Organisation de l'islam de France : Gérard Collomb tient son rapport
Ne pas confondre l’Amif et l’Amif. L’Association des maires d’Île-de-France et l’Association musulmane pour l’islam de France, une nouvelle instance qui pourrait être chargée d’organiser et de financer le culte musulman comme le propose un rapport de l’institut Montaigne publié ce lundi, intitulé "La Fabrique de l’islamisme". L’Amif serait une "organisation neutre, indépendante des pays d'origine, indépendante de ceux qui tiennent aujourd'hui les mosquées". En plein chantier de l’islam de France, le ministre de l’Intérieur, Gérard Collomb, a aussitôt salué "le travail très approfondi" de ce rapport (qui fait plus de 600 pages) "sur les idéologies islamistes, allant de l'islam politique des Frères musulmans au salafisme, et sur leur mode de production et de diffusion". Gérard Collomb "souligne l’inquiétude du gouvernement face au constat dressé par le rapport" sur la radicalisation par internet, alors que "30% des musulmans français sont potentiellement influencés par des contenus salafistes".
Usines de production de l'islamisme
L’auteur du rapport, Hakim El Karoui, ancien conseiller de Jean-Pierre Raffarin et banquier chez Rothschild avant de devenir consultant, n’en est pas à son coup d’essai puisqu’il s’agit de son troisième rapport sur le sujet en deux ans pour l’institut Montaigne (cercle libéral proche du pouvoir) après celui sur l’islam de France en 2016 et un autre en 2017 sur la politique arabe de la France.
Après avoir détaillé par le menu la genèse de l’islamisme (remontant à la campagne d’Égypte de Bonaparte), Hakim El Karoui pénètre au cœur des "usines de production" de l’idéologie islamiste, qu’il prend soin de distinguer de l’islam : les Frères musulmans en Égypte d’abord, puis partout dans le monde arabe, le wahhabisme en Arabie saoudite, le turco-islamisme en Turquie et l’Iran après la révolution islamique de 1979. Des centres de diffusion qui, avec internet, ont trouvé de nouveaux canaux très efficaces. "L’analyse de l’audience sur internet et plus particulièrement sur les réseaux sociaux, nous a permis d’évaluer l’incroyable impact de cette idéologie religieuse", souligne-t-il. Des oulémas saoudiens comptent parmi les intellectuels les plus influents du monde sur les réseaux sociaux, avec des dizaines de millions de "followers", "très très loin devant ceux qui sont aujourd’hui les représentants d’un islam européen soucieux de son insertion en Occident". "Les musulmans sensibles aux thèses islamistes constituent aujourd’hui une minorité importante de la population musulmane en France", s’inquiète-t-il, alors que la France constitue un "laboratoire" pour les islamistes, "car c’est le pays européen qui compte le plus de musulmans". "Les enquêtes montrent en outre que les jeunes musulmans français sont sensibles non seulement aux thèses islamistes, mais aussi qu’ils sont prêts à accepter une certaine forme de violence quand elle est commise au nom de la religion."
Au-delà du discours, "un système économique alternatif est en train d’émerger", analyse le rapporteur, comme "si un petit continent idéologique se formait sous nos yeux", avec ses codes, son organisation, où le halal, apparaît "beaucoup plus qu’une façon d’abattre rituellement un animal mais bien un mode de vie".
Taxe halal
Dans ce contexte, l'Amif serait chargée de gérer une "taxe halal", idée déjà émise dans le rapport des sénateurs Nathalie Goulet et André Reichardt en 2016. Cette redevance s’inspirerait de la redevance rabbinique ou "casherout", perçue par le Consistoire en échange de la certification casher "KBDP" de certains produits.
Hakim El Karoui préconise aussi de "relancer l’apprentissage de la langue arabe", "tant les cours d’arabe sont devenus pour les islamistes le meilleur moyen d’attirer des jeunes dans leurs mosquées et écoles", de "former les cadres et les enseignants à la laïcité qu’ils ne connaissent pas toujours".
Autant d'idées jugées "très intéressantes" par le ministre de l'Intérieur et qui appellent, selon lui, "à un rassemblement et une mobilisation des musulmans républicains en France". Les assises territoriales de l'islam qu'il avait lancées au mois de juin s'achèveront le 15 septembre, elles déboucheront sur des annonces.