Logement : le Pinel a imparfaitement rempli ses objectifs
La niche fiscale Pinel d'aide à l'investissement locatif, vouée à disparaître le 31 décembre 2024, a imparfaitement rempli ses objectifs et contribué partiellement à la construction de logements pour les ménages modestes en zone tendue, selon un rapport d'évaluation de la Cour des comptes rendu public le 5 septembre.
Entré en vigueur en 2014 pour succéder au dispositif Duflot, le dispositif Pinel, du nom de l'ancienne ministre du Logement Sylvia Pinel, permet aux particuliers qui investissent dans des logements neufs ou à rénover de bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu moyennant leur mise en location. Parmi les conditions à remplir : la location en logement collectif à des niveaux de loyers et de ressources du locataire plafonnés, pour une durée minimale de 6 ans, et dans des zones où il est particulièrement difficile de se loger. En sachant que depuis la création du Pinel, "ces conditions ont connu des évolutions concernant la typologie des biens concernés, le zonage ou le taux de réduction fiscale, jusqu’aux annonces d’extinction du dispositif à la fin de l’année 2024", tel que le rappellent les auteurs du rapport que la Cour des comptes vient de consacrer à ce dispositif en fin de vie. En sachant aussi que depuis près de 40 ans, pour l'immobilier, "plus d'une dizaine de dispositifs fiscaux" de ce type se sont succédé, "voire superposés", entraînant une "forme de dépendance des promoteurs-constructeurs". Les derniers gouvernements en date ayant considéré le dispositif Pinel comme coûteux et relativement inefficace, il est désormais prévu de le supprimer.
Le Pinel "ne remplit qu'imparfaitement" son objectif de construction, confirme la Cour des comptes. S'il a certes eu "un réel effet volume" - principalement sur les logements acquis en Vefa - ayant "largement contribué au déclenchement d'opérations immobilières qui n'auraient pu, ou moins rapidement, aboutir", impossible d'en évaluer précisément l'impact faute de données sur le nombre de logements concernés, note-t-elle. Le Pinel attire par ailleurs essentiellement des investisseurs aisés, à la recherche d'un outil de défiscalisation. Ce qui représente un coût global pour les finances publiques d'environ 7,3 milliards d'euros en dix ans.
Les logements loués mesurent en moyenne 57 m2, bénéficient surtout à de jeunes actifs sans enfant et sont assortis de loyers inférieurs aux plafonds requis, à l'exception de 13% d'entre eux. Parmi les inconvénients : les propriétaires bailleurs préfèrent récupérer ou revendre leur bien le jour où ils ne bénéficient plus du dispositif. Les auteurs du rapport en concluent que les logements Pinel "n'ont pas vocation à composer un parc pérenne de logements intermédiaires".
Les résidences Pinel sont, en outre, majoritairement situées en "zones tendues" et non pas en "zones très tendues". Certes, alors qu'ils poussent plutôt à la hausse les prix dans les quartiers peu prisés redevenus attractifs, ces logements jouent à l'inverse un rôle modérateur dans les quartiers en forte tension.
Le rapport relève en outre que le recentrage sur les zones tendues, avec un zonage de niveau communal, ne permet pas de "répondre finement aux besoins locaux de logements intermédiaires" : "Sans connaissance de la décision finale des investisseurs de recourir ou non aux avantages du dispositif Pinel, les collectivités ne peuvent pas identifier si les logements revêtiront in fine un caractère intermédiaire". Ceci, parce qu'"aucun lien n’est établi entre les documents de planification intercommunaux de l’habitat (PLH) et de l’urbanisme (PLUI) et le dispositif Pinel" et parce que "les données relatives aux logements Pinel ne leur sont pas ouvertes".
L'alternative au dispositif désormais envisagée par les pouvoirs publics "consiste à mobiliser les investisseurs institutionnels en lieu et place des particuliers", rappellent les auteurs du rapport. Formulant plusieurs préconisations, ils appellent à assortir tout nouveau dispositif éventuel "d'objectifs évaluables" et à le doter "d'outils de suivi et de procédures de contrôle".
La Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) a de son côté réclamé jeudi le maintien du dispositif Pinel, voire son renforcement. "Un des éléments mis en exergue dans (le) rapport, c'est que le Pinel participe au financement social, qu'il peut être un déclencheur pour les opérations de restructuration urbaine et qu'il répond à une vraie demande", a fait valoir Didier Bellier-Ganière, délégué général de la FPI, lors du point presse trimestriel de cette fédération.