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Simplification du droit - Loi Justice et affaires intérieures : simplifications et transferts de compétences aux collectivités

Publiée au Journal officiel du 17 février, la loi relative à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures procède à un certain nombre de simplifications dont les collectivités territoriales bénéficieront, par exemple en matière funéraire. En outre, sous couvert de simplification, le texte transfère plusieurs compétences techniques des préfets vers les collectivités territoriales ou leurs organismes rattachés. Cela traduit la confiance que l'Etat accorde aux élus locaux plus de trente ans après l'acte 1 de la décentralisation. Mais il est évident que ces mesures décidées sans compensation financière pour les collectivités concernées, traduisent surtout la volonté de l'Etat de réaliser des économies, dans un contexte budgétaire très tendu.

La loi relative à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures est parue au Journal officiel du 17 février. Auparavant, le Conseil constitutionnel avait jugé conforme à la Constitution l'article 8 de la loi, qui autorise le gouvernement à réformer par voie d'ordonnance le livre III du Code civil relatif aux contrats. Cette disposition était le principal point d'achoppement entre les deux assemblées et avait conduit à l'échec de la commission mixte paritaire. Voici le détail des mesures concernant les collectivités.

EPLE
Les établissements publics locaux d'enseignement (EPLE), c'est-à-dire les collèges et les lycées pour l'essentiel, ne seront plus obligés de transmettre au préfet leurs actes budgétaires (article 15). Le représentant de l'Etat continuera toutefois à être l'arbitre des conflits relatifs aux budgets de ces établissements.

CCAS
Les centres communaux d'action sociale (Ccas) n'ont plus à solliciter une autorisation préfectorale pour souscrire un crédit bancaire (article 15). Un avis conforme du conseil municipal demeure toutefois indispensable. Les budgets annuels des Ccas représentent 2,6 milliards d'euros.

Organisation de certaines manifestations locales
- Le maire délivre désormais, à la place du préfet, les autorisations concernant certaines loteries d'objets mobiliers (article 15).
- Les déclarations en vue de l'organisation des manifestations sportives (course à pied ou cycliste par exemple) se déroulant sur la voie publique d'une commune et ne comportant pas la participation de véhicules à moteur devront parvenir au maire de la commune et non plus au préfet (article 15).

Funéraire
- Les obligations de surveillance des opérations funéraires sont allégées (article 15). Elles ne concernent plus que "les opérations de fermeture et de scellement du cercueil lorsqu'il y a crémation". Pour ces opérations, la présence d'un fonctionnaire de police est exigée dans les communes situées en zone de police d'Etat. Ailleurs, les opérations s'effectuent "sous la responsabilité du maire, en présence du garde champêtre ou d'un agent de police municipale délégué par le maire".
Lorsque le corps "est transporté hors de la commune de décès ou de dépôt", les opérations de fermeture et de scellement du cercueil "s'effectuent sous la responsabilité de l'opérateur funéraire, en présence d'un membre de la famille".
- Les opérateurs funéraires devront déposer leurs devis, dans chaque département où ils ont leur siège social ou un établissement secondaire, auprès des communes où ceux-ci sont situés ainsi qu'auprès de celles de plus de 5.000 habitants. Les maires tiendront ces devis à la disposition du public dans le but d'une plus grande transparence des prix du secteur funéraire. Ces dispositions précisent la mise en œuvre d'une obligation déjà en vigueur.

SDIS
Le gouvernement est habilité à prendre par voie d'ordonnance des mesures tendant à transférer des préfets aux services départementaux d'incendie et de secours (Sdis) l'organisation des élections concernant leurs instances représentatives (article 15).

Fonction publique territoriale
- A l'article 15, le gouvernement est habilité par voie d'ordonnance à modifier la loi afin que le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) organise lui-même les élections concernant ses différents organes délibérants (conseils régionaux d'orientation et conseil d'administration).
- Au terme de la même procédure, les centres de gestion (CDG) de la fonction publique territoriale seront responsables des scrutins visant à élire leurs conseils d'administration (article 15). Ces élections relevaient jusqu'à présent de l'autorité préfectorale.
- La Commission nationale de conciliation, créée par la loi du 13 août 2004, est supprimée (article 21). Elle était l'une des pièces du dispositif qui a permis le transfert de certains services de l'Etat vers les collectivités territoriales, dans le cadre de l'"acte 2" de la décentralisation. La commission du même nom, qui a été créée pour le transfert aux départements des ouvriers des parcs et ateliers, est également supprimée. Ces instances n'ont désormais plus lieu d'être.

Administration légale des mineurs et protection juridique des majeurs
- L'article 1er du projet de loi modifie les règles relatives à l'administration légale des mineurs, c'est-à-dire la capacité donnée aux parents titulaires de l'exercice de l'autorité parentale d'administrer et de bénéficier de la jouissance légale des biens de leur enfant mineur. Il allège le contrôle exercé par le juge dans le cadre de l'administration légale dite "sous contrôle judiciaire", applicable lorsqu'un seul parent est titulaire et exerce l'autorité parentale (du fait par exemple du décès de l'autre parent). Le gouvernement est aussi autorisé à modifier par voie d'ordonnance les règles applicables au contrôle des comptes de gestion.
- L'article habilite encore le gouvernement à aménager le droit de la protection des majeurs, par voie d'ordonnance, en prévoyant un nouveau dispositif d'habilitation par justice au bénéfice des membres proches de la famille d'un majeur hors d'état de manifester sa volonté. Ces proches pourront représenter la personne vulnérable ou passer certains actes en son nom, sans qu'il soit besoin de prononcer une mesure de protection judiciaire.
- Tout médecin peut à présent délivrer l'avis médical requis pour disposer du logement d'une personne protégée et des meubles qui s'y trouvent, si l'acte de disposition a pour finalité l'accueil de l'intéressé dans un établissement. Jusqu'à présent, cet avis ne pouvait être donné que par un médecin inscrit sur une liste établie par le procureur de la République.
- La durée initiale maximale des mesures de tutelle est allongée de cinq à dix ans, lorsque l'altération des facultés de la personne vulnérable "n'apparaît manifestement pas susceptible de connaître une amélioration selon les données acquises de la science". En cas de renouvellement, la mesure de tutelle a une durée maximale de vingt ans.
- La nécessité pour le juge ou le conseil de famille, s'il a été constitué, d'arrêter le budget de la mesure de tutelle, est supprimée. Il est désormais prévu que le tuteur arrête le budget et qu'il en tienne informé le juge ou le conseil de famille.

Droit des contrats et des obligations
L'article 8 autorise le gouvernement à réformer par voie d'ordonnance le livre III du Code civil. Sont en particulier concernées les dispositions relatives au droit des contrats, au régime général des obligations et au régime de la preuve des obligations. La réforme consistera principalement à intégrer dans le Code civil les précisions apportées par la jurisprudence depuis 1804, afin d'accroître la sécurité juridique et la lisibilité du droit.

Successions
L'article 4 crée un mode de preuve simplifié pour justifier de la qualité d'héritier dans les successions d'un montant limité. Jusqu'à présent, la preuve de la qualité d'héritier pouvait être apportée soit par un acte de notoriété établi par le notaire (payant), soit, s'agissant des successions d'un montant inférieur à 5.335,72 euros, par un certificat d'hérédité, gratuit et délivré par les maires. Dans 60% des cas, les maires refusaient de délivrer ces certificats, car ils ne disposaient pas des informations nécessaires et ne souhaitaient pas engager leur responsabilité.

Thomas Beurey / Projets publics

Référence : loi n° 2015-177 du 16 février 2015 relative à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures.