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Finances locales - Lois de finances : tour d'horizon des mesures concernant les collectivités

Les textes financiers de la fin de l'année 2014 (loi de finances pour 2015, seconde loi de finances rectificative pour 2014 et loi de programmation des finances publiques) ont été publiés au Journal officiel le 30 décembre 2014. La veille, le Conseil constitutionnel saisi par l'opposition a rendu ses décisions. Contrairement à l'été dernier avec l'examen de la première loi de finances rectificative pour 2014, les Sages n'ont pas censuré de dispositions majeures de ces lois. Elles mettent en oeuvre l'objectif de réduction de 50 milliards d'euros des dépenses publiques d'ici à fin 2017. Ce dernier devant se traduire par un coup de rabot de 11 milliards d'euros sur les dotations des collectivités. Comme de coutume, la loi de finances et le collectif budgétaire apportent leur lot de modifications concernant les finances et la fiscalité locales. Avec, cette année, quelques mesures d'importance concernant la taxe d'habitation (sur les résidences secondaires), la taxe de séjour, le fonds de péréquation du bloc communal (Fpic) ou encore les nouvelles ressources des départements. Localtis vous propose de passer en revue les dispositions de ces lois concernant les collectivités territoriales.

Loi de finances pour 2015

C'est la mesure qui fait grincer des dents dans les collectivités. La loi de finances pour 2015 (articles 23 et 30) baisse les dotations aux collectivités d'un montant inédit de 3,67 milliards d'euros (contre - 1,5 milliard en 2014). La dotation globale de fonctionnement (DGF) s'élève en 2015 à quelque 36,6 milliards d'euros (- 8,8%). La dotation forfaitaire des régions est minorée de 451 millions d'euros par rapport à 2014, et celle des départements de 1.148 millions d'euros. Quant aux communes et intercommunalités, elles voient leurs dotations reculer de 1.450 millions d'euros (621 millions d'euros en moins pour les intercommunalités).
La baisse des dotations est répartie de la même manière qu'en 2014 (c'est-à-dire, pour le bloc communal : au prorata des recettes réelles de fonctionnement minorées des mises à disposition de personnel et des atténuations de produits). Mais, nouveauté, les recettes réelles de fonctionnement seront minorées des recettes exceptionnelles.
Pour atténuer les risques de chute de l'investissement local, le fonds de compensation pour la valeur ajoutée (FCTVA) est maintenu en dehors de l'enveloppe fermée des concours financiers. Son taux est relevé de 15,761% à 16,404% pour les dépenses réalisées à partir du 1er janvier 2015. Cette mesure représenterait une capacité d'investissement supplémentaire de 250 millions d'euros à l'horizon 2017. Autre bonne nouvelle pour l'investissement local, la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) est abondée de 200 millions d'euros en 2015. On notera par ailleurs que les fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle sont finalement maintenus. La solution des députés qui consistait à les flécher vers une dotation de soutien à l'investissement local n'a pas été retenue.
Au chapitre des dotations, on retiendra que les actuels chefs-lieux de cantons continueront à recevoir la part "bourg-centre" de la dotation de solidarité rurale (DSR), alors que la carte cantonale est profondément remaniée.
Les collectivités les moins favorisées bénéficieront sous réserve d'y être éligibles des dispositifs de péréquation, dont la montée en puissance se poursuit.
Le fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales (Fpic) s'élèvera en effet comme prévu à 780 millions d'euros, l'année prochaine (soit 210 millions de plus qu'en 2014). Les dotations de péréquation verticale vont également progresser avec une hausse de la dotation de solidarité urbaine (DSU) de 180 millions d'euros. La dotation de solidarité rurale (DSR) croîtra elle de 117 millions d'euros.
La revalorisation de 0,9% cette année des valeurs locatives foncières servant de base aux impôts locaux (article 63) apportera des marges de manœuvre supplémentaires à toutes les collectivités.
La réforme de la taxe de séjour est également susceptible de générer, dans une certaine mesure des recettes nouvelles pour les communes touristiques (article 67). Le barème de la taxe est ainsi revu à la hausse. Pour tirer parti des nouveaux plafonds, les collectivités devront délibérer expressément. Le régime des exonérations est simplifié. Le recouvrement et le contrôle de la taxe par les communes et les EPCI qui étaient jusqu'à présent les points noirs de la taxe sont améliorés. Les plateformes de réservation par internet pourront collecter la taxe de séjour pour le compte des propriétaires des logements qui sont loués par leur intermédiaire, avec un reversement annuel à la commune. Ces locations échappaient jusque-là à tout recouvrement. Avant le 1er octobre 2015, le gouvernement remettra au Parlement un rapport examinant les modalités selon lesquelles la taxe de séjour pourrait être recouvrée et contrôlée par l'administration fiscale, pour le compte des collectivités territoriales concernées et à leur demande.

