Les tarifs réglementés de vente d’électricité sur courant alternatif

L’Autorité de la concurrence et la Commission de régulation de l’énergie ont publié le même jour des positions opposées sur le maintien des tarifs réglementés de vente d’électricité. Le gouvernement doit transmettre sa position à la Commission d’ici le 1er janvier prochain. Pour l’heure, il annonce une baisse de ces tarifs en 2025.

Les tarifs réglementés de vente d’électricité (TRVE) restent plus que jamais branchés sur courant alternatif. Le même jour, deux autorités administratives indépendantes viennent de proposer, l’une leur suppression, l’autre leur maintien.

Une balance négative pour l’Autorité de la concurrence

Estimant que les TRVE, dispositif dérogatoire, ne répondent pas pleinement à leurs objectifs, l’Autorité de la concurrence recommande au gouvernement, dans un rapport du 12 novembre publié le 19 novembre, de "préparer de manière active leur suppression", alors qu’approche "la fin programmée de l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique [Arenh] le 31 décembre 2025". L’Autorité estime notamment que le bénéfice que représente ces TRVE pour le consommateur est "très limité hors période de crise" et relève "qu’ils n’ont pas empêché la hausse des prix de détail" pendant la crise énergétique de 2021-2023, poussant "les pouvoirs publics à mettre en place un ‘bouclier tarifaire’ pour protéger les consommateurs". Elle déplore dans le même temps qu’ils "brouillent le signal-prix (…) qui devrait inciter les consommateurs à une plus grande sobriété énergétique" ou encore qu’ils créent de nombreuses distorsions de concurrence, entravant les bienfaits de cette dernière "en termes de prix, d’innovation ou encore d’investissement".

Nécessaire stabilité pour la CRE

À l’inverse, dans un rapport du 7 novembre également publié le 19 novembre, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) estime "que le rôle majeur des TRVE pour les consommateurs n’est pas remplaçable à court terme" et recommande de les maintenir pour les cinq prochaines années. Si elle concède qu’ils n’ont pas permis à eux seuls "de protéger les consommateurs de la très forte hausse des prix" pendant la crise, elle considère néanmoins qu’ils "ont atténué le choc". Surtout, elle argue que leur suppression à court terme "impliquerait nécessairement un bouleversement (…) s’ajoutant à l’instabilité liée à la sortie de crise et à la perspective de la fin de l’Arenh", en observant que "les consommateurs au TRVE semblent peu enclins (…) à se tourner vers les offres de marché pourtant financièrement attractives".

La balle dans le camp du gouvernement

Des conclusions opposées qui ne surprennent pas la ministre chargée de l’énergie, Olga Givernet, "compte-tenu de la complexité du dossier et de ses multiples implications". Reste désormais au gouvernement à trancher, alors que la législation européenne, transposée en droit français, prévoit la remise par les États membres, avant le 1er janvier prochain (puis tous les cinq ans), d’un rapport présentant "la nécessité et la proportionnalité des interventions publiques" dérogeant au principe de libre détermination des prix, ainsi qu'une "évaluation des progrès accomplis vers la mise en place d'une situation de concurrence effective entre les fournisseurs et dans la transition vers des prix fondés sur le marché". "Ce qui est clair, c’est que l’attachement des Français, et de la représentation nationale, aux tarifs réglementés est fort. Les tarifs réglementés ne sont pas juste un détail dans ce débat, ils jouent un rôle crucial dans le bon fonctionnement du marché, surtout avec la fin de l’Arenh qui approche à grands pas. Le gouvernement en est bien conscient, et c’est pour ça que ce facteur, combiné aux autres analyses qu’on a, sera un élément clé pour déterminer notre position finale sur les tarifs réglementés", enseigne la ministre. 

La FNCCR au renfort des TRVE

Pour la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR), pas d’hésitation : le gouvernement doit suivre l’avis de la CRE, les TRVE offrant à leurs bénéficiaires "une stabilité des prix, des conditions de commercialisation apaisées et des pratiques contractuelles respectueuses de leurs intérêts". Et de rappeler qu’elle avait d’ailleurs plaidé, au plus fort de la crise énergétique, pour que les collectivités et TPE puissent y être éligibles sans seuil de puissance, extension dont elle rappelle qu’elle entrera en vigueur le 1er février 2025 (voir notre article du 12 avril). La fédération relève en outre que l’existence de ces TRVE n’a nullement empêché "des progrès considérables (…) en matière de réduction des consommations d’électricité des ménages français". 

Des tarifs réglementés annoncés à la baisse en 2025

À court terme, pas de suppression prévue. En l’état, le gouvernement prévoit même une baisse de ces tarifs réglementés à compter du 1er février 2025, après des hausses de 20% en février 2022, de 15% en février 2023, de 10% en août 2023 et de 9,5% en février 2024 (le prix n’ayant pas été augmenté en août 2024, contrairement aux préconisations de la CRE – voir notre article du 15 juillet –, laquelle avait été invitée par le ministre Roland Lescure à revoir sa copie – voir notre article du 3 septembre). En annonçant dans un entretien au Figaro mis en ligne ce 28 novembre qu'il ne comptait "pas augmenter les taxes sur l'électricité" comme prévu initialement dans le projet de loi de finances pour 2025, le Premier ministre, Michel Barnier, assure que "cela permettra une baisse des prix de l'électricité de 14%, qui ira donc bien au-delà de la baisse de 9% prévue initialement". Cet abandon de l'augmentation des taxes sur l'électricité figurait déjà dans le projet de budget pour 2025 tel qu'examiné actuellement par le Sénat, via deux amendements identiques, du rapporteur LR du budget Jean-François Husson et du groupe socialiste, adoptés durant la semaine.

 

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