Projet de loi de décentralisation : un nouveau calendrier... et un quatrième D
Jacqueline Gourault dit souhaiter que la rédaction du projet de loi 3D soit achevée au plus tard à la fin de l'année, pour un examen au Parlement "au premier semestre 2021".
Déjà retardée par la crise sanitaire du printemps dernier, la présentation du projet de loi "3 D" (comme décentralisation, différenciation, déconcentration) est à nouveau repoussée.
Les services de la ministre de la Cohésion des territoires devaient "finaliser" à la rentrée la rédaction du projet de texte, afin que celui-ci soit présenté "à l'automne". C'est ce que Jacqueline Gourault avait annoncé, le 22 juillet dernier, devant des députés (voir notre article du 23 juillet 2020). Mais la ministre a dû réviser ses ambitions. Désormais, elle souhaite que la rédaction du projet de réforme soit achevée au plus tard à la fin de l'année. La ministre l'a déclaré, ce 30 septembre, devant la commission des lois de l'Assemblée nationale. Elle n'a pas annoncé de date très précise pour l'examen au Parlement de ce projet de loi très attendu : "Ce que je peux vous assurer c'est que ce sera au premier semestre 2021", a-t-elle lancé aux députés. Peu après, le cabinet de la ministre a semé le trouble en diffusant un script de l'allocution de Jacqueline Gourault, dans lequel l'examen du projet de loi était prévu au "deuxième semestre". Une différence avec le propos de la ministre que le cabinet a finalement corrigée. C'est bien "le premier semestre" 2021 qu'il faut retenir, a fait savoir son entourage, en diffusant ultérieurement une nouvelle version du texte du discours.
"L'embouteillage" des réformes en attente ne permet pas de déterminer avec beaucoup de précision la fenêtre de tir laissée à l'examen du projet de loi, a justifié Jacqueline Gourault. Mais on peut imaginer que celui-ci ait lieu au cours du deuxième trimestre 2021, le gouvernement attendant le lendemain des élections départementales et régionales (lesquelles se tiendront en mars prochain).
La ministre a par ailleurs indiqué vouloir que la discussion parlementaire de l'autre projet de loi concernant les territoires, de nature organique celui-ci, qui a pour but de faciliter les expérimentations, soit "terminée dès le premier trimestre" 2021, soit "avant" le début de l'examen du projet de loi ordinaire. Pour rappel, le projet de réforme a été présenté fin juillet en conseil des ministres (voir notre article du 29 juillet 2020). Le Sénat doit l'examiner en séance publique à partir du 2 novembre prochain.
Transferts d'outils réglementaires
Afin de tenir le timing qu'elle s'est fixé, la ministre va reprendre "dès le 5 octobre prochain" la concertation avec les élus locaux, avec un déplacement dans le Gers. La rencontre sera suivie d'un déplacement le 12 octobre, dans le Loir-et-Cher. À la même période (entre le 6 et le 14 octobre), le cabinet de la ministre recevra, "en lien avec les ministères concernés", les associations d'élus. L'objectif sera d'"étudier précisément l'ensemble de leurs propositions". À ce moment-là aussi, Matignon organisera un cycle de réunions interministérielles, afin de "consolider la position" du gouvernement.
L'ambition du gouvernement est de "donner aux collectivités l’ensemble des bons outils pour accélérer les transitions", particulièrement dans les domaines de la transition écologique, du logement et des transports. Dès avril 2019, le président de la République avait annoncé que la réforme en matière de décentralisation concernerait prioritairement ces compétences. Par ailleurs, le gouvernement entend profiter de la réforme pour "tirer les conséquences de la crise sanitaire dans le domaine de la santé et des solidarités", comme l'a exprimé Jacqueline Gourault. Dans chacun de ces domaines, le gouvernement examinera "les doublons qui existent entre les actions de l'État et celles des collectivités". Des transferts des outils réglementaires aux collectivités locales sont aussi envisagés. "Au lieu que ce soit une réglementation qui vient de Paris - comme disent les élus locaux - ce sera une délibération de la collectivité concernée, qui au fond prendra la norme, donc prendra ses responsabilités en termes réglementaires (bien sûr sur les compétences des collectivités)", a précisé sur le sujet Jacqueline Gourault. L'objectif est de permettre aux collectivités d'"avoir les mains libres pour agir". Enfin, on saura que les collectivités "auront les moyens de mieux se répartir les compétences entre elles, à travers des outils de gouvernance partagée", comme l'a indiqué la ministre.
À travers la réforme, le Premier ministre entend simplifier l'action publique. Ce sera le quatrième D du projet de loi : "décomplexifier", a lancé Jacqueline Gourault, en reprenant une formule de Jean Castex.
La ministre a par ailleurs confirmé que la réforme ne sera pas de nature institutionnelle, rompant ainsi avec les lois votées sous le précédent quinquennat qui ont touché à l'architecture des collectivités et remanié la carte administrative. La ministre a estimé qu'il faudrait mener une réforme du Grand Paris, dont l'organisation est aujourd'hui peu satisfaisante, selon elle. Mais, "le temps est trop court pour faire cette réforme" (via le projet de loi 3 D), a-t-elle jugé. En poursuivant : "Ça n'empêche pas d'y travailler."