A côté de ces mesures qui auront un réel impact sur les ressources des collectivités, la loi de finances contient de nombreuses mesures techniques d'ajustement des finances et de la fiscalité locales. On retiendra :
- l'actualisation (articles 25 et 26) des montants des ressources de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) servant de support à la c ompensation financière des transferts de compétences aux régions prévus par la loi du 13 août 2004 et l'actualisation des montants des ressources permettant la compensation en matière de revenu de solidarité active (RSA). Le fonds de mobilisation départementale pour l'insertion (FMDI) est reconduit jusqu'en 2017 ;
- l'affectation aux régions d'une fraction de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) pour sa compétence en matière d' apprentissage (article 29) ;
- la suppression de taxes à faible rendement : taxe de trottoirs, taxe "Grenelle 2" participant au financement des transports publics, taxe pour la gestion des eaux pluviales urbaines (article 20) ;
- la suppression de l' impôt sur les spectacles perçu par les communes sur les droits d'entrée aux manifestations sportives (article 21). Ce dernier est remplacé par une TVA au taux de 5,5%. Les communes qui avaient instauré cet impôt seront compensées à hauteur du produit de la taxe de l'année 2013 ;
- l'exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties pour une durée de sept ans au bénéfice des installations et bâtiments de toute nature affectés à la production de biogaz, d'électricité et de chaleur par la méthanisation (article 60). L'exonération de cotisation foncière des entreprises, pour une durée de sept ans, des entreprises ayant une activité de production de ces énergies ;
- l'autorisation donnée aux EPCI dont le périmètre s'est élargi à une ou plusieurs communes et ayant fixé des montants de base minimum de cotisation foncière des entreprises (CFE) entre le 1er janvier 2014 et le 21 janvier 2014, sans prévoir de dispositif de convergence, d'en instaurer un par une délibération prise avant le 21 janvier 2015. Le lissage de l'augmentation de CFE pourra se faire sur une période maximale de cinq ans à compter du 1er janvier 2015 (article 64) ;
- l'abrogation du versement transport interstitiel (VTI) à l'article 68. Défendu par les régions, en quête d'une ressource financière dédiée pour les TER, mais critiqué par les entreprises, ce versement concernant comme son nom l'indique les "interstices" des agglomérations avait été créé l'été dernier lors du passage au Sénat du projet de loi sur la réforme ferroviaire ;
- l'instauration, au profit de la région Ile-de-France, d'une taxe annuelle sur les surfaces de stationnement et d'une taxe additionnelle spéciale annuelle dont le produit doit permettre le financement des investissements en matière de transports en commun (article 77 LFI) ;
- la modification des modalités de répartition dérogatoire du prélèvement et de l'attribution au titre du Fpic entre les communes et l'EPCI et entre les communes entre elles (articles 108 et 109). Ces modifications vont dans le sens d'une souplesse et d'une liberté plus grandes données aux communes et aux EPCI ;
- le renforcement des conditions en matière d'effort fiscal pour l'éligibilité au titre du Fpic (article 110). Bénéficient d'une attribution les ensembles intercommunaux dont l'effort fiscal est supérieur à 0,9 en 2015 et à 1 en 2016 (contre 0,8 en 2014) ;
- le dépôt devant le Parlement, avant le 1er octobre 2015, d'un rapport du gouvernement sur le fonctionnement et l'évolution du Fpic. Ce rapport évaluera "notamment la question de la soutenabilité des prélèvements pour les communes contributrices aux différents dispositifs de péréquation" (article 112) ;
- des ajustements (article 115) apportés au fonctionnement du fonds départemental de péréquation de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) ;
- la pérennisation de la faculté pour les départements de relever de 3,80 % à 4,50 % le taux des droits de mutations à titre onéreux (DMTO) ouverte par l'article 77 de la loi de finances pour 2014 (article 116). Le même article pérennise le fonds de solidarité des départements mis en place par l'article 78 de la même loi ;
- la prolongation jusqu'au 31 décembre 2017, de la possibilité pour les collectivités territoriales et les EPCI de "construire, acquérir ou rénover des bâtiments destinés à être mis à la disposition de l'Etat pour les besoins de la justice, de la police ou de la gendarmerie nationales" (article 119). La même possibilité est accordée aux conseils généraux pour "construire (…), acquérir ou rénover des bâtiments destinés à être mis à la disposition des services départementaux d'incendie et de secours".
L'assouplissement des conditions de création d'une communauté d'agglomération qui aurait permis à six intercommunalités d'accéder à ce statut a été censuré par le Conseil constitutionnel (article 117).


