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PLF 2021 : à l'Assemblée nationale, festival d'amendements sur les finances locales

L'Assemblée nationale a achevé dans la soirée du 13 novembre l'examen en première lecture de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2021 par la discussion des dispositions de la mission Relations avec les collectivités territoriales et les mesures dites non rattachées. À la clé : l'adoption de très nombreuses mesures concernant les finances et la fiscalité locales, dont certaines n'ont rien d'anecdotique. Recentrage de la dotation d'équipement des territoires ruraux, institution d'un mécanisme de péréquation des ressources régionales, aide aux départements, financement du Grand Paris, expérimentation du compte financier unique… Localtis fait le point sur l'ensemble de ces dispositions. Le vote des députés sur l'ensemble de ce projet de loi de finances aura lieu ce 17 novembre.

DOTATION D'ÉQUIPEMENT DES TERRITOIRES RURAUX. L'attribution de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) est recentrée sur les zones vraiment rurales. L'amendement présenté par Christine Pires Beaune (PS) met en œuvre une des propositions de la mission d'information sur la répartition de la DETR, installée par la commission des finances de l'Assemblée nationale et dont la députée est la rapporteure (voir notre article du 28 octobre 2020). Concrètement, la population des EPCI éligibles à la DETR dans un département ne servira plus au calcul du montant de l'enveloppe allouée à ce département. À la place, il sera fait usage de la population des seules communes rurales situées dans les EPCI éligibles. Par ailleurs, les évolutions annuelles des enveloppes de DETR attribuées à chaque département seront plus fortement encadrées : elles ne pourront dépasser plus ou moins 3% (au lieu de 5% aujourd'hui). À l'occasion de la discussion de l'amendement, le gouvernement a indiqué, par la voix du secrétaire d'État chargé de la ruralité, qu'il prendra des mesures réglementaires allant dans le sens souhaité par les députés. "Nous allons faire en sorte que lorsqu’un EPCI recouvre à la fois un territoire rural et un territoire urbain, la DETR soit bien fléchée vers le territoire rural", a déclaré Joël Giraud. De même, une commune nouvelle ne pourra plus toucher la DETR seulement parce qu'une de ses communes historiques était rurale. "Seule la fraction de DETR revenant à l’ancienne commune rurale sera versée", a précisé M. Giraud.

PÉRÉQUATION DES RECETTES RÉGIONALES. Un amendement du rapporteur de la mission Relations avec les collectivités territoriales, Jean-René Cazeneuve, institue à partir de 2022 un nouveau fonds de péréquation des ressources régionales. Il s'agit de traduire dans la loi une des mesures de l'accord de partenariat que les régions et l'État ont signé le 28 septembre. Sur la base de critères de ressources et de charges, le mécanisme de solidarité financière redistribuera, en 2022, 1% des recettes réelles de fonctionnement perçues par les régions dans leurs budgets principaux. L'État et les régions définiront l'an prochain les modalités du dispositif, ainsi que les objectifs en termes de redistribution. Ces précisions figureront dans le projet de loi de finances pour 2022.

FONDS DE STABILISATION POUR LES DÉPARTEMENTS. Doté de 200 millions d'euros, le fonds de stabilisation est reconduit en 2021. Une cinquantaine de départements bénéficieront de ce dispositif, qui a vocation notamment à les aider à financer la hausse des dépenses liées au RSA. Ses modalités ont été fixées en concertation avec l'Assemblée des départements de France (ADF), a souligné l'auteur de l'amendement, Jean-René Cazeneuve. Le quatrième projet de loi de finances rectificative pour 2020, qui est en cours d'examen, instaure ce fonds pour l'année 2020 (voir notre article du 6 octobre 2020). Sur la période 2017-2019, le dispositif s'était élevé en moyenne à 115 millions d'euros par an.

EXPÉRIMENTATION DU COMPTE FINANCIER UNIQUE. Du fait de la crise sanitaire, l'expérimentation du compte financier unique (CFU) débutera avec un an de retard, soit à partir de l'exercice 2021. "Le premier appel à candidatures lancé en 2019 a mobilisé plus de 500 collectivités", indique le gouvernement dans l'exposé des motifs de son amendement. Il prévoit aussi d'ouvrir l'expérimentation à de nouvelles collectivités et de nouveaux EPCI, ainsi qu'aux services d’incendie et de secours. Les nouvelles candidatures devront parvenir avant le 1er juillet 2021, pour une participation à l'expérimentation qui débutera dès l’exercice 2022. Pour rappel, le CFU se substitue au compte administratif et au compte de gestion.

