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"Méprisés", les policiers municipaux fourbissent leurs armes

Lassée que leur profession soit "ignorée" des pouvoirs publics, une intersyndicale de policiers municipaux mobilise les troupes. Les agents sont invités à adresser tout l'été leurs revendications par carte postale place Beauvau avant, le cas échéant, de descendre dans la rue en septembre.

S'il prend des vacances cet été, le ministre de l'Intérieur gagnera à faire suivre son courrier, sous peine de voir sa boîte aux lettres exploser. Réunies en intersyndicale, la FA-FPT, la CFDT, l'Unsa et la CGT ont en effet préparé des "cartes postales" que les policiers municipaux sont invités à adresser place Beauvau tout l'été à partir de mercredi 7 juillet, premier jour des vacances scolaires. Pas pour lui souhaiter un bon anniversaire – cela fait un an jour pour jour que Gérald Darmanin est entré en fonction –, mais pour se rappeler à son bon souvenir, et lui remémorer les revendications d'une profession lassée, dit-elle, d'être "méprisée".

Silence assourdissant

"Cela fait un an que nous restons sans le moindre contact avec le ministre de l'Intérieur, qui est totalement inaccessible. C'est du jamais vu", explique Fabien Golfier (FA-FPT). "Pas de son, pas d'image", lui fait écho Serge Haure (CFDT), qui ajoute : "Nous avons également sollicité à de multiples reprises la ministre des Collectivités territoriales Jacqueline Gourault, le président de l'Association des maires de France François Baroin ou encore Christian Estrosi, en sa qualité d'ancien président de la commission consultative des polices municipales (CCPM). À chaque fois, nous recevons une réponse courtoise, mais qui reste sans suite. Tout le monde se renvoie la balle."

"On n'a pourtant pas démérité", avance Jean-Michel Weiss (FA-FPT). "Nous nous sommes mis à la disposition de l'État sans compter, que ce soit pour la gestion de la crise du covid ou en matière de lutte contre le terrorisme. Cette absence de réponse est donc d'autant plus mal vécue par les collègues", avertit-il. "Cela fait des années que l'on empile les compétences – c'est encore le cas avec la loi Sécurité globale –, sans jamais que cela soit pris en compte dans les carrières et les salaires. Quelles perspectives donne-t-on aux policiers municipaux, actuels ou futurs ? Qui va, demain, avoir envie de rejoindre la police municipale dans ces conditions ?", alerte Fabien Golfier.

Où est passée la CCPM ?

La frustration est d'autant plus grande que les raisons de ce silence sont jugées "incompréhensibles". "On ne comprend absolument pas les raisons de ce blocage", confesse Serge Haure. "Même les sujets qui ne se traduisent pas par des dépenses sont ignorés", est-il encore relevé. Fabien Golfier prend l'exemple des brigades cynophiles, qui font l'objet de travaux depuis plusieurs années. "Or nous n'avons même pas été consultés lorsque des dispositions ont été introduites dans la proposition de loi Sécurité globale."

Les policiers soulignent qu'un autre anniversaire sera "célébré" sous peu : celui de la dernière réunion de la commission consultative des polices municipales. "Le 9 juillet 2019. Deux ans déjà, alors qu'elle est tenue de se réunir deux fois par an a minima selon les textes", pointe Jean-Michel Weiss, qui fait valoir que "la Cour des comptes déplorait déjà la lenteur des travaux de cette commission". Dans son rapport d'octobre dernier, les Sages de la rue Cambon estimaient en effet que "la CCPM se réunit trop rarement et ses réunions sont accaparées par des sujets qui relèveraient légitimement d'autres instances" et ce "alors qu'elle est le seul organe de dialogue entre État, maires et représentants syndicaux".

Continuum… de la mobilisation

L'intersyndicale a lancé hier vers la place Beauvau une nouvelle fusée de détresse. "Jamais les policiers municipaux et gardes champêtre n’ont autant été victimes d’agressions physiques ; jamais ils n’ont été autant sollicités", arguent-ils dans un courrier dont copie a également été adressée à la ministre de la Fonction publique et au président de l'AMF. "Les policiers municipaux et gardes champêtres sont des professionnels de la sécurité publique par nature obéissants. Pour autant, ils ne supporteront pas plus longtemps d'être 'foulés au pied' par les décideurs publics", y tonnent-ils, menaçant de descendre dans la rue "si les légitimes revendications ne sont pas entendues".

"Parallèlement à l'envoi des cartes postales, nous allons continuer de sensibiliser parlementaires et élus locaux cet été. Et nous organiserons une semaine de rassemblement sur tout le territoire à la rentrée", précise Fabien Golfier en conférence de presse, qui rappelle que "c'est par la rue qu'en 1998 nous avions sauvegardé notre grade d'emploi". Et d'agiter, avec Serge Haure, l'exemple des sapeurs-pompiers, "qui ont récemment obtenu gain de cause grâce à leur mobilisation". Le concept tant prisé de "continuum" pourrait bien connaître de nouveaux développements...

 

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