Industrie - Pour Olivier Bouba-Olga, les relocalisations ne pèsent rien ou pas grand-chose !
Localtis : Quel est le poids des phénomènes de délocalisations et de relocalisations ?
Olivier Bouba-Olga, chercheur en sciences sociales : Les délocalisations existent et elles peuvent faire très mal sur certains territoires mais cela pèse beaucoup moins que ce que l'on imagine : 0,3% de l'emploi industriel en 2011. Et même si on intègre les conséquences sur l'emploi pour les entreprises sous-traitantes, ce qu'a fait l'Insee dans une étude datant de 2005, cela représente peu. Quant aux relocalisations, elles représentent encore moins : 0,3% seulement des opérations d'investissement et de désinvestissement réalisées en France et 0,1% des emplois créés entre 2009 et 2012, c'est rien ! Le potentiel de création d'emplois est ailleurs.
Quelles sont les pistes pour créer de l'emploi ?
Il y a deux axes principaux. D'abord l'innovation. Il faut être bien inséré dans la chaîne de valeur mondiale, ce qui signifie être spécialisé dans des créneaux différenciés et innovants. Il y a un enjeu fort autour de l'innovation. Or, actuellement, on a un discours monolithique sur l'innovation technologique alors que l'enjeu, notamment dans les plus petites entreprises, porte sur l'innovation non technologique (marketing, organisationnelle…). Le deuxième axe concerne la formation des personnes. C'est essentiel. Dans ce domaine, le contrat de génération est assez séduisant car dans certains territoires, les salariés qui partent à la retraite ont de vraies compétences et les entreprises ne s'en rendent pas compte. Avec ces contrats, le transfert de leurs compétences vers des jeunes peut se faire. Après il faut voir les effets de ce contrat au niveau macro-économique…
Et quelle est votre analyse des emplois d'avenir ?
Je n'ai pas analysé quels effets ils avaient mais je pense qu'on met trop l'accent sur les jeunes. Le problème n'est pas la question des jeunes mais la question de la qualification et du niveau de formation. C'est sur les personnes qui n'ont pas de qualification qu'il faut mettre le paquet, avec les questions périphériques de mobilité, de logement, etc. plus que sur les jeunes. Mais dans ce domaine, rien n'est organisé. Il y a des interventions très cloisonnées.
Faut-il que l'Etat intervienne davantage ?
Il faut surtout favoriser l'émergence d'initiatives intéressantes. Il faut laisser les gens prendre des risques. Pour le reste, opter pour un Etat stratège ou pour une vision plus libérale, cela relève d'un choix politique. C'est aux politiques de faire des propositions.
Propos recueillis par Emilie Zapalski