PRÉLÈVEMENT SUR LES RECETTES DE CERTAINS EPCI. Un amendement du gouvernement répond à une récente décision du Conseil constitutionnel, qui censure la reconduction année après année, à un montant fixe, d'un prélèvement sur les recettes fiscales de certaines intercommunalités à fiscalité propre (voir notre article du 16 octobre 2020). Ce prélèvement, qui correspond à la baisse des dotations décidée entre 2014 et 2017, s'impute sur leurs recettes fiscales, parce que leurs recettes de dotation d'intercommunalité sont trop faibles. 136 EPCI à fiscalité propre sont ainsi concernés. Avec l'amendement, les prélèvements opérés pourront être réduits si les recettes réelles de fonctionnement par habitant de l'intercommunalité diminuent, par rapport à celles de l’exercice 2015, et ce au-delà d’un pourcentage (qui sera fixé par un futur décret).

FINANCEMENT DU GRAND PARIS. Le schéma provisoire de financement du Grand Paris - qui avait été mis en place par la loi Notr d'août 2015 – est prolongé pour deux années supplémentaires (2021 et 2022). On retiendra ainsi notamment, que les recettes de cotisation foncière des entreprises (CFE) qui, en 2021, devaient être transférées à la métropole, resteront donc encore perçues par les établissements publics territoriaux (EPT). Toutefois, du fait de la crise qui affectera lourdement l'an prochain les recettes de cotisation de la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) perçues par la métropole, les EPT reverseront à celle-ci, en 2021, la croissance de la CFE entre 2020 et 2021.

RÉVISION DES VALEURS LOCATIVES DES LOCAUX PROFESSIONNELS. La mise à jour, tous les six ans, des valeurs locatives des locaux professionnels, qui a été voulue par le législateur avant l'entrée en vigueur en 2017 de cette réforme, est clarifiée. Des précisions sur la méthode de l'actualisation seront apportées par décret.

REVITALISATION COMMERCIALE. La possibilité pour les communes et EPCI de voter des exonérations fiscales (CFE, CVAE) dans les zones de revitalisation des centres-villes (ZRCV) et les zones de revitalisation des commerces en milieu rural (ZoRCoMiR), est prolongée de deux mois (du 1er octobre au 1er décembre 2020). La loi de finances pour 2020 a créé ces dispositifs fiscaux pour soutenir les activités commerciales et artisanales dans les centres-villes des villes moyennes et en milieu rural.

TEOM INCITATIVE. Les communes et les EPCI pourront instituer pendant sept ans (au lieu de cinq aujourd'hui) la part incitative de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (Teom) dans une partie de leur territoire. Le gouvernement a donné son aval à la mesure.

VERSEMENT MOBILITÉ. L'exonération en matière de versement mobilité, dont bénéficient les associations intermédiaires employant 11 salariés et plus, du secteur de l'insertion par l'activité économique, est sécurisée juridiquement.

TAXE FUNÉRAIRE. Poursuivant cette année la chasse aux petites taxes dont la gestion est coûteuse, le rapporteur général du budget, Laurent Saint-Martin (LREM), a obtenu la suppression de la taxe funéraire, qui s'applique aux services d’inhumation et de crémation. D'après la Cour des comptes, quelque 400 communes prélèvent cette taxe, qui leur rapporte un peu moins de 6 millions d'euros.

GRANDS PORTS. Une méthode de détermination de la valeur locative des quais portuaires et des terre-pleins des grands ports maritimes est instituée. Elle s'appliquera aux impositions dues à compter de 2024.

RECOUVREMENT FORCÉ DES CRÉANCES PUBLIQUES. Les députés ont rétabli dans cette seconde partie du PLF les dispositions sur le recouvrement forcé des créances publiques, qui avaient été placées par erreur en première partie du projet de loi (article 19) et avaient donc été supprimées lors de l'examen de cette première partie. Pour rappel, la mesure vise notamment à simplifier les délais de prescription de l'action en recouvrement forcé, à étendre la mise en demeure de payer à toutes les créances publiques et à unifier les règles d'imputation d'un paiement partiel sur une créance publique unique.

TAXE DE SÉJOUR. Les modalités de la taxe de séjour devraient encore évoluer l'an prochain. Les députés ont voté la possibilité d'augmenter la taxe réglée pour les nuitées dans les meublés touristiques de type Airbnb. Ils ont aussi avancé du 1er octobre au 1er juillet la date limite de délibération des EPCI et des communes. Enfin, pour tenir compte des effets de la crise sanitaire sur la fréquentation touristique, il a été décidé de relever de 50% à 80% la possibilité d'exonérer les hébergeurs (pour les collectivités ayant choisi la taxe de séjour forfaitaire). Pour le détail de ces amendements, voir notre article de ce jour.

 

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