Sécurité - Quartiers prioritaires : l'effet ZSP n'est pas au rendez-vous
Ce sont des chiffres qui plaident pour l'existence des zones de sécurité prioritaires (ZSP) mais qui, en même temps, ne démontrent pas leur efficacité. Vols à main armée, vols violents, vols sans violence, coups et blessures volontaires, cambriolages, vols de voitures… Dans tous les domaines, la délinquance des communes avec ZSP est supérieure à celle des communes contenant un quartier prioritaire sans ZSP. C'est ce que montre le rapport 2015 de l'Observatoire national de la politique de la ville, publié le 3 mai (sur le sujet voir notre article ci-contre). Trois ans après la mise en œuvre des ZSP, il n'y a pas eu de renversement net de la délinquance sur la commune prise dans son ensemble. Rappelons tout d'abord que la France compte 80 ZSP, réparties dans plus de 150 communes (les arrondissements des grandes villes étant considérés comme des communes à part entière). Ces ZSP ont été créées à partir de l'été 2012 en plusieurs vagues dans les territoires marqués par une délinquance très prégnante (essentiellement dans des quartiers sensibles de zone urbaine, moins souvent en zone de gendarmerie), avec l'idée de concentrer les efforts sur un nombre limité d'objectifs propres à chaque zone : cambriolages, trafics de stupéfiants, etc. Mais en 2015, les vols violents sans arme sont près de 50% plus nombreux dans les communes avec ZSP que dans les autres communes avec quartier prioritaire. L'écart est de 25% pour les vols "dans ou sur véhicules" ou les vols sans violence. Les seules exceptions à cet excès de délinquance concernent les cambriolages et les vols de véhicules dans la métropole parisienne : le taux de délinquance est moins élevé dans les communes ou arrondissements comportant une ZSP que dans celles ou ceux comprenant uniquement un quartier prioritaire. L'observatoire se garde cependant de toute conclusion. La comparaison "serait à approfondir", estime-t-il. "Certaines ZSP ont pu voir leur délinquance diminuer sous l'effet du déploiement des forces de l'ordre entre 2012 et 2015, et cette dernière en conséquence a pu se diffuser aux frontières de la ZSP", explique l'ONPV. Ce qui serait une illustration de "l'effet plumeau" ou "effet de déport" souvent mis en avant par les élus, mais aussi réfuté par le ministère de l'Intérieur. En clair, les ZSP auraient moins agi en profondeur sur la délinquance qu'elles ne l'auraient déplacée.
Cela fait plus d'un an que le gouvernement a livré des données sur les ZSP. Lors du Comité interministériel à l'égalité et à la citoyenneté du 6 mars 2015, il avait affiché un "bilan positif". "En 2014, les vols à main armée y ont reculé de 26%, les incendies de véhicules de 11% et les cambriolages de 3,8%", indiquait-il. Mais, depuis, silence radio. Dans un courrier de juin 2015, le ministre de l'Intérieur avait demandé au préfet Christian Lambert de lui faire des propositions afin "de relancer la dynamique des ZSP et de proposer les ajustements géographiques". Son rapport annoncé pour l'automne 2015 n'a jamais été publié. Christian Lambert est aujourd'hui directeur de la sûreté à la SNCF.