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Congrès de l'AMF - Najat Vallaud-Belkacem ouvre grand aux collectivités les portes des écoles

La ministre de l'Education nationale a assuré son "envie de dialogue" avec les collectivités, lors d'un grand débat sur l'école organisé à l'occasion du 97e congrès des maires de France. Pour preuve, elle a su convaincre le Premier ministre de pérenniser le fonds d'amorçage de la réforme des rythmes scolaires. Mais les collectivités ont d'autres attentes. Le dialogue ne fait que commencer. En espérant qu'on n'entende pas trop de portes claquer...

Exit le fonds "d'amorçage" de la réforme des rythmes scolaires. En annonçant sa pérennisation, jeudi 27 novembre, en clôture du 97e congrès des maires, le Premier ministre l'a rebaptisé fonds "de soutien" aux communes sous les applaudissements de la salle. "J’ai observé vos efforts. J’ai dialogué avec votre association. J’ai entendu votre besoin d’être accompagnés par l’Etat dans la durée, pour consolider cette grande réforme", a-t-il expliqué pour justifier les centaines de millions d'euros que l'Etat devra dégager en période de disette budgétaire (pour rappel, le montant du fonds est programmé à 400 millions d'euros pour la rentrée 2015).

Une demande de tous les maires

La veille, durant le débat sur "les maires et les défis de la refondation de l'école", en présence de la ministre de l'Education nationale, les maires n'avaient eu de cesse de réclamer la pérennisation du fonds. Des maires ruraux et des maires urbains, des maires de métropole et des maires ultra-marins (ultra vindicatifs, d'ailleurs), des maires ravis d'organiser les nouvelles activités périscolaires (Nap) et des maires y allant à reculons, des maires intervenants depuis la tribune et des maires prenant la parole depuis la salle… absolument tous avaient demandé la pérennisation. "Il aurait fallu être sourd pour ne pas vous entendre", avait plaisanté Najat Vallaud-Belkacem, annonçant qu’elle souhaitait "travailler avec eux à la pérennisation du fonds" et qu'elle en avait parlé au Premier ministre…

"Je ne vous dirai pas que le périscolaire, ce n'est pas mon affaire"

Une illustration d'une nouvelle relation entre l'Education nationale et les collectivités ? La ministre en a très "envie". "J'ai envie que le dialogue se passe bien entre nous", a-t-elle déclaré d'emblée à une assemblée très nombreuse. "Je ne vous dirai pas que le périscolaire, ce n'est pas mon affaire", a-t-elle ajouté, marquant ainsi sa rupture avec la conception qu'avait exprimée Vincent Peillon lorsqu'il était ministre de l'Education nationale. "Je sais qu'il vous coûte de l'argent" et "je n'ai jamais prétendu que l'on résolvait les problèmes avec les financements par le fonds d'amorçage de l'Etat et les aides de la CAF", a-t-elle ajouté, se distinguant là encore de son prédécesseur.
En revanche, "je vous demande d'y voir un investissement dans l'avenir", a-t-elle souligné, reprenant cette fois le discours fondateur de la réforme des rythmes. Un discours qui d'ailleurs n'est pas contesté par les maires, eux aussi assurant rechercher le "bien-être de l'enfant avant tout".

Un PEDT light ?

Les maires avaient une seconde revendication. Il s'agissait de supprimer le fait que les aides du fonds d'amorçage, acquises pour l'année scolaire 2015-2016, ne soient pas conditionnées à la signature d'un Projet éducatif territorial (PEDT). Un impératif vécu par les maires comme un obstacle mis au travers de la route des communes (à la rentrée 2014, elles n'étaient que 8.300 à disposer d'un PEDT, sur 24.000). La ministre n'aura pas lâché sur cette revendication, jugeant au contraire que l'exercice du PEDT serait l'occasion de mieux sceller cette nouvelle relation entre les collectivités et l'Etat, mais aussi avec les enseignants, les parents d'élèves, les associations… "Je ne veux pas que ce PEDT devienne un exercice contraignant", a-t-elle assuré, invitant les associations de maires à travailler avec ses services à la rédaction d'une circulaire qui illustrerait cette volonté. "Un maximum d'efficacité et de simplification ; un minimum de contraintes", serait ainsi la nouvelle devise des PEDT.
Autrement dit, des PEDT oui, mais allégés.

"Je vous ai apporté des scoubidous"

Les interventions depuis la salle – par définition peu contrôlables – reflétaient bien la diversité de l'accueil dans les communes de la réforme des rythmes scolaires. On a pu écouter toute la palette des positions, de ceux qui y voient une "chance" à ceux qui demandent encore la suppression, en passant par ceux qui "font le job" en demandant qu'on les soutienne davantage.
"Je vous ai apporté des scoubidous", a ainsi ironisé la maire d’une commune rurale qui intervenait - elle aussi - pour réclamer, la pérennisation du fonds d’amorçage. Dans son cas, ce n’est pas pour payer des animateurs puisque la garderie mise en place pour faire face à la réforme des rythmes scolaires n’est assurée que par des bénévoles. "Les enfants font un peu de poterie, du théâtre et… des scoubidous", rapporte-t-elle sans paraître se préoccuper de la "qualité" des activités.
C’est une des nouveautés de cette année. Il y a encore quelques mois, les élus rivalisaient sur le contenu des activités : yoga, zumba, capoeira, initiation au code informatique, à la philosophie ou à la citoyenneté, origami, théâtre, voile, ski, sculpture sur déchets recyclables…, ce n’est désormais plus un sujet.

Un site internet sur les meilleures pratiques

Education nationale et pédagogues se sont relayés pour convaincre les communes que l'on pouvait faire le bien-être de l'enfant sans dépenser trop. Najat Vallaud-Belkacem a d'ailleurs annoncé au congrès l'ouverture prochaine d'un site internet sur les meilleures pratiques en la matière, histoire de valoriser les communes qui les ont initiées et donner des idées aux autres (*). La "ressource locale" y sera probablement mise à l'honneur, d'autant plus si elle est alimentée par les réseaux associatifs et bénévoles (selon la récente enquête Cnaf-AMF, environ la moitié des communes ont recours aux bénévoles). La gratuité permet en outre de s'éviter de remplir les "paperasses" (le terme a été employé par la sénatrice Françoise Cartron) exigées par la CAF pour bénéficier des 54 euros par élève. Une somme que, rappelons-le, la CAF attribue sous certaines conditions, dont le taux d'encadrement et la qualification des animateurs.
Et on assiste alors, d'une part, à un discours sur les bienfaits de toutes ces "petites choses" délivrées par des personnalités locales fortes, qui éveillent les enfants sans coûter à la commune et, d'autre part, l'exigence des CAF sur l'encadrement et la qualification des animateurs inflexibles sur les principes de "qualité" et de "sécurité". Et même si Jeunesse et Sports promet d'assouplir encore ses exigences quand elle donne son feu vert aux subventions CAF, on sent bien qu'un modèle à géométrie variable se dessine. Avec la bénédiction de l'Education nationale. Au nom de la diversité des territoires.

Valérie Liquet

(*) En attendant l'ouverture de ce site, les maires et leurs agents peuvent toujours consulter la banque d'expériences de Mairie-conseils qui propose un bouquet d'expériences sur le thème des rythmes scolaires.
 

 

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