À Louviers, un garage social pour réparer sa voiture à moindre coût (27)

« Ce projet de garage social est né il y a un peu plus de cinq ans, d’une réflexion de la communauté d’agglomération Seine-Eure désireuse de mieux répondre aux difficultés de mobilité, qui sont marquées sur le territoire, dans ses dimensions géographiques mais aussi psychologiques », explique Anne Terlez, vice-présidente de la collectivité, en charge des transitions durables - politiques de la ville - habitat. « En 2017, nous avons donc missionné la Fabrique à initiatives, portée par l’Agence de développement régional des entreprises sociales et solidaires, pour travailler sur ces enjeux. La problématique nous semblait vraiment majeure, d’autant que l’agglomération a beau être riche économiquement parlant, les emplois profitent peu à ses habitants - le taux de chômage y avoisine les 16 %. »

De cette étude, est ressortie l’idée de créer un garage solidaire, et très vite, deux acteurs associatifs se sont montrés intéressés pour développer le projet : Ifair (Insertion Formation Animation Individualisée pour Réussir), installée à Louviers, et Solidarauto, qui dispose d’un garage solidaire dans le département de Seine-Maritime voisin, à Sotteville-lès-Rouen. Ifair était déjà l’opérateur principal des actions financées par la communauté d’agglomération pour la mobilité solidaire – garage social pour les deux-roues en self-service, prêt de deux-roues, location de vélos électriques, transport à la demande pour l’accès à l’emploi, et pour besoins de santé, conseils en mobilité, auto-école sociale… Solidarauto pour sa part avait l’expérience et les compétences techniques dans le domaine de la réparation à bas coût.

Projet partenarial

« Ensemble, nous nous sommes lancés en 2019 dans une étude pré-opérationnelle, cofinancée par la communauté d’agglomération, Ifair se positionnant sur le volet accompagnement à la mobilité, et Solidarauto sur le volet vente à bas prix de pièces détachées et réparations », explique Olivier Ettouati, directeur d’Ifair. Des études, finalisées en mai 2021 en raison de la crise Covid, « nous ont permis de trouver de nouveaux locaux, plus grands, 500 m2, de monter le partenariat juridique avec Solidarauto, et de finaliser l’étude de marché et le montage du projet ».

Pour financer le projet, Olivier Ettouati dépose différents dossiers, et obtient des financements dans le cadre de la Politique de la ville, sur de l'investissement, à hauteur de 52 000 euros. Cette somme permet d’aménager les lieux et d’acheter le matériel nécessaire. Un financement France relance, vient participer aux frais de fonctionnement, à hauteur de 60 000 euros par an sur deux ans (2021-2022).

Installé au sein des nouveaux locaux d’Ifair, le garage social a ouvert en septembre 2021. Les sept salariés d’Ifair y interviennent, ainsi qu’un mécanicien détaché par Solidarauto, qui encadre les réparations en libre-service – celles plus complexes étant réalisée en propre par Solidarauto. Le garage propose aussi un accompagnement à l’achat si nécessaire.

Orientation sur prescription sociale

« Si tout le monde peut pousser la porte d’Ifair, l’orientation vers le garage social se fait sur prescription d’un travailleur social. Ifair travaille avec une quarantaine de structures sur le territoire, de Pôle emploi au centre communal d’action social, en passant par les missions locales », explique Olivier Ettouati. En six mois, le garage a accueilli une cinquantaine personnes – 10 demandes sont restées sans suite, 12 concernaient l’achat d’un véhicule, et 29 ont donné lieu à un diagnostic complet, qui a débouché sur quelque 11 réparations classiques et 12 réparations en self-service.

« Cinquante personnes cela peut sembler peu - mais c’est déjà beaucoup, car ce qui fait la particularité de ce lieu, au-delà de la réparation mécanique, ce qui est complexe, c’est tout ce qui se joue derrière en termes d’autonomie, d’émancipation », commentent Olivier Ettouati et Anne Terlez.

« Pour monter ce type de projet, travailler avec un acteur comme Ifair, ancré sur le territoire, connu de ses habitants, est d’ailleurs essentiel », ajoute l’élue. « Le travail de partenariat avec les organismes prescripteurs sociaux l’est tout autant – y compris dans sa dimension travail de fourmis, pour que même les personnes chargées du premier accueil sachent que le garage existe et peut offrir des solutions », ajoute-t-elle.  « La confiance entre élus et acteurs de terrain est aussi déterminante », ajoute Olivier Ettouati, insistant sur « l’écoute, réelle, de la communauté d’agglo ».

Mise en place d’un parc locatif quatre roues, ou de nouveaux ateliers collectifs… pour la suite du projet, Ifair ne manque pas d’idées. Des perspectives qui, comme le fonctionnement quotidien du garage (environ 65 000 euros par an), nécessiteront de trouver de nouvelles sources de financements. La communauté d’agglomération peut-être ? Associée au Département ? À suivre…