Social - Loi Prostitution : les collectivités associées à la réinsertion des personnes prostituées
Si les débats se sont surtout focalisés sur la pénalisation des clients - à travers le chapitre V consacré à l'"interdiction de l'achat d'un acte sexuel" -, la loi du 13 avril 2016 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées comporte aussi des dispositions importantes sur la réinsertion des personnes concernées. Deux chapitres sont ainsi consacrés à cet aspect, traitant respectivement de la "protection des victimes de la prostitution et [la] création d'un parcours de sortie de la prostitution et d'insertion sociale et professionnelle" et de la "prévention et [l']accompagnement vers les soins des personnes prostituées pour une prise en charge globale".
Une commission pour le suivi du parcours d'insertion
Ces nouveaux dispositifs sont très clairement de la compétence de l'Etat. L'article 5 de la loi (article L.121-9 du code de l'action sociale et des familles) précise ainsi : "Dans chaque département, l'Etat assure la protection des personnes victimes de la prostitution, du proxénétisme ou de la traite des êtres humains et leur fournit l'assistance dont elles ont besoin, notamment en leur procurant un placement dans un des établissements mentionnés à l'article L.345-1."
Cette mission régalienne n'empêche toutefois pas la mise en place d'un partenariat avec les autres acteurs de l'action sociale locale. Le même article prévoit en effet qu'"une instance chargée d'organiser et de coordonner l'action en faveur des victimes de la prostitution, du proxénétisme et de la traite des êtres humains est créée dans chaque département. Elle met en œuvre le présent article. Elle est présidée par le représentant de l'Etat dans le département. Elle est composée de représentants de l'Etat, notamment des services de police et de gendarmerie, de représentants des collectivités territoriales, d'un magistrat, de professionnels de santé et de représentants d'associations".
Les proxénètes mis à contribution
La loi prévoit notamment qu'un parcours de sortie de la prostitution et d'insertion sociale et professionnelle est proposé à toute personne victime de la prostitution, du proxénétisme et de la traite des êtres humains aux fins d'exploitation sexuelle. Ce plan est élaboré et mis en œuvre avec l'accord de la personne concernée. L'engagement dans ce parcours de sortie de la prostitution est décidé par le préfet, après avis de l'instance évoquée plus haut.
Cette instance est également chargée de suivre le parcours de sortie de la prostitution et d'insertion sociale et professionnelle. Elle veille à garantir la sécurité de la personne accompagnée et son accès aux droits. Elle s'assure aussi du respect de ses engagements par la personne accompagnée. Au quotidien, l'accompagnement des personnes en réinsertion est assuré par des associations spécialisées et agréées.
Les différentes aides mobilisées à ce titre sont à la charge de l'Etat. Elles sont financées par les crédits du fonds pour la prévention de la prostitution et l'accompagnement social et professionnel des personnes prostituées, créé par la loi du 13 avril 2016. Les ressources de ce fonds sont de deux types. D'une part, des crédits de l'Etat affectés à ces actions et dont le montant est fixé par la loi de finances. D'autre part, les recettes provenant de la confiscation des biens et produits prévue au 1° de l'article 225-24 du Code pénal (dont les biens saisis aux proxénètes).
A noter : pour les personnes prostituées de nationalité étrangère, la loi instaure différents dispositifs spécifiques, notamment en termes d'autorisation de séjour.
Jean-Noël Escudié / PCA
Références : loi 2016-444 du 13 avril 2016 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées (Journal officiel du 14 avril 2016).