 

LoI DE FINANCES RECTIFICATIVE

La seconde loi de finances rectificative pour 2014 apporte elle aussi quelques marges de manœuvre aux collectivités, mais dans une mesure assez limitée. Dans les zones où le marché de l'immobilier est tendu, les conseils municipaux peuvent majorer de 20% la part communale de cotisation de taxe d'habitation due au titre des résidences secondaires (article 31). Pour cela, ils devront prendre une délibération le 28 février 2015 au plus tard. Certaines personnes bénéficieront de dégrèvements. Il s'agit surtout de favoriser la mise sur le marché de logements dans les zones tendues.

La loi procède par ailleurs à de nombreux ajustements :
- le resserrement du champ géographique de la majoration automatique de la valeur locative utilisée dans le calcul de la taxe foncière sur les propriétés non bâties des terrains constructibles situés en zones tendues, qui doit entrer en vigueur au 1er janvier 2015 (article 31). Le même article limite l'application de la majoration obligatoire de la valeur locative cadastrale utilisée dans le calcul de la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFPNB) dans les zones les plus tendues. Il s'agit ainsi d'exclure les zones rurales situées à la périphérie des zones tendues. Les communes qui ne sont plus concernées par la majoration obligatoire ont jusqu'au 28 février 2015 pour voter une majoration facultative ;
- perception par les régions (article 1), au titre de la compensation financière des primes à l'apprentissage prévue à l'article 40 de la loi du 29 décembre 2013 de finances pour 2014, d'une part supplémentaire du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (32,2 millions d'euros) ;
- perception par les départements et les régions (article 3), sous forme de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) d'une compensation supplémentaire pour les transferts de compétences de l'Etat ;
- une modification (article 32) des règles d' évaluation de la valeur locative des ports de plaisance et une mise en cohérence des dispositions relatives à la valeur locative des établissements industriels. Par ailleurs, l'article acte le report d'un an de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels : les résultats de la révision seront pris en compte pour l'établissement des bases de l'année 2016 - et non 2015. Il procède à une validation législative des évaluations par comparaison de la valeur locative des locaux professionnels. Une décision du Conseil d'Etat de février 2014 ouvrait la porte à de nombreux contentieux ;
- l'autorisation donnée aux collectivités territoriales concernées de voter une exonération de taxe sur le foncier bâti au profit des grands ports maritimes (article 33) ;
- une harmonisation (article 34) à l'échelon intercommunal des règles de reversement ou de prise en charge de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle ( DCRTP) et du fonds national de garantie individuelle des ressources communes et intercommunales ( FNGIR). Par ailleurs, l'article transfère aux EPCI issus de fusion les allocations compensatrices d'exonérations bénéficiant aux EPCI préexistants. Enfin, l'article modifie les modalités de convergence progressive des taux de cotisation foncière des entreprises dans les EPCI concernés par une fusion ou un changement de périmètre ;
- un assouplissement des modalités de révision des attributions de compensation dans le cas d'une modification du périmètre intercommunal (article 34) ;
- une simplification (article 37) des règles de fixation des coefficients multiplicateurs de taxe locale sur la consommation finale d'électricité, en limitant le nombre de valeurs pouvant être choisies par les collectivités territoriales ou par les syndicats intercommunaux exerçant la compétence d'autorités organisatrices de la distribution publique d'électricité ;
- une refonte globale de la fiscalité des 199 casinos (article 39). L'article simplifie la fiscalité sur les casinos et allège la charge fiscale des plus petits en la reportant partiellement sur les casinos les plus prospères ;
- l'instauration d'une exonération de taxe d'aménagement pour les locaux des éleveurs de pigeons (article 43) ;
- un toilettage du droit en vigueur en matière de taxe d'aménagement et de participations d'urbanisme (article 44) ;
- une majoration de 50% de la taxe sur les surfaces commerciales ( Tascom) pour les établissements dont la surface de vente excède 2.500 mètres carrés (article 46). Le produit de cette majoration est affecté au budget de l'Etat et non aux communes et EPCI ;
- la transformation à partir du 1er janvier 2015 des 101 zones franches urbaines ( ZFU) en "territoires entrepreneurs" (article 48). Prolongées jusqu'en 2020, les exonérations d'impôt sur les bénéfices pour les entreprises seront conditionnées à la signature d'un contrat de ville entre l'Etat et les collectivités territoriales. Les commerces de proximité qui s'installeront dans les 1.300 quartiers prioritaires, bénéficieront de l'exonération de leurs impôts locaux (article 49) ;
- la création d'une exonération d'impôts au profit des organisateurs d' événements sportifs internationaux attribués à la France avant fin 2017, ce qui inclut l'Euro 2016 de football mais aussi éventuellement les Jeux olympiques de 2024 (article 51) ;
- le report du 15 mars au 30 avril 2015 de la date limite pour déposer une demande d'aide au titre du fonds de soutien aux collectivités territoriales ayant souscrit des emprunts structurés (article 83) ;
- la suppression du nouveau dispositif d' exonérations de droit du versement transport (VT) pour les associations qui avait été voté dans la première loi de finances rectificative du 8 août 2014 (article 86).

