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Economie - Projet de loi Macron : sénateurs et députés échouent à s'entendre, l'Assemblée reprend la main

Notaires, autocars ou permis de conduire :  sénateurs et députés ont échoué mercredi 3 juin à trouver un accord sur le projet de loi Macron qui revient dès lundi en commission à l'Assemblée et qui pourrait encore être complété par le gouvernement.
La commission mixte paritaire (CMP, sept députés et sept sénateurs) qui était chargée d'élaborer une version commune entre les deux chambres s'est séparée, sans surprise, sans surmonter les divergences entre le texte adopté par l'Assemblée à la mi-février par le biais de l'article 49-3 de la Constitution (engagement de responsabilité du gouvernement) et celui, sensiblement différent, voté ensuite par la majorité de droite du Sénat.
Si le Sénat a voté quelque 80 articles exactement comme l'Assemblée et soutenu quelques amendements gouvernementaux (comme la création du dispositif exceptionnel de "suramortissement" pour les investissements industriels), il y avait "des points de désaccord inconciliables" pour le rapporteur du projet de loi à l'Assemblée, Richard Ferrand (PS).
Parmi ceux-ci, les restrictions apportées par le Sénat à la libéralisation du transport par autocar, à la réforme du permis de conduire ou encore à la plus grande liberté d'installation et tarifaire des professions juridiques réglementées (notaires, huissiers...).
Les députés PS contestaient également toute la partie sur le droit du travail votée par le Sénat, qui a notamment remis en cause le principe "pas d'accord social, pas d'ouverture" pour l'extension du travail dominical et a voté certains "marqueurs" de droite comme le rétablissement des jours de carence pour la fonction publique.
"Le Sénat est attaché à un certain corporatisme d'oligarchies dans la distribution, les professions juridiques, les banques", a commenté le président de la commission spéciale à l'Assemblée, François Brottes (PS).
Au contraire, le président de la commission spéciale du Sénat, Vincent Capo-Canellas (UDI-UC), a rejeté la responsabilité de l'échec sur la gauche.
"On ne peut que distinguer un vrai décalage entre le discours pro-entreprises d'Emmanuel Macron et beaucoup de députés socialistes", a-t-il jugé. "L'utilisation du 49-3 à l'Assemblée a considérablement radicalisé ceux-ci. Les manoeuvres à l'approche du congrès du PS ont pesé également", a-t-il accusé.
Les sénateurs communistes ont eux dénoncé un "désaccord en trompe-l'oeil" car "il intervient sur la surenchère de la droite, pas sur les axes clés du projet de loi".

"Freins psychologiques"

Le projet de loi repart donc à l'Assemblée qui devrait rétablir sa version en commission à partir de lundi. Le texte passera en séance à partir du 16 juin pour un vote le 24. Il retournera ensuite au Sénat avant son adoption définitive probablement fin juillet par l'Assemblée qui a le dernier mot.
Le texte, qui comportait initialement 106 articles, est parti au Sénat avec 295 articles et en revient avec 332. Et ce n'est peut-être pas fini.
Face à la hausse continue du chômage, l'exécutif pourrait en effet déposer en séance des amendements reprenant les annonces qu'il doit faire le 9 juin pour lever les "freins psychologiques" à l'embauche dans les PME. Il s'agit notamment du plafonnement des indemnités prud'homales versées aux salariés licenciés sans cause réelle ni sérieuse, alors que le projet de loi se contente pour l'instant d'introduire un barème indicatif.
Le gouvernement est resté pour l'instant flou sur d'autres annonces, comme un assouplissement des "accords de maintien dans l'emploi" qui permettent aux entreprises en difficulté d'aménager temporairement le temps de travail et les salaires et ont été peu utilisés jusqu'ici.
Reste à savoir comment ces mesures seront accueillies au sein du groupe PS où l'intention des frondeurs de voter contre avait conduit le gouvernement à recourir au 49-3 en première lecture. Pour François Lamy, proche de Martine Aubry, "ce qui est important c'est que le parti dialogue. Ce n'est certes pas le parti qui va dicter à l'exécutif ce qu'il doit faire mais qu'il prenne position".
Un premier échange a eu lieu mardi au groupe où Emmanuel Macron a dit vouloir "conserver l'ambition et l'équilibre du texte". "La reprise ne se fera pas par des mesures ultra-libérales caricaturales ni par de l'immobilisme mais par des réformes concrètes, comme les autocars ou le permis de conduire, et des réformes en profondeur comme les prud'hommes ou l'actionnariat salarié", leur a-t-il déclaré.

 

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