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Office français de la biodiversité : l’Assemblée entérine le compromis trouvé en commission mixte paritaire

Les députés ont adopté, mardi 9 juillet, les conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi dédié à l’Office français de la biodiversité - né du rapprochement de l’Agence française pour la biodiversité et de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage -, futur fer de lance de la stratégie nationale de la biodiversité, qui devrait notamment permettre de mutualiser les ressources de police de l’environnement des deux organismes fusionnés. Très débattu, le volet cynégétique du texte n’aura finalement laissé que quelques plumes dans la bataille marquée par l’abandon du délit d’entrave à la chasse.

L’Assemblée a donné son feu vert, ce 9 juillet, à la création dès 2020 d’un nouvel opérateur, baptisé Office français de la biodiversité (OFB), né de la fusion de l’Agence française pour la biodiversité (AFB) et de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS), concrétisant l’ambition formulée en 2016 mais non aboutie faute de consensus dans le camp des chasseurs. Le texte adopté par 42 voix pour et 10 abstentions (sur les bancs du groupe GDR), sans aucun vote contre, devra encore être soumis au Sénat le 16 juillet prochain pour être définitivement adopté. La secrétaire d’État à la Transition écologique, Emmanuelle Wargon, s’est félicitée de la création de cet établissement "souhaitée depuis longtemps", qui rassemblera dans une unité unique "2.700 agents aux compétences complémentaires dans les domaines de l’eau et de la biodiversité (…) pour mener une action plus forte, mieux coordonnée et sur tous les territoires, en métropole comme en outre-mer (…) en particulier dans la mise en œuvre des actions issues du plan Biodiversité et des Assises de l’eau". Tandis que le député Hubert Wulfranc (GDR) exprimait son scepticisme concernant "le sens et le caractère réellement opérationnel dont pourra se prévaloir cette agence dédiée, alors que tant de politiques publiques contrarient ses objectifs", citant les traités de libre-échange "qui fragilisent nos agriculteurs et favorisent le dumping environnemental (…), l’adoption de mesures d’assouplissement de la loi Littoral, le recul du champ de compétences de l’Autorité environnementale ou l’assouplissement des normes environnementales intervenu dans le cadre de la loi Élan". 

Suppression du délit d’entrave à la chasse

L’examen par la chambre haute avait marqué le retour en force du "monde cynégétique" - suivant une certaine logique dans un texte qui inclut une réforme de la chasse - au point de compromettre "l’équilibre général du projet de loi", rappelle la rapporteure Barbara Pompili. La création d’un délit d’entrave sanctionnant plus sévèrement l’obstruction à la pratique de la chasse a en particulier constitué "un chiffon rouge", souligne-t-elle. Les parlementaires réunis en commission mixte paritaire (CMP) ont finalement décidé d’ôter du texte ce point de blocage, au grand dam des Républicains, s’engageant en contrepartie à ce qu'une proposition de loi spécifique soit examinée sur l’ensemble des entraves rurales. D'importants ajouts du Sénat ont néanmoins été conservés sur la gouvernance du futur établissement, le périmètre des aires marines protégées, les critères de reconnaissance des zones humides, les pouvoirs de police administrative et judiciaire des inspecteurs, la sécurité à la chasse, le fichier des permis de chasser ou encore la transposition de la directive "Oiseaux". 

Schéma de financement

Suivant les conclusions de la CMP, l’Assemblée a par ailleurs retenu le principe d’une contribution des fédérations départementales à un fonds géré par la fédération nationale des chasseurs et dont l'utilisation sera déterminée par une convention conclue avec l’OFB (art. 3). Une façon de combler les 41 millions d’euros de dépenses non couvertes, conséquence des arbitrages rendus l’été dernier et marqués par la baisse du permis de chasse à 200 euros. Le texte acte également l’abondement par l’État de dix euros au futur fonds pour la biodiversité quand les fédérations mettront cinq euros d’écocontribution par chasseur ayant validé un permis dans l’année. Le principe de "stabilisation" de la contribution financière des agences de l’eau au budget du nouvel office, voulu par le Sénat, est lui aussi confirmé. 
Sur un autre sujet délicat, celui des dégâts de gibier, le projet de loi prévoit un renforcement des pouvoirs du préfet en matière de plans de chasse, l’interdiction du nourrissage des sangliers et l’incitation financière des chasseurs à mieux réguler le grand gibier. Le texte aborde également la mise en oeuvre de la gestion adaptative des espèces, c’est-à-dire l’ajustement régulier des prélèvements en fonction de l’état de conservation des populations. Pour toutes les espèces concernées, la déclaration des prélèvements par chaque chasseur auprès des fédérations et du nouvel office sera obligatoire. En matière de sécurité de la chasse, un dispositif de rétention et de suspension administrative du permis de chasse en cas de manquement grave aux règles de sécurité est aussi introduit. 

Police de l’environnement

Le périmètre d’intervention du nouvel office - enrichi après son passage devant les chambres notamment par l’ajout de la compensation écologique ou la lutte contre la biopiraterie - doit couvrir le champ d’expertise des deux établissements et en restaurer la dimension territoriale au travers des fameuses agences régionales de la biodiversité. Y est finalement retranchée la mission de contribution à l'exercice de la chasse et de la pêche durable en eau douce, qui relève, selon la rapporteure, "davantage des structures départementales", tout comme le comptage des loups. Le projet de loi prévoit aussi de renforcer les pouvoirs des inspecteurs de l’environnement (art. 2), notamment au moyen de l’extension de leur périmètre géographique d’intervention, de la refonte du régime applicable aux objets saisis, de l’accès au fichier d’immatriculation des véhicules et de la possibilité de contrôler des infractions liées au port d’arme. Ces derniers auront également des pouvoirs d’investigation accrus puisqu'ils pourront désormais recevoir du juge d’instruction des commissions rogatoires. Le texte permet en outre un recours facilité à la vidéosurveillance dans la lutte contre le dépôt sauvage de déchets (2 bis C). En complément, il habilite le maire à intervenir plus rapidement en abaissant d'un mois à dix jours la durée de la période d'échanges contradictoires, précédant la possibilité de mettre en demeure le producteur de déchets concerné. La création d’une réserve civile de l’environnement - insérée au Sénat -, pour laquelle aucune étude d’impact ni expérimentation n’ont été réalisées, indique la rapporteure, n’a en revanche pas été retenue en CMP. 

 

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