 6 juillet). Et a invité les maires à ne pas hésiter à saisir son ministère "s’ils sont confrontés à des situations qui (…) permettront d'enrichir les réponses" dans le cadre des futures ordonnances.

Interrogé sur le cas des écoles (84 écoles auraient été "touchées") devant être prêtes pour la rentrée, il a évoqué la solution provisoire de bâtiments modulaires, mais a aussi mentionné la question plus urgente encore des centres de loisirs qui devaient être opérationnels dès ce début des vacances scolaires.

Au total, a indiqué Christophe Béchu, 500 communes ont été touchées "à un titre ou un autre" par les émeutes, dont une centaine pour leur mairie. 700 bâtiments ont subi des "dégâts très substantiels", dont une cinquantaine ont été "complètement démolis".

 

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