Nature en ville - Murs végétalisés : les plantes à l'assaut des villes
Lors de ses journées techniques en mai dernier, Plante et Cité a présenté les résultats d'une étude réalisée en 2012 sur les murs végétalisés. Objectif : recenser les différents types de murs extérieurs présents en France, leur maintenance et leur coût. Au total, 250 murs ont été dénombrés et 82% ont moins de cinq ans. Les superficies sont majoritairement limitées de 10 à 30 m². La répartition géographique montre une plus forte implantation dans les grandes agglomérations, en particulier la région parisienne (un tiers des murs), Bordeaux et Lyon.
Un écosystème artificiel et fragile
Cinq types de techniques ont été recensés : la nappe continue, les cages métalliques, les modules préformés et les coussins. Autre procédé similaire analysé : les plantes grimpantes avec jardinière. Si la nappe continue est historiquement le premier dispositif arrivé sur le marché (dès 1994), il est aujourd'hui largement devancé par les cages métalliques qui représentent la moitié des installations. La nappe continue est constituée d'un géotextile épais où sont insérés les godets contenant les plantes. Selon l'enquête, elles seraient plus sensibles aux problèmes d'irrigation. Le système de cages métalliques est une armature composée de modules contenant le substrat. Pour l'ensemble des dispositifs, il existe de nombreux fabricants qui ont souvent breveté leur propre système. A noter que le substrat est très souvent constitué de sphaigne du Chili, pas très "culture locale" donc...
La maîtrise de l'irrigation est le point clé des murs végétalisés. L'arrosage est systématiquement réalisé par goutte-à-goutte. Il est généralement associé à un programmateur horaire, géré pour certains automatiquement à distance. L'eau, mélangée à une solution fertilisante, est diffusée par le haut grâce à une pompe de relevage et circule par capillarité. L'alimentation s'effectue très largement à partir du réseau d'eau potable, sans récupération de l'eau de pluie. D'après l'enquête, la moyenne de consommation s'établirait à 650 litres/m²/an, avec de grandes variations allant de 120 à 1.600 l/m²/an. Paradoxalement, les plantes peuvent mourir de sécheresse en hiver, car la purge du système d'irrigation est indispensable pour éviter le gel, sauf pour les nappes continues.
Un coût important en investissement et en entretien
"Ce sont des systèmes très fragiles qui demandent une présence continuelle. En plein été, le mur peut ne pas supporter une journée de coupure d'eau. Le niveau de suivi et de contrôle est donc très élevé", souligne Philippe Faucon du Critt horticole. En moyenne, on estime que 10 à 20% des plantes doivent être remplacées chaque année. "Le choix des végétaux dépend de l'exposition à la pluie, aux courants d'air, etc. Rien n'est jamais acquis", confirme Yannick Even, chef du service espaces verts de Toulouse. Cette ville compte trois murs extérieurs végétalisés : 120 m² en 2006 pour un coût de 43.200 euros, un autre de 350 m² en 2007 pour 215.000 euros, et le dernier en 2008 de 110 m² pour 140.000 euros. Comptant seulement trois variétés de sedum, celui-ci est géré en régie, alors que les autres sont en délégation de service public (DSP).
Le coût moyen d'un mur végétalisé est de 700 euros/m² avec des écarts très importants (de 300 à 1.500 euros/m²). Quant à l'entretien, il faut compter 60 euros/m²/an en moyenne (variations allant de 25 à 180 euros/m²/an), contre 15 euros par m²/an pour un jardin de prestige et seulement 1 euro/m²/an tout espace vert confondu.
Les plantes grimpantes : une alternative plus rustique
Toulouse se tourne maintenant vers les plantes grimpantes. "Les coûts d'investissement et de gestion des murs végétalisés sont très élevés et cette pratique hors sol n'est pas en cohérence avec les politiques de développement durable de la ville", déclare Yannick Even. A Cergy-Pontoise, où le premier mur végétalisé a été installé en 2010 (120 m² pour 100.000 euros), la communauté d'agglomération porte également un projet de plantes grimpantes pour 2014. Leur utilisation est en effet parfois vue comme une alternative plus robuste (moins sensible au risque de gel et au déficit hydrique) et beaucoup moins cher (5 euros/m²).
Pour certains, au contraire, ces murs seraient parés de nombreuses vertus en termes de développement durable. Ils favoriseraient la biodiversité urbaine et réduiraient l'effet "îlot de chaleur". Autre argument : les plantes joueraient un rôle de dépollution de l'air en éliminant les composés organiques volatils (COV). Ainsi à Lyon, un mur de 590 m² combiné à un système de ventilation a été réalisé en 2007 à l'extérieur d'un parking. Dernier atout, ces murs végétaux permettraient d'atténuer le bruit de 10 décibels. Problème pour l'instant, rien n'est vraiment démontré et on manque encore de recul et d'expérience sur ces techniques. Des études complémentaires devraient donc être menées dans les années à venir.