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L'organigramme d'une commune est-il classé "secret défense" ?

"Dans quelle mesure il serait possible d'inciter les collectivités locales à publier sur leur site internet l'organigramme de leurs services ?" La question écrite posée par la députée Elisabeth Pochon est loin d'être anodine.

Quelle est la nature juridique d'un organigramme nominatif des services et une commune est-elle tenue de mettre ce document en ligne sur son site internet ? Tel est l'objet de la question écrite posée par Elisabeth Pochon, députée (PS) de la Seine-Saint-Denis. Plus précisément, celle-ci observe que "dans un souci, d'accessibilité au service public et de transparence démocratique, plusieurs de nos concitoyens souhaitent disposer de ces informations". Or, si "l'organigramme des services de l'Etat est souvent renseigné sur les sites internet des administrations concernées [...], sur les sites des collectivités locales (les municipalités et les intercommunalités), l'organigramme des services est rarement publié".

La confidentialité a bon dos

Certaines collectivités se montrent en effet réticentes à mettre en ligne ce document, en avançant des raisons de confidentialité et de protection des agents (ne pas être harcelé par un administré mécontent d'une décision). Echaudées par les mésaventures de la circulaire Fabius dans les années 80 (l'affichage du nom des agents d'accueil sur des cavaliers, jamais appliqué), celles-ci se montrent souvent sensibles à la pression des représentants des agents.
Or, observe la députée de la Seine-Saint-Denis, "les citoyens devraient pouvoir accéder facilement à cette information, notamment pour connaître l'organisation des services afin de trouver plus rapidement le bon interlocuteur ou la répartition des compétences entre les différentes collectivités". Elle souhaite donc savoir "dans quelle mesure il serait possible d'inciter les collectivités locales à publier sur leur site internet l'organigramme de leurs services, et ce de façon accessible, par exemple via un onglet sur la page d'accueil".

Une obligation de mise en ligne à compter du 7 avril 2017

Dans sa réponse, le ministre de l'Aménagement du territoire, de la Ruralité et des Collectivités territoriales commence par rappeler que l'article 6 de la loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique (devenu notamment l'article L.312-1-1 du Code des relations entre le public et l'administration) fait obligation aux communes de plus de 3.500 habitants de publier en ligne les documents disponibles sous une forme électronique.
La réponse ministérielle précise que "sont considérés comme des documents administratifs les documents que les administrations ont produits ou reçus dans le cadre de leur mission de service public [...]". De même, elle rappelle que, dans un avis du 2 avril 2006 (n°20060660, maire de Seclin), la commission d'accès aux documents administratifs a estimé que l'organigramme des services de la commune constitue un document administratif communicable de plein droit à toute personne qui en fait la demande, sous réserve de l'existence préalable de ce document. L'article 8 de la loi pour une République numérique laisse d'ailleurs aux collectivités un délai de six mois à compter de sa promulgation - soit jusqu'au 7 avril 2017 - pour publier sous forme dématérialisée leurs documents communicables disponibles sous forme électronique. Passé ce délai, "il peut être considéré que les collectivités de plus de 3.500 habitants qui possèdent un organigramme sous forme électronique seront soumises à l'obligation de le publier en ligne".

Obligation sur le fond, liberté sur la forme

Une précision toutefois : la loi pour une République numérique ne dit rien de la place à donner à l'organigramme sur le site ("l'onglet sur la page d'accueil" auquel fait allusion la question de la députée). La réponse prend donc soin d'indiquer qu'"en application du principe de libre administration des collectivités territoriales prévu par l'article 72 de la Constitution et dans le silence de la loi, il n'appartient pas à l'Etat d'encadrer les conditions de communication des documents des collectivités. Celles-ci sont libres dans la définition des modalités de mise en œuvre de cette obligation".
Une dernière précision - non reprise dans la réponse ministérielle - pour les agents qui continueraient de regimber à l'idée de la publication d'un organigramme nominatif : l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations prévoit que "toute personne a le droit de connaître le prénom, le nom, la qualité et l'adresse administratives de l'agent chargé d'instruire sa demande ou de traiter l'affaire qui la concerne ; ces éléments figurent sur les correspondances qui lui sont adressées". Une obligation autrement plus "contraignante" - mais pas toujours respectée - que la simple mise en ligne d'un organigramme nominatif.

 

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