Logement - L'habitat participatif a son réseau de collectivités
Quinze collectivités territoriales ont signé à Grenoble, le 24 novembre, une charte d'orientation en vue de développer l'habitat participatif. Cette initiative doit donner une plus grande visibilité et un relais institutionnel à un mouvement porté à l'origine par des associations et collectifs d'habitants : Mouvement de l'habitat groupé autogéré (MHGA), fondé en 1977 à Nantes par les premiers groupes d'habitat autogérés, devenu au début des années 2000 - après une éclipse dans les années 1990 - Eco Habitat groupé. L'habitat participatif s'inscrit aussi dans le prolongement des réflexions et des réalisations de Le Corbusier dans les années 1950 - notamment autour de ses cités radieuses de Marseille ou de Rezé -, même si les canons architecturaux ont fortement évolué depuis cette époque.
Selon Alain Jund, adjoint chargé de l'urbanisme auprès du maire de Strasbourg - la ville chargée de coordonner le réseau -, "la signature de cette charte est un moment politique. A travers elle, l'habitat participatif entre dans la sphère politique". L'objectif affiché du réseau est de mutualiser les expériences et les savoir-faire entre les villes et les intercommunalités intéressées par cette approche. Pour sa part, la charte invite les collectivités signataires à faire de l'habitat participatif une composante de leurs politiques du logement et du développement urbain, à identifier les freins à l'éclosion des projets et à travailler ensemble à la recherche de solutions opérationnelles. Les premiers signataires de la charte sont les villes de Besançon, Bordeaux, Grenoble, Lille, Montreuil, Paris, Rennes, Saint-Denis et Strasbourg, les communautés urbaines d'Arras, du Grand Lyon et du Grand Toulouse, ainsi que les régions Ile-de-France et Rhône-Alpes.
Même s'il peut difficilement prétendre régler le problème du logement en France, l'habitat participatif se veut une troisième voie entre le logement social et la promotion privée. Le terme recouvre une grande diversité d'approches et de sensibilités : promotion immobilière autogérée par plusieurs familles qui décident de se regrouper (autopromotion), coopératives d'habitants (propriété collective de logements conçus par leurs habitants et gérés de façon participative), habitat groupé (projet d'habitat conçu et géré par plusieurs familles, avec des espaces partagés, parfois en coopération avec un bailleur social)... Ces dernières années, l'habitat participatif a développé de nouvelles thématiques, comme la mixité intergénérationnelle ou le développement durable. Si le mouvement est encore discret en France, il est beaucoup plus présent dans les pays nordiques, aux Pays-Bas, en Suisse et en Allemagne, où les coopératives jouent un rôle significatif dans la production de logements. La France compterait néanmoins environ 200 projets en cours de montage ou de réalisation. Parmi ceux-ci, on peut citer - entre autres - le Grand Portail à Nanterre ou les projets d'écoquartiers du Grand Toulouse (Vidailhan à Balma, la Cartoucherie et la Salade à Toulouse).
Une montée en charge de l'habitat participatif passera toutefois nécessairement par une modification du cadre juridique. La loi Chalandon du 16 juillet 1971 a en effet mis fin à la location coopérative et proposé aux habitants concernés - en particulier ceux des cités radieuses - de devenir locataires au titre du logement social ou d'acquérir leur logement. Pour Jean-Yves Mano, adjoint au maire de Paris en charge du logement, "le développement de l'habitat participatif à l'échelle du pays ne peut reposer sur les seules épaules des bonnes volontés locales. Le cadre législatif et réglementaire doit changer. [...] Il est temps d'ouvrir la voie à une réforme à même de favoriser le développement de ce mouvement."