Lutte contre l'exclusion - Qui sont les personnes à la rue ?
Les résultats définitifs de la "Nuit de la solidarité", opération de décompte des personnes à la rue à Paris menée en février dernier, viennent d'être publiés. Ils comprennent une série d'éléments permettant de mieux connaître le profil des personnes recensées cette nuit-là.
L'Apur (Atelier parisien d'urbanisme) publie les résultats définitifs de l'étude sur "Les personnes en situation de rue à Paris la nuit du 15-16 février 2018". Il s'agit en l'occurrence de l'exploitation de l'opération menée dans les rues de la capitale lors de la "Nuit de la solidarité", organisée par la mairie de Paris (voir notre article ci-dessous du 21 février 2018). Environ 2.000 personnes, dont 1.700 bénévoles, avaient alors procédé à un décompte des personnes à la rue, afin de disposer d'un chiffrage précis sur la réalité de ce phénomène, source de tension récurrente entre les pouvoirs publics et les associations. L'opération avait dénombré 2.952 personnes. Un chiffre très probablement sous-estimé, car les enquêteurs n'avaient pas pénétré dans tous les parkings ou dans les cages d'immeubles.
3.035 personnes "en situation de rue" dans la nuit du 15 au 16 février
Dix mois plus tard, les résultats définitifs sont très proches de celui révélé sur le moment. L'opération a en effet permis de dénombrer, cette nuit là, 3.035 personnes "en situation de rue" : 2.080 recensées effectivement dans les rues de la capitale, 226 dans les gares, 55 dans les salles d'attente des urgences hospitalières, 373 dans les stations de métro, 112 dans les parkings enquêtés, 189 dans les bois de Boulogne et de Vincennes et la colline du 18e arrondissement. Les décomptes les plus nombreux concernent les 10e, 12e, 18e et 19e arrondissements.
Au-delà du dénombrement, l'opération comportait également un questionnaire, proposé à chaque personne seule ou en famille et sans solution d'hébergement. Au total, 1.834 questionnaires ont été complétés. Leur exploitation permet de mieux connaître le profil des personnes recensées cette nuit là. Ainsi, si les hommes restent très largement majoritaires (88%), les femmes apparaissent plus nombreuses que dans les précédentes enquêtes de même type. En termes d'âge, 16% des personnes rencontrées avaient moins de 25 ans, 66% de 25 à 54 ans, 17% de 55 à 70 ans et 1% plus de 70 ans.
Près de la moitié sont sans logement personnel depuis plus d'un an
En termes de situation, 72% des personnes rencontrées étaient seules, 23% en groupes de cinq personnes ou plus, 3% formaient des couples sans enfant et 2% des familles avec enfants. Au total, l'enquête a dénombré 8 femmes enceintes et 35 enfants, ainsi que 35 animaux.
Parmi les répondants, 29% étaient sans logement personnel depuis plus de trois mois et 46% depuis plus d'un an. L'ancienneté de la présence à Paris est forte aux deux extrêmes : 25% des personnes disent être présentes à Paris depuis moins de trois mois, tandis que 37% y "résident" depuis plus de cinq ans.
Autre information inquiétante : près d'une personne sans abri sur deux (45%) indique n'avoir jamais été hébergé et 33% ne l'ont plus été depuis plus d'un mois. Pour celles qui l'ont été, l'hébergement s'est déroulé principalement dans un centre (38%) ou chez un tiers (26%).
Moins d'un quart sont suivis par un travailleur social
Une très forte proportion (64%) de personnes en situation de rue rencontrées lors du décompte n'appellent jamais le 115 et 30% seulement de temps en temps, les raisons invoquées le plus souvent étant la méconnaissance du service, la difficulté à joindre le numéro ou l'anticipation du manque de places.
Seules un peu plus d'un quart des personnes rencontrées (27%) sont suivies par un travailleur social, mais 50% sont en contact avec des associations. Malgré cette situation très difficile, 59% des répondants disent n'avoir aucun problème de santé.
Les ressources des personnes rencontrées proviennent principalement de la mendicité (36%), de prestations sociales ou minima sociaux (34%), de "petits boulots" (22%), de l'aide de proches ou d'amis (7%)...