Politique de la ville - Négociation des contrats de ville 2014-2020 : les préfets ont reçu la circulaire le 30 juillet
"Je vous demande d'engager sans délai la préparation des contrats de ville", a exigé des préfets, en pleine période estivale, le Premier ministre, dans une circulaire datée du 30 juillet. "Je vous demande de mobiliser les services de l'Etat, les collectivités locales et l'ensemble des services publics, pour fixer avant la fin de l'année 2014 le cadre et les objectifs stratégiques des contrats de ville, qui devront être conclus avec leurs différentes conventions d'application thématiques et territoriales au premier semestre 2015", ajoute-t-il.
Les préfets n'ont pas mandat pour les territoires "en veille active"
Voilà pour le calendrier. Quant aux territoires concernés, la circulaire se contente de rappeler que la liste des 1.300 quartiers prioritaires de métropole vient d'être communiquée, avant de conclure : "la nouvelle géographie prioritaire étant connue, je vous demande d'engager sans délai la préparation des contrats de ville". Elle laisserait ainsi entendre que ne seraient pas concernés les quartiers en "veille active" (ces quartiers autrefois situés dans un zonage "politique de la ville" et qui n'ont pas été retenus dans la fameuse liste des "quartiers prioritaires").
Or la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine du 21 février 2014 (voir notre article "Tout sur la loi Lamy") dit bien que les quartiers en "veille active" peuvent faire l'objet d'un contrat de ville dès lors que le président de l'EPCI et les maires concernés le demandent (article 13). Ce contrat définit alors les moyens mobilisés dans le cadre des politiques de droit commun (sans crédits spécifiques "politique de la ville", donc). Bref, les élus concernés par des quartiers "en veille" doivent eux-mêmes aller toquer à la porte du préfet…
Sur la question du périmètre des contrats de ville, là aussi la circulaire est peu précise, se contentant de rappeler que la politique de la ville "agit au niveau intercommunal". Rappelons donc que l'article 6 de la loi Lamy indique que les contrats de ville sont "élaborés sur les territoires comprenant un ou plusieurs quartiers prioritaires" et que les signataires s'engagent "sur la base d'un projet de territoire coproduit et partagé à l'échelle intercommunale" (art. 1). Et cela à deux exceptions près : en Outre-Mer où les contrats peuvent être conclus à l'échelle communale et dans les métropoles du Grand Paris et d'Aix-Marseille-Provence où le préfet de région peut proposer des périmètres différents (art. 6).
Cohésion sociale
Sur le contenu même des négociations, rien de bien nouveau par rapport à la communication du conseil des ministres du 25 juin dernier (voir notre article "Les trois piliers des contrats de ville posés en conseil des ministres" ).
Pour rappel donc, les contrats de ville repose sur un pilier "cohésion sociale", un pilier "cadre de vie et renouvellement urbain" et un pilier "développement de l'activité économique et de l'emploi". Le premier pilier englobe toutes les questions de petite enfance, d'éducation, de prévention de la délinquance, de la santé, de la culture et du sport. Avec deux "objectifs prioritaires" à afficher : le soutien aux familles monoparentales et la solidarité entre les générations. Il faudra également faire figurer dans ce pilier une "stratégie territoriale d'accès aux droits et aux services, de promotion de la citoyenneté par l'apprentissage du français et de la lutte contre les discriminations". C'est également dans le cadre de la "cohésion sociale" que devra apparaître les "mesures de soutien aux associations de nature à les faire bénéficier du choc de simplification" (voir notre article "La fin de la paperasse pour les associations de quartier ?").
Cadre de vie et renouvellement urbain
Dans le deuxième pilier, intitulé "cadre de vie et renouvellement urbain", on retrouve naturellement les quartiers Anru. Dans un premier temps, seront déterminés les "objectifs de transformation du quartier et de mixité sociale" de ces quartiers (alors même que la liste officielle des 200 quartiers sélectionnés par l'Anru ne sera connue qu'à l'automne) ; et dans un second temps les conventions Anru elles-mêmes quand elles seront signées. La circulaire prend soin de préciser que ces quartiers Anru concernés sont ceux "éligibles au nouveau programme national de renouvellement urbain, que ce soit au titre des projets d'intérêt national ou au titre des projets d'intérêt local".
Pour les quartiers non Anru, il faudra également faire figurer dans ce pilier "cadre de vie et renouvellement urbain" la programmation de nouveaux équipements publics et de nouvelles activités économiques, ou encore la programmation de la "mobilité dans le parc résidentiel" (sic) ainsi que les relations entre la police et la population.
Economie et emploi
Enfin, le troisième pilier, "développement de l'activité économique et de l'emploi", est celui sur lequel pourront être mobilisés des financements de la Caisse des Dépôts, du programme des investissements d'avenir (PIA) ou encore de l'Epareca. Il regroupe les questions des contrats aidés, des aides à l'emploi pour les jeunes issus des quartiers, des présences de Pôle emploi et des missions locales dans les quartiers, du soutien à l'entreprenariat. La circulaire fait comprendre qu'il sera bien vu de développer un dispositif "club jeunes ambition".
Un court paragraphe rappelle que les habitants doivent être associés à l'élaboration des contrats de ville et que les "conseils citoyens" seront créés dans tous les quartiers prioritaires pour "garantir la représentation des habitants dans les instances du contrat de ville". La loi Lamy avait en effet prévu que les représentants du conseil citoyen participent aux instances de pilotage du contrat de ville et que les moyens de son fonctionnement soient définis dans le contrat de ville, ainsi que des actions de formation (art.7).
Héritage du bref passage de Najat Vallaud-Belkacem au ministère chargé de la ville, la circulaire adressée cet été fait référence à la notion de "clause du quartier le plus favorisé" (voir notre article "Najat Vallaud-Belkacem invente la "clause du quartier le plus favorisé""), les contrats de ville devant "assurer un niveau de services publics et de mobilisation des outils de droit commun supérieur à la moyenne". Pas sûr toutefois que le nouveau ministre de la Ville, Patrick Kanner, et sa secrétaire d'Etat, Myriam El Khomri, qui ont désormais la lourde tâche de mener à bien les signatures des contrats de ville pour le premier semestre 2015, reprennent ce curieux concept à leur compte.