L'État doit aider le train à hydrogène, selon un rapport parlementaire
Un rapport parlementaire sur "le verdissement du parc ferroviaire" remis ce 22 novembre à la ministre des Transports, Élisabeth Borne, propose à l'Etat d'aider le développement de la filière hydrogène, une solution préconisée parallèlement à l'usage de batteries pour remplacer progressivement les trains diesel. Les premiers TER à hydrogène pourraient être expérimentés en 2022.
Si le transport ferroviaire n'est pas particulièrement polluant, d'autant que 80% des déplacements se font sur des lignes électrifiées, il "ne peut se tenir à l'écart de la nécessité de s'inscrire dans la neutralité carbone (...) de l'économie française en 2050", relève un rapport du député Benoît Simian (LaREM, Gironde) remis ce 22 novembre à la ministre des Transports, Elisabeth Borne. Les électrifications des lignes étant "très coûteuses", il s'agit de trouver un autre mode de traction pour remplacer le petit millier de trains régionaux roulant au diesel en France, dont la moitié va devoir être renouvelée dans une dizaine d'années. "On ne peut pas demander à nos concitoyens de sortir du diesel et continuer à faire circuler des trains diesel sur nos dessertes fines du territoire" (les petites lignes), a relevé Benoît Simian, ancien cadre à la SNCF en rendant son rapport à Elisabeth Borne.
Des trains garantis à "zéro émission"
Après avoir passé en revue différentes options, il conseille de "se concentrer sur deux technologies : à court terme celle des batteries (engins hybrides ou non), et à plus long terme celle de l'hydrogène". Les solutions avec des batteries "répondront à une partie des besoins en France, à l'occasion notamment des différentes étapes de renouvellement du parc diesel". Elles sont déjà "disponibles sur le marché sans qu'il soit nécessaire que l'État soutienne financièrement des expérimentations ou des déploiements", juge-t-il. "C'est pourquoi il est proposé que l'État se concentre (...) sur l'hydrogène" qui, en outre, permet une plus grande autonomie, note Benoît Simian, dont la lettre de mission portait justement sur l'avenir de ce combustible dans le ferroviaire. "Il faut vite arrêter les conditions qui permettront des premières circulations de trains à l'hydrogène avant 2022", souligne-t-il. L'ancien ministre de la Transition écologique, Nicolas Hulot, avait fixé en juin l'objectif d'aboutir à l'homologation d'un train à hydrogène avant la fin du quinquennat. Garantis "à zéro émission", les trains à hydrogène émettent uniquement de la vapeur d'eau et de l'eau condensée.
Utilisation dans les zones urbaines et écologiquement sensibles
Alors que le constructeur ferroviaire national Alstom planche désormais sur une version française du train à hydrogène qu'il a commencé à faire rouler en Allemagne en septembre, le rapport du député pointe l'absence de texte réglementaire. Il insiste aussi pour lancer la filière sur la nécessaire mutualisation des sources d'énergie entre plusieurs modes de transport, trains, bus ou taxis, et pense qu'il faut d'abord utiliser ces trains dans les zones urbaines et à travers les espaces écologiquement les plus sensibles. Parmi les liaisons proposées par les régions, le rapport cite Lyon-Clermont, Clermont-Le Puy, Rennes-Châteaubriant, Tours-Loches, Tours-Chinon, Paris-Troyes-Belfort-Mulhouse, Fécamp-Le Havre, Bordeaux-Bergerac-Sarlat, Bordeaux-Périgueux-Limoges ou Marseille-Aix.
Pour le choix du combustible, Benoît Simian se demande si l'on peut utiliser de l'hydrogène gris (issu d'énergies fossiles, dont la production reste polluante) avant de passer à l'hydrogène vert (issu d'énergies renouvelables - par électrolyse de l'eau - vraiment propre mais nettement plus cher), pour lequel la France n'est pas prête. "Il faut s'inspirer de ce que font les Allemands, qui aujourd'hui sont sur de l'hydrogène gris", d'autant que quelque 600 sites industriels qui peuvent en fournir ont été recensés, a relevé le député. "Mme Borne est d'accord", a-t-il ajouté.
"Capter" des fonds prévus pour l'électrification dans les contrats de plan Etat-régions
Côté financement, Benoît Simian préconise notamment de "capter" des fonds prévus pour l'électrification de certaines voies ferrées dans les contrats de plan Etat-régions afin de les réaffecter au développement des trains à hydrogène. Et de citer les 45 millions d'euros prévus pour rénover l'alimentation électrique de la ligne Bordeaux-Le Verdon, chez lui en Gironde, avec lesquels on pourrait payer 5 à 6 trains à hydrogène et les stations d'alimentation. Il cite aussi des crédits du "plan national hydrogène" annoncé en juin et une aide européenne.
Quant au choix du matériel, la SNCF doit prochainement réunir les régions pour élaborer un cahier des charges. Alstom a déjà proposé une version française de son train à hydrogène, que lesdites régions pourraient acquérir sans passer d'appel d'offres, via un contrat-cadre existant. Il voudrait rapidement une trentaine de commandes pour lancer la machine.
Les régions se prononceront "début décembre" sur cette nouvelle technologie, lors d'une réunion commune en présence d'Alstom et de Benoît Simian a indiqué Régions de France dans un communiqué ce 23 novembre. "Cette réunion sera l'occasion pour les régions qui le souhaitent de s'engager dans l'expérimentation du train à hydrogène dès 2022, en suivant les préconisations du rapport", a précisé l'association. "Aujourd'hui, seulement 56% des TER circulent sur des lignes électrifiées en France, rappelle-t-elle. Le train à hydrogène est l'une des options qui permettra de sortir du diesel et d'améliorer le bilan carbone du transport ferroviaire".