Pierre Goguet, président de CCI France : "La cure d'amaigrissement doit s'arrêter en 2020"
CCI France demande une pause dans les baisses budgétaires que les CCI subissent depuis plusieurs années. Une phase qui leur permettrait de tester leur nouveau modèle économique issu de la loi Pacte, mixant des missions gratuites financées par la taxe pour frais de chambres et des prestations payantes.
"La cure d'amaigrissement doit s'arrêter en 2020, car au-delà ce serait contreproductif." La demande de Pierre Goguet, président de CCI France, exprimée à Localtis au lendemain de son assemblée générale du 28 janvier, est claire : les baisses de ressources sur les chambres de commerce et d'industrie doivent s'arrêter pour quelques années, histoire de laisser le temps à ces structures de récupérer après une phase de transformation très intense. "Entre 2014 et 2019, notre ressource globale a baissé de 60%, détaille Pierre Goguet, et les CCI vivent une véritable métamorphose, puisque la demande du ministre de l'Économie et des Finances est de faire des chambres des prestataires de services qui facturent leurs interventions."
La loi Pacte du 22 mai 2019 prévoit que les CCI puissent proposer des prestations payantes, au-delà de leurs missions prioritaires financées par la taxe pour frais de chambres. Sans compter les transformations au niveau des ressources humaines, le statut public du personnel étant amené à disparaître. "Nous avons joué le jeu et nous ne nous sommes jamais arrêtés, avec notre présence sur le territoire, le nombre de nos apprentis qui augmente, les conventions signées avec les collectivités territoriales… Nous avons besoin maintenant d'un arrêt des réductions financières pour voir comment fonctionne notre nouveau modèle économique et comment les chambres atteignent leur équilibre financier. Après quoi, nous serons d'accord pour rediscuter de la répartition des ressources."
Les CCI hyper-rurales en difficulté
Dans cette transformation des CCI, celles situées dans les territoires ruraux ou d'outre-mer sont davantage en difficulté, du fait d'une présence entrepreneuriale moins importante et de la prépondérance de très petites entreprises (TPE). Un cri d'alerte avait d'ailleurs été lancé il y a quelques jours par Françoise Cayre, présidente de la CCI de Corrèze. Signalant que sa chambre avait du mal à vendre ses prestations sur un marché très limité, elle avait appelé le gouvernement à débloquer une enveloppe spécifique pour les 17 CCI hyper-rurales. En 2012, plus de 60% du budget annuel de la CCI de Corrèze provenait de la ressource fiscale, soit environ 5,8 millions d'euros. En 2018, la ressource fiscale est tombée à 3,3 millions d'euros et en 2022, elle devrait atteindre 1,5 million d'euros seulement, soit une réduction de l'ordre de 75% en dix ans…
Toutefois, pour Pierre Goguet, le système de péréquation national, prévu dans la loi Pacte et dans le contrat d'objectifs et de performance signé en avril 2019 avec l'Etat, répond à la situation des CCI rurales et d'outre-mer. Ce fonds représente quelques dizaines de millions d'euros pour ces structures. "Globalement, ces CCI ne sont pas en danger mais elles sont amenées à faire la démonstration de leur performance et nous avons bien conscience que c'est plus compliqué pour elles que pour les autres CCI", précise Pierre Goguet.
Pour le président de CCI France, il semble que le gouvernement, incarné sur ce dossier par Bruno Le Maire, ministre de l'Économie, et Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État, a pris conscience que les CCI étaient nécessaires pour conduire les politiques économiques de l'État dans les territoires. La demande de pause de CCI France est en outre appuyée par les organisations patronales, la CPME et le Medef ayant réagi dans ce sens auprès du gouvernement.