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Prévention des risques naturels : dix ans après la tempête Xynthia, de nouvelles mesures en préparation

Le ministère de la Transition écologique a dressé ce 18 février le bilan des actions engagées depuis le passage de la tempête Xynthia pour prévenir les risques d'inondation et de submersion marine. Il a aussi détaillé les mesures annoncées lors du Conseil de défense écologique du 12 février prévoyant notamment d'accélérer la mise en œuvre des programmes d'action pour la prévention des inondations (Papi) et de réaménager les littoraux pour faire face au recul du trait de côte.

Il y a presque dix ans, dans la nuit du 26 au 27 février 2010, une partie de la façade atlantique était durement frappée par la tempête Xynthia. Vents violents, forte dépression, coefficient de marée élevé : tous ces facteurs cumulés ont entraîné un phénomène de submersion marine d'une rare violence, provoquant la mort de 47 personnes et de lourds dégâts matériels. Après la catastrophe, l'Etat a mis en place une série d'actions concrètes sur les territoires concernés, en commençant par réaliser un état des lieux des zones de danger. Dans ces dernières, il a mobilisé le fonds de prévention des risques naturels majeurs ou fonds Barnier pour acquérir aux prix du marché et sans prise en compte du risque des biens gravement sinistrés ou menacés que leurs propriétaires souhaitaient vendre. 1.176 biens ont ainsi été acquis pour un montant total d'environ 330 millions d'euros. Des réaménagements ont également été menés sur les communes les plus touchées en Vendée – La Faute-sur-Mer et L'Aiguillon-sur-Mer -, mais aussi en Charente Maritime, notamment pour renaturer les espaces les plus exposés au risque.
Parallèlement, des travaux ont été engagés sur les ouvrages de protection – 50 km de digues en Charente Maritime et 28 km en Vendée. Dans ces deux départements, 31 programmes d'actions de prévention des inondations (Papi) et projets d'endiguements ont été élaborés par les collectivités locales pour un investissement total de 320 millions d'euros dont 130 millions d'euros apportés par l'Etat à travers le fonds Barnier. Au-delà des travaux prévus sur les digues, les Papi permettent de mettre en œuvre des mesures de réduction de la vulnérabilité du bâti (diagnostics de vulnérabilité, travaux…), de renforcer la diffusion de la culture du risque (pose de repères de crues, mise à jour de plans communaux de sauvegarde…), d'améliorer les connaissances (installation de marégraphes, structuration d'observatoires des risques…), de mettre en place des systèmes locaux de prévision, etc.

Accélération des plans de prévention des risques littoraux

La gestion de l'après Xynthia a aussi mis en évidence la nécessité de prendre davantage en compte le risque de submersion marine dans l'aménagement du territoire. Pour le ministère, la mise en place au 1er janvier 2018 de la compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations (Gemapi) confiée aux intercommunalités va dans le bon sens en faisant converger les politiques d'urbanisme et de prévention des inondations pour assurer une protection au plus près des populations. Autre avancée, après Xynthia : l'accélération des plans de prévention des risques littoraux (PPRL) qui permettent de prendre en compte le risque de submersion marine dans l'aménagement du territoire. 310 PPRL sont réalisés ou en cours d'élaboration sur l'ensemble du territoire. Toutes les communes de Vendée exposées au risque de submersion sont aujourd'hui couvertes par un PPRL et celles de Charente Maritime le seront fin 2020. Les dispositifs de vigilance pour mieux informer les populations et les pouvoirs publics en cas de phénomènes météorologiques dangereux ont en outre progressé ces dernières années, insiste le ministère. Dès octobre 2011, Météo France a ainsi mis en place une vigilance spécifique vagues-submersions et depuis décembre 2011, les maires et les préfets peuvent bénéficier gratuitement de son dispositif APIC (avertissement sur les pluies intenses à l'échelle des communes).
Le dernier Conseil de défense écologique (CDE) qui s'est tenu ce 12 février a acté de nouvelles mesures qui visent à la fois à renforcer les dispositifs de prévention et d'action pour lutter contre les inondations, anticiper l'érosion du trait de côte, qui concerne 20% du littoral, et prévenir les risques de submersion.

