Politique de la ville - Projet de loi Lamy : un impact sans douleur pour le budget de l'Etat ?
Le projet de loi relatif à la ville et à la cohésion urbaine a été déposé le 2 août 2013, immédiatement après sa présentation en Conseil des ministres (voir notre article ci-contre "Réforme de la politique de la ville : un projet de loi en Conseil des ministres, en plein été").
L'étude d'impact associée au projet de loi assure que le texte crée "les conditions d'une action publique renforcée, mieux coordonnée et plus lisible", notamment parce qu'il sera désormais "inscrit dans la loi la mobilisation de l'ensemble des acteurs institutionnels et de la société civile ainsi que la participation des habitants". Avec la création d'une nouvelle instance d'observation et d'évaluation de la politique de la ville, issue du rapprochement de l'Onzus et du comité d'évaluation et de suivi de l'Anru, il faudrait s'attendre non seulement à "des économies de fonctionnement", mais aussi à une meilleure "organisation de l'évaluation de la politique de la ville" et surtout à des "outils de pilotage renforcés".
L'étude d'impact assure également que la réforme de la géographie prioritaire permettra de rationaliser les moyens publics, "par un redéploiement des crédits", lesquels seront "concentrés sur un nombre réduit de territoires". Concernant les moyens spécifiques de la politique de la ville (programme 147), il est bien spécifié que "la réforme de la géographie prioritaire n'a pas vocation à entraîner mécaniquement une diminution des crédits spécifiques alloués mais, à volume égal, à en optimiser l'impact".
Une gouvernance locale rénovée
Le ministère annonce également "une gouvernance clarifiée plus efficace" et que "l'entrée en vigueur des contrats de ville de nouvelle génération aura pour conséquence immédiate de rénover profondément la gouvernance locale de la politique de la ville".
Volet démocratie représentative, le fait que les contrats soient alignés sur le mandat municipal devrait "permettre aux élus des communes et intercommunalités de mieux se saisir de ces contrats, d'en porter les engagements sur toute la durée de contractualisation et d'en faire un véritable outil au service du projet de territoire". Volet démocratie participative, "en consacrant la participation des habitants comme principe structurant de la politique de la ville, [le projet de loi], dans son article 1er, doit conduire à renouveler profondément les mécanismes participatifs".
Des contrats de ville "sans charges nouvelles pour le budget de l'Etat"
Ces contrats de ville nouvelle génération seront surtout "sans charges nouvelles pour le budget de l'Etat", car ils concentreront des moyens existant déjà. D'une part, ils bénéficieront davantage des politiques de droit commun. D'autre part, ils regrouperont les moyens spécifiques de la politique de la ville : crédits d'intervention du programme 147 gérés aujourd'hui par l'Acsé naturellement, mais aussi valorisation des régimes juridiques liés au zonage, nouvelle dotation "politique de la ville" définie à l'article 3 du projet de loi (qui se substituera à l'actuelle dotation de développement urbain au montant annuel actuel de 75 millions d'euros), crédits Anru en cours et à venir et contribution ciblée des fonds européens structurels et d'investissement (voir la convention-cadre signé entre l'ARF et le ministre délégué à la ville le 13 février 2013).
PNRU, NPNRU, même financement
L'enchaînement des dépenses au titre du PNRU et du nouveau programme national de renouvellement urbain (estimés à près de 20 milliards d'euros, dont 5 milliards d'euros de concours Anru) se ferait en douceur. "Le lancement des nouveaux projets n'induira pas de décaissement dédié pour l'Anru avant 2015, et pas de manière substantielle avant 2017, est-il écrit dans l'étude d'impact. La compatibilité temporelle entre la décroissance des besoins en crédits de paiement du PNRU et la montée en charge du nouveau programme national de renouvellement urbain permet ainsi d'assurer la soutenabilité de ce dernier pour l'Anru et ses financeurs".
Pour financer à la fois l'achèvement du PNRU et la mise en œuvre du NPNRU, l'Anru disposera, "sans que cela ne soit limitatif", des mêmes ressources prévues dans la loi du 1er août 2003 (article 12) et complétée par le 6°) de l'article 2 du présent projet de loi. C'est-à-dire : Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS), une partie des produits de la surtaxe sur les plus-values de cessions immobilières, contributions de l'Union des entreprises et des salariés pour le logement (UESL).
Selon le ministère, le NPNRU devrait mobiliser près de 240.000 emplois dans la filière des bâtiments et travaux publics (BTP), dont 142.000 emplois directs sur les différentes opérations contractualisées avec l'Anru.
Son impact social devrait selon lui notamment se ressentir sur la mixité fonctionnelle et sociale du quartier rénové. Il compte sur le portage intercommunal des nouveaux contrats de ville (dont l'opération de rénovation urbaine sera une composante) pour "créer les conditions d'une plus grande mixité sociale dans les quartiers en rééquilibrant la production de l'offre de logements à bas loyers à l'échelle de l'agglomération".
Péréquation : exit la DDU
L'instauration d'une dotation spécifique "politique de la ville" (article 3) qui remplacera la DDU (dotation de développement urbain) aurait un impact nul sur le budget de l'Etat dans la mesure où "le financement de la nouvelle dotation politique de la ville reposera en l'état sur un transfert du montant actuellement consacré à la DDU", souligne l'étude d'impact.
En termes de ressources humaines toutefois, la gestion de cette dotation sera désormais gérée par le SG-CIV, entraînant un transfert de charge de travail depuis la DGCL (ministère de l'Intérieur).
Par ailleurs, le ministère ne cache pas que la répartition de la nouvelle dotation aura des incidences budgétaires pour les communes actuellement bénéficiaires de la DDU puisque le versement se fera désormais à l'EPCI ("avec un reversement potentiel de l'EPCI vers les communes en politique de la ville en fonction de la compétence mise en œuvre", est-il précisé), même s'il est prévu, à titre exceptionnel un versement direct à la commune.