Projet de loi d'accélération du nucléaire : les débats sont lancés au Sénat

Le Sénat a débuté ce 17 janvier l'examen en première lecture du projet de loi d'accélération du nucléaire porté par Agnès Pannier-Runacher, qui vise à favoriser la construction de nouveaux réacteurs.

Le projet de loi d'accélération du nucléaire n'acte pas "un quelconque affaiblissement des enjeux de sûreté nucléaire, de protection de la biodiversité ou encore de participation du public", a voulu rassurer Agnès Pannier-Runacher ce 17 janvier au Sénat, en ouverture de l'examen en première lecture de ce texte visant à simplifier les procédures administratives liées à la construction de nouveaux réacteurs.

"Le texte ne modifie ni le processus d'autorisation environnementale, ni le processus d'autorisation de création qui traite des enjeux de sûreté nucléaire", a souligné la ministre de la Transition énergétique. "Ce texte n'est pas un texte de programmation énergétique", a également insisté la ministre, alors qu'en commission les sénateurs ont élargi la portée du projet de loi, pour lui donner une dimension plus stratégique (voir notre article). Le rapporteur, Daniel Gremillet, a ainsi fait sauter des "verrous" en supprimant notamment l'objectif passé de réduction à 50% de la part du nucléaire dans la production d'électricité d'ici à 2035, et en imposant la révision du décret qui prévoit la fermeture de 12 réacteurs, en plus de Fessenheim.

La loi de programmation énergétique, "qui sera soumise au Parlement en 2023" fait l'objet d'une "grande concertation" qui "totalise plus de 25.000 contributions à ce jour", a précisé Agnès Pannier-Runacher." "Elle sera conclue, du 19 au 22 janvier 2023, par un 'Forum des Jeunesses' (...) qui réunira 200 jeunes de 18 à 35 ans" et son résultat sera communiqué "dans son intégralité" aux parlementaires pour le débat parlementaire sur la loi de programmation, a-t-elle ajouté.

Objectif de relance largement partagé dans l'hémicycle

Le projet de loi d'accélération "ne préempte pas la technologie des réacteurs et peut donc s'appliquer tout aussi bien à des EPR (réacteurs pressurisés, ndlr) qu'à des SMR (réacteurs de plus petite taille, ndlr)", a encore relevé la ministre. Mais il "n'en est pas moins très important", a-t-elle affirmé. Ses dispositions "vont avoir un impact sur le délai de mise en services, et donc sur le coût des éventuels futurs nouveaux réacteurs nucléaires en France". "En gros, on ne perd pas de temps", a résumé Agnès Pannier-Runacher, précisant que ce texte technique "permettra de ne pas ajouter un délai de 2 à 3 années à la construction d'un réacteur".

Deuxième volet du triptyque énergie - après le texte dédié aux énergies renouvelables et avant la loi de programmation - il doit permettre de concrétiser la relance d'une politique nucléaire "ambitieuse et durable" amorcée par Emmanuel Macron, qui a annoncé son intention de construire six nouveaux réacteurs et souhaité que soient lancées les études pour la construction de huit autres. Les deux prochains EPR devraient être implantés à Penly (Seine-Maritime), suivis de deux autres à Gravelines (Nord), selon les plans d'EDF.

L'objectif de relance du nucléaire est partagé par la quasi-totalité des sénateurs, majoritairement de droite, à l'exception du groupe écologiste. Même si, à l'instar du rapporteur LR Daniel Gremillet, ils déplorent que le "gouvernement légifère dans le désordre". Dans l'hémicycle, la présidente LR de la commission des affaires économiques, Sophie Primas, a fait le procès d'un "gouvernement qui a totalement délaissé le nucléaire". "Notre commission a transformé un texte technique en affirmation d'une volonté politique pour réussir enfin la relance du nucléaire", a-t-elle affirmé.

Volonté de "gagner du temps"

Le projet de loi vise à "gagner du temps" en simplifiant les procédures administratives pour la construction de nouvelles installations à proximité de sites nucléaires existants. Cela pour une durée limitée à 15 ans dans le texte initial, portée à 20 ans par les sénateurs en commission. Concrètement, les sites seront dispensés d'autorisation d'urbanisme car le contrôle de conformité sera assuré par l'État. Le droit d'expropriation sera assoupli. Ou encore les travaux sur les bâtiments non destinés à recevoir des substances radioactives pourront être engagés avant clôture de l'enquête publique.

Concernant le calendrier, Agnès Pannier-Runacher avait avancé lors de son audition par les sénateurs en commission l'objectif de 2027 pour "la première coulée de béton", "2035-2037" pour la mise en service.

Motion de rejet défendue en vain par les écologistes

Gouvernement et majorité sénatoriale vont quand même trouver sur leur chemin les sénateurs écologistes, pour qui "ce nouveau nucléaire va à contre-sens de l'Histoire", selon leur chef de file Daniel Salmon. Ils ont défendu sans succès une motion de rejet d'emblée du texte, qui met selon eux les parlementaires devant le "fait accompli", alors qu'un débat public sur la construction de nouveaux réacteurs nucléaires n'est pas terminé. Argument réfuté par la ministre. "Ce texte ne préempte en aucun cas les décisions qui seraient prises sur l'avenir du mix énergétique français ou sur la construction du programme EPR2", assure-t-on au ministère.

 Un vote solennel sera organisé mardi 24 janvier dans l'hémicycle du Sénat, puis le projet de loi ira à l'Assemblée nationale.

 

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