Faciliter l'élaboration et la mise en œuvre des PAPI

L'une des principales mesures consiste à diviser par deux la durée d’élaboration des PAPI. Ils couvrent aujourd'hui 12.600 communes mais la démarche est souvent longue et fastidieuse. Pour la faciliter, il est prévu de désigner un chef de projet dans les services de l’État, auprès des préfets de département et pour chacun des PAPI, afin que les collectivités travaillent avec un interlocuteur unique. Les guides pédagogiques destinés aux collectivités et aux maîtres d’ouvrages seront actualisés pour les aider dans la conduite des différentes étapes associées à l’élaboration du PAPI (analyses coûts-bénéfices, études environnementales, etc.). Le PAPI d’intention doit aussi évoluer en démarche de précadrage courte et ciblée pour pouvoir réaliser en amont les études nécessaires à la mise en oeuvre d’un programme d’actions. Il est également prévu d'organiser une journée annuelle d’échanges entre porteurs de PAPI et services de l’État afin de partager les bonnes pratiques. Il est prévu de labelliser davantage de PAPI à l’échelle du bassin hydrographique pour prendre les décisions au plus près des territoires (70 % des décisions contre 25 % aujourd’hui).
La mise en oeuvre des PAPI doit aussi être accélérée pour protéger plus rapidement les populations et améliorer la résilience des territoires, souligne-t-on au ministère. Une procédure simplifiée pourra ainsi s'appliquer aux ouvrages hydrauliques existants lorsque la nature des travaux le permet, en particulier lorsqu’il s’agit de modifications ou de régularisations. Une procédure accélérée spécifique sera en outre créée pour les ouvrages hydrauliques répondant aux conditions de l’urgence civile. "La situation d’urgence civile intervient lorsqu’une catastrophe naturelle nous fait prendre conscience d’un risque nouveau et que la connaissance de ce risque nécessite, dans les meilleurs délais, de prendre les mesures nécessaires à la protection des populations", précise le ministère. La gestion des modifications des PAPI sera simplifiée pour ne soumettre à avenant que les modifications significatives du programme d’actions. "Ainsi, la labellisation de l’avenant ne sera conservée que pour des modifications de travaux ayant des conséquences significatives sur l’analyse coûts-bénéfices ou supérieurs à 3 millions d'euros", indique le ministère.
Par ailleurs, 9 sites ont été retenus à l'issue d'un appel à manifestation d’intérêt qu'il a lancé. Les lauréats seront accompagnés pour engager un réaménagement de sites exposés à un risque d’inondation. Une équipe pluridisciplinaire composée d’architectes, d’urbanistes, d’ingénieurs sera mise à leur disposition pour concevoir ces réaménagements. Les villes de Saint-Étienne, Dax, Béziers, Vernon, Saint-Nazaire, Montereau-Fault-Yonne, Saint- Pierre-des-Corps, Marseille et Touques bénéficieront de ce soutien.

Affiner l'information sur le recul du trait de côte

Pour le réaménagement des littoraux, le CDE a arrêté différents niveaux d'actions. Le premier a trait à la connaissance et au partage de l'information. Le réseau des observatoires locaux du trait de côte doit être étoffé pour évaluer avec précision son évolution sur tout le territoire. Les habitants seront informés sur le recul du trait de côte par des cartographies qui seront insérées dans les plans locaux d’urbanisme. Ces cartographies seront réalisées sur la base des données fournies notamment par les observatoires locaux du littoral et d’un guide méthodologique national en cours d’élaboration.
L’obligation d’information acquéreur-locataire (IAL) sera étendue aux zones délimitées par la cartographie locale d’évolution du trait de côte. Ce dispositif sera modifié pour fournir ces informations au moment de la signature de la promesse de vente.
L'évolution du trait de côte doit aussi être prise en compte dans les outils de planification et de prévention des risques. Son recul devra ainsi être signalé dans la note de présentation des PPRL pour que les acteurs locaux prennent cette dimension en considération dans leur politique d’urbanisme. Le cahier des charges des PAPI devra aussi être précisé afin de favoriser une approche intégrée des solutions de réduction de la vulnérabilité des territoires, en intégrant à la fois le recul du trait de côte et le risque de submersion marine.

Adaptation du droit de l'urbanisme

Pour les espaces menacés par le recul du littoral à court terme (30 ans), l'Etat s'engage à interdire toute nouvelle construction. Au-delà de 30 ans, le droit de l'urbanisme sera adapté pour permettre de mettre en œuvre des constructions démontables. Concrètement, un permis non pérenne autoriserait de nouvelles constructions, à condition que celles-ci soient démontées au terme d’un délai fixé au préalable.
Pour les biens déjà exposés, des projets de relocation pourraient être élaborés en s'appuyant sur le contrat de projet partenarial d’aménagement (PPA). Ce nouvel outil de la loi Elan fixe un cadre réglementaire adapté pour le cofinancement des projets par l’État et facilite la mise en compatibilité des documents d’urbanisme, soutient ainsi le ministère.
L'Etat compte enfin promouvoir des solutions fondées sur la nature. Un appel à projets doté de 1 million d’euros a été lancé en juillet dernier pour promouvoir le rôle des écosystèmes naturels dans l’adaptation et l’amélioration de la résilience des territoires littoraux exposés aux évolutions du littoral et dans la lutte contre leur artificialisation. 9 lauréats ont été sélectionnés (voir la liste ci-dessous). 7 projets seront financés en 2020 et 2 projets partenaires bénéficieront aussi d'une valorisation. Localisés en métropole et outre-mer, ils sont situés sur des territoires très contrastés (naturels, urbanisés), où sont présents une grande variété d’écosystèmes naturels (dunes, cordons de galets, marais arrières littoraux, mangroves) et sont portés par un large panel d’intervenants (collectivités territoriales, établissements publics, entreprises privées).

Les 9 lauréats de l’appel à projets "Des solutions fondées sur la nature pour des littoraux résilients"

  • Adaptation du site de Fréval, Normandie
  • Travaux de restauration du cordon dunaire de la commune de Leucate, Occitanie
  • Démolition de bâtiments exposés à l’aléa érosion marine et renaturation des milieux dunaires, Centre de vacances de la SNCF, Soulac-sur-mer, Nouvelle Aquitaine
  • Réhabilitation d’une portion de plage de sables basaltiques sur le secteur de Cambaie, commune de Saint-Paul, La Réunion
  • Restauration d’un cordon littoral et adaptation des aménagements existants - site de Lessunus Plozevet, Bretagne
  • Interface entre mer et mangrove, renaturation du litto¬ral de Port-Louis nord en forêt domaniale du littoral, Guadeloupe
  • Restauration douce du cordon dunaire des Baronnets
  • Projet territorial de la Saâne, Normandie
  • Exemples de la stratégie locale de gestion de la bande côtière (SLGBC) de Biscarrosse et du programme de requalification de l’Espace Naturel Sensible (ENS) d’Erretegia à Bidart, Nouvelle Aquitaine
 

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