Projet de loi sur la régulation de l’espace numérique (Sren) : accord en commission mixte paritaire
Députés et sénateurs réunis en commission mixte paritaire (CMP) sont parvenus mardi 26 mars 2024 à une version commune du projet de loi de régulation de l'espace numérique (Sren). Ce texte censé lutter contre l'insécurité numérique promet des avancées en matière de souveraineté des données, notamment de santé, et de développement de l'économie numérique.
La commission mixte paritaire (CMP) qui réunit députés et sénateurs est parvenue mardi 26 mars 2024 à un accord sur le projet de loi visant à sécuriser et réguler l'espace numérique (Sren).
Adopté au Sénat le 5 juillet, puis le 17 octobre 2023 à l'Assemblée nationale, le projet de loi Sren a nécessité un travail de réécriture en commission mixte paritaire. Il s'agissait en partie de répondre aux exigences de la Commission européenne, qui avait mis en garde contre un risque de "surtransposition" du droit européen. Malgré le déclenchement d'une procédure accélérée, le texte a fait l'objet de plusieurs échanges tendus avec la Commission européenne. C'est donc cet impératif d’harmonisation, en particulier vis-à-vis du Digital Services Act (DSA), que les parlementaires avaient à l'esprit lors de leurs échanges.
Outre les filtres anti-arnaque, le blocage rapide des sites pornographiques accessibles aux mineurs, la peine de bannissement des réseaux sociaux pour les cyber-harceleurs… l'accord en CMP permet des avancées majeures en matière de souveraineté des données, de protection face aux législations extraterritoriales d'États tiers à l’Union européenne et de développement de l’économie numérique.
Une version plus protectrice des données de santé
Dans le détail, députés et sénateurs sont finalement parvenus à aplanir leurs divergences concernant la protection des données numériques stratégiques et sensibles, en allant dans le sens de la version adoptée par les sénateurs, plus protectrice pour les données de santé. La CMP a ainsi inscrit dans la loi des obligations de protection face aux législations extraterritoriales pour les administrations de l'État, ses opérateurs, ses groupements d’intérêt public, y compris le Health Data Hub - plateforme des données de santé permettant la réalisation de projets innovants et d'intérêt public dans le domaine de la santé - qui a recours à des prestations de services d’informatique en nuage (cloud).
"La CMP a plafonné à un an, y compris renouvellement, la durée d'octroi des crédits d’informatique en nuage (cloud) afin de permettre une plus juste concurrence sur le marché du cloud", a indiqué un communiqué du Sénat du 27 mars 2024. La CMP a également confié à l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) des prérogatives de règlement des litiges portant sur la facturation des frais de transfert de données afin de permettre une concurrence plus saine sur le marché du cloud.
Anonymat sur internet et identité numérique
Autre point particulièrement discuté du texte dans les deux chambres, la question de l'anonymat sur internet. La version finale en reste à ce qui avait été adopté à l'Assemblée, à savoir donner accès à une "identité numérique" à tous les Français qui le souhaitent d'ici 2027, sans obliger les internautes à en être détenteurs pour ouvrir un compte sur les réseaux sociaux. Partisan de cette obligation à terme, le rapporteur du projet de loi à l'Assemblée Paul Midy en a de nouveau fait la promotion dimanche dans un texte publié par La Tribune, tout en admettant que "ce sujet de l'anonymat, nous devons le traiter au niveau européen, qui est le meilleur niveau pour faire face aux géants du numérique".
Pionnier en Europe en matière de régulation du numérique
Notons que la CMP a autorisé les entreprises de jeux, à titre expérimental et pour une durée de trois ans, à proposer des jeux à objets numériques monétisables (Jonum). Afin d'encadrer ces jeux numériques fondés sur les technologies émergentes du Web 3, une habilitation par ordonnance est prévue. Les Jonum, qui sont un nouveau type de jeux en ligne, à la croisée entre les jeux d’argent et de hasard et les jeux vidéo, présentent de nombreux risques : addiction, blanchiment d'argent...
"L'ensemble de ces dispositions doit permettre à notre pays d'être pionnier en Europe en matière de régulation du numérique et de renforcement de notre souveraineté", s'est félicité le Sénat dans son communiqué. La secrétaire d’État chargée du numérique, Marina Ferrari, a salué sur X mardi 26 mars au soir le travail cette commission mixte paritaire conclusive, estimant que le texte, une fois définitivement adopté, permettrait aux Français "d'évoluer dans un espace numérique plus sûr".