 

LOI DE PROGRAMMATION DES FINANCES PUBLIQUES POUR 2014-2019

- L'article 11 instaure un objectif d'évolution de la dépense publique locale. Cet objectif est déterminé après consultation du comité des finances locales. De nature indicative, il prévoit en 2015 une hausse de 0,5% de la dépense publique locale en valeur, dont 2% pour les dépenses de fonctionnement.
- L'article 30 prévoit que le gouvernement présente chaque année au comité des finances locales, avant le débat d'orientation des finances publiques, un rapport présentant le bilan de l'exécution de l'objectif d'évolution de la dépense publique locale. A compter de 2016, le gouvernement présente, en outre, à ce comité "une décomposition", sur l'ensemble de la période de programmation, de l'objectif pour les EPCI à fiscalité propre et pour chacune des trois catégories de collectivités. Une annexe générale sera jointe au projet de loi de finances de l'année détaillant les attributions individuelles (dotations, attributions au titre de la péréquation, fiscalité transférée) versées aux collectivités territoriales ou, le cas échéant, les prélèvements dont elles font l'objet, au titre de l'année précédente. "Ces données individuelles sont mises à la disposition du public sur internet, dans un document unique, sous une forme susceptible d'être exploitée grâce à des logiciels de traitement de base de données".
- Lorsqu'elles concluent un contrat de partenariat, les collectivités territoriales et leurs établissements publics doivent produire, pour les projets dont l'avis d'appel public à la concurrence a été publié après le 1er janvier 2016, une évaluation préalable et la transmettent aux services de l'Etat (article 34). Ces derniers produisent "un avis sur l'évaluation préalable du projet et une analyse de l'ensemble des conséquences de l'opération sur les finances de la collectivité concernée".

Le texte prévoit de faire passer le déficit public de 4,4% du PIB en 2014 à 0,7% en 2019, en passant par 4,1% l'an prochain, 3,6% en 2016, 2,7% en 2017 et 1,7% en 2018.

Thomas Beurey / Projets publics

Références : loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015; loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014; loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les ‎années 2014 à 2019.‎

 

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