Tourisme - Pour le Conseil national du tourisme, "c'est à l'Etat d'insuffler et de coordonner la politique touristique française"
"La France est la première destination mondiale touristique, mais la troisième en termes de recettes", observe le Conseil national du tourisme (CNT), dans un rapport intitulé "Optimiser les retombées économiques du tourisme de la France" où il formule neuf propositions "pouvant être appliquées à court terme et ne nécessitant pas de lourds investissements" (voir encadré ci-dessous).
"L'Etat (est) seul capable en un court laps de temps d'insuffler l'élan nécessaire", estiment la section de l'économie touristique du CNT, instance de concertation de l'Etat avec les acteurs du tourisme (ses 200 membres viennent du monde institutionnel et privé, économique et social) dépendant du ministère du Redressement productif. Ils regrettent que les relations publiques/privées soient "encore tendues" du fait, selon eux, d'un "manque d'implication des professionnels dans l'élaboration et la mise en place des politiques touristiques" concernant la promotion et la commercialisation. "Les professionnels se sentent délaissés, voire mis de côté", rapporte le CNT en proposant de clarifier la répartition des rôles en s'inspirant du modèle espagnol : "Cette organisation fait penser à une mêlée de rugby où l'Etat espagnol est en première ligne pour la promotion et l'image, et passe ensuite la balle aux trois-quarts, que sont les acteurs privés touristiques pour la commercialisation et la vente."
Des "postes-relais" pour appliquer "la politique émanant du ministre"
Au niveau territorial, "même si les régions, du fait de la décentralisation, ont énormément de pouvoirs, c'est à l'Etat cependant d'insuffler et de coordonner la politique touristique française", insistent-ils. Ainsi, dans la proposition 8 sur le thème de la gouvernance, le CNT suggère de mettre en place des "postes-relais" au niveau des régions, sur la base du volontariat. Leur objet serait d'"assurer l'efficacité et la cohérence de la politique tourisme émanant du ministre et renforcer la destination France", et "favoriser le renforcement de partenariats privilégiés Etat-région". En appui d'Atout France, ils pourraient également "avoir un rôle de conseil, d'assistance et de facilitateur aux conseils régionaux et conseils généraux ainsi qu'à leurs comités régionaux du tourisme et comités départementaux du tourisme". "Une telle initiative permettrait de dynamiser l'ensemble d'un département, d'une région, voire de plusieurs régions pour favoriser des actions communes en cohérence et en appui avec la politique nationale touristique."
Ces postes-relais permettraient également de contrer le "millefeuille touristique", dont chaque couche a des intérêts "parfois divergents, voire contradictoires, chacun travaillant dans son coin, entraînant une complexité opérationnelle".
"Abandonnons notre complexe de supériorité"
Mais n'oublions pas l'objet du rapport qui est de faire "dépenser plus" les touristes. Pour cela, "sortons un peu de notre 'exception', de notre 'suffisance' et de nos 'bonnes manières' (…). La promotion et la communication se doivent de bousculer aujourd'hui la 'bienséance' (…). Abandonnons notre complexe de supériorité", appelle le CNT en usant du guillemet.
Il suggère quelques gadgets, auxquels sont appelés à participer les collectivités et leurs satellites : distribuer à chaque grand péage un dépliant intitulé "100/Sans Rendez-vous en France" listant cent mini circuits de deux ou trois heures, parallèles au tracé de l'autoroute, et qui serait réalisé avec "la participation des CDT, CRT, agences de voyages, parcs de loisirs..."
Il propose également d'installer des "markets by rendez-vous en France", structures légères du style "étals de marché", sur les principales aires de repos d'autoroute, des gares et des aéroports, qui proposeraient une série d'objets "typiques et standard" des régions de France.
Une émission télévisée du type "la Nouvelle Star"
Estimant que le "patrimoine vivant" est vendeur, le CNT suggère de lancer une campagne de communication à partir des visuels de personnes représentatives de ce "patrimoine vivant" et d'ouvrit un site internet les présentant. Et de lister : "apiculteur, vigneron, cuisinier, artiste, botaniste, moniteur de parapente, artisan, hébergeur, pêcheur, 'greeteur' [NDLR : bénévoles qui accueillent gratuitement des touristes pour leur faire visiter leur ville ou leur région], organisateur de nuits à la belle étoile, ostréiculteur invitant à découvrir son métier de tradition, etc." Ils envisagent même une émission télévisée "du style la Nouvelle Star (Sic)" intitulée les "Greeteurs ambassadeurs de France".
Ce n'est pas fini, le CNT imagine "un grand défilé des troupes folkloriques des régions françaises après le défilé du 14 juillet ou le jour de l'arrivée du Tour de France" ou encore des "mini villages éphémères du patrimoine touristique vivant" installés à Paris durant les Journées du patrimoine. Ces villages s'installeraient "dans un endroit symbolique et touristique de la capitale" comme les "berges de la Seine sous la Tour Eiffel, jardins du Luxembourg en collaboration avec le Sénat, Musée des arts et métiers…" Et pourquoi pas à la Porte Dorée ? L'ancien musée des colonies constituerait en ce sens un lieu hautement symbolique.
Valérie Liquet
Les neuf propositions du CNT pour améliorer les recettes touristiques
1 - Reconnaître l'économie touristique en répondant à l'un des soucis majeurs du gouvernement et des Français : l'emploi.
2 - Inciter les presque 10 millions de touristes traversant la France à dépenser plus.
3 - Renforcer la charte "Qualité de l'accueil en France, une ambition partagée" : "65 millions de Français accueillent 80 millions de touristes".
4 - Modifier la perception que les étrangers ont des Français en valorisant notre "patrimoine vivant".
5 - Montrer l'attractivité et le dynamisme de notre industrie touristique grâce à une politique événementielle imaginative et structurée.
6 - Associer les Français comme relais de communication et d'information touristique : "Nos meilleurs webmasters : 65 millions de Français".
7 - Être un acteur présent dans la normalisation pour peser sur les travaux en cours et défendre les intérêts français dans les instances internationales.
8 - Organiser et coordonner au niveau de la gouvernance la richesse de notre diversité, tout en reconnaissant le caractère exportateur de l'industrie touristique.
9 - Mieux exploiter les compétences et appréhender les missions du CNT.