L'État révise à la baisse les subventions à la fibre, l'Avicca dénonce "un tour de passe-passe"
Comment financer le reste à couvrir avec 140 millions d'euros ? Tout simplement en révisant à la baisse les taux de subvention des prises FTTH… Un "tour de passe-passe" aussitôt dénoncé par l'Avicca. Son président-sénateur mise désormais sur les députés pour voter les 322 millions d'euros de crédits inscrits aux forceps par la Haute Assemblée dans la loi de finances.
Annoncée en octobre 2019, la réouverture du guichet de financement du très haut débit était conditionnée par la remise à plat du cahier des charges définissant les modalités de subvention des prises optiques dans les zones peu denses. Cette nouvelle version a été mise en consultation publique le 3 décembre pour une application dès janvier 2020. "Par cette réouverture, l’État s’engage au côté des collectivités locales pour achever la couverture du territoire par les réseaux de fibre optique jusqu’à l’abonné et garantir le niveau de déploiement de la fibre dans tous les départements" se félicite le communiqué du gouvernement. Avant de préciser que "le financement des projets sera assuré par les sommes non dépensées d’ici à 2022 sur l’enveloppe de 3,3 milliards du PNTHD (1) en arguant des "meilleures conditions économiques" qui permettant aux collectivités de trouver les compléments manquants.
Assiettes et barèmes revus à la baisse
Concrètement, au lieu d'ajuster l'enveloppe des subventions aux besoins recensés par les 27 départements pour achever leur couverture en fibre – de 500 à 600 millions d'euros selon les estimations -, l'État a opté pour une révision à la baisse des critères de financement. "Le gouvernement veut diminuer à la fois l’assiette des dépenses éligibles et les taux de subvention pour les collectivités" fustige le président de l'Avicca Patrick Chaize dans un communiqué de l'association daté du 4 décembre. Dans le détail, l'analyse de l'Avicca relève, entre autres, un financement pour le raccordement de 92% des locaux (et non plus 100%), la suppression des subventions pour la collecte (les "départementales" de la fibre), la fin des financements pour les sites "prioritaires" (entreprises notamment) et les raccordements finaux (les derniers mètres allant jusqu'à l'abonné). Autant de changements qui introduisent une "flagrante rupture d'équité entre territoires", l'association estimant que "changer les barèmes d’aides, c’est tout simplement transférer davantage de charges sur les collectivités qui en ont le plus besoin. Rien d’autre".
Les députés invités à voter l'abondement du guichet
Dénonçant "le semblant de consultation publique" autour d'un "détestable" cahier des charges, l'Avicca mise désormais sur l'Assemblée nationale pour se faire entendre. Peu de temps auparavant, les sénateurs avaient en effet inscrit au projet de loi de finances pour 2020 un abondement du guichet THD à hauteur de 322 millions d’euros. Une somme qui correspond à des "autorisations de programmes, pas à des crédits de paiement" a précisé Patrick Chaize, souhaitant avant tout donner de la visibilité aux territoires et éviter de "bloquer le système". Des sommes jugées inutiles par la ministre Agnès Pannier-Runacher qui s'était bien gardée d'évoquer en séance le contenu du nouveau cahier des charges. Les députés suivront-ils les sénateurs ? Si la couverture totale du territoire en THD fait l'unanimité à l'Assemblée nationale, il n'est pas certain que le contexte social actuel soit favorable aux rallonges budgétaires.
(1) Programme national Très Haut Débit