Normes - Les sénateurs enterrent la proposition de loi Doligé
On avait un temps cru qu'elle ne serait jamais inscrite à l'ordre du jour du Parlement. Elle a finalement fait son apparition – mais une apparition de courte durée… Examinant mercredi 8 février la proposition de loi Doligé sur la simplification des normes, la commission des lois du Sénat, présidée par Jean-Pierre Sueur, a adopté une "motion de renvoi en commission". Etant donné le calendrier de cette fin de législature, une telle motion de procédure signifie, en clair, l'enterrement du texte. Cette proposition de loi d'initiative sénatoriale ne peut en effet partir à l'Assemblée sans avoir été examinée par les sénateurs. Et à un mois de la fin des travaux parlementaires, renvoyer ce texte en commission des lois pour "prendre le temps d’une réflexion et d’un examen approfondi", tel que le formule l'amendement du sénateur PS Jean-Pierre Michel adopté mercredi, c'est lui ôter à peu près toute chance de poursuivre son parcours dans le temps imparti.
La motion ne nie pas la nécessité d'une simplification des normes applicables aux collectivités, au contraire. Elle considère en revanche que la proposition de loi préparée par le sénateur du Loiret Eric Doligé à la suite de son rapport sur le même sujet "manque de portée" pour lutter contre "l'inflation des normes" et "n’atteint pas l’objectif affiché de réduction des coûts". Jean-Pierre Michel s'interroge aussi sur l'une des dispositions-clefs du texte, celle du "principe de proportionnalité et d’adaptation des normes à la taille des collectivités", la jugeant "très délicate". Egalement en question, certaines mesures spécifiques qui ont déjà suscité des réactions, dont celle rendant facultative l’existence d’un CCAS (ce même mercredi, les membres de l'Union nationale des CCAS réunis à Montpellier arboraient toujours un badge "Touche pas à mon CCAS" pour protester contre ce projet). D'où, donc, la volonté de retravailler un texte qui a, on le sait, donné lieu par ailleurs à bien d'autres critiques, par exemple sur son volet accessibilité/handicap. En notant néanmoins que certaines dispositions étaient au contraire attendues avec intérêt par les acteurs locaux, notamment en matière d'urbanisme, ou encore sur le sujet spécifique des normes sportives. Sur ce point, il s'agissait d'obliger les fédérations sportives à soumettre à la Commission consultative d'évaluation des normes (CCEN) les projets de règlements fédéraux qu'elles édictent. Ladite CCEN, réunie le 2 février pour examiner les dispositions de la proposition de loi qui la concernaient (autrement dit l'article 2), y était évidemment favorable, tout comme elle était favorable à l'extension de ses propres compétences au stock des normes. Les élus siégeant à la CCEN se sont en revanche opposés à l'extension de la CCEN à trois personnalités qualifiées désignées par les ministères.
On sait à quel point la question des normes a été présente ces derniers temps dans le débat politique sur les collectivités, y compris du côté du gouvernement et du chef de l'Etat - l'allégement des normes étant promis comme une contrepartie aux efforts demandés aux collectivités dans la maîtrise des finances publiques. Alors que doit se tenir ce 10 février à l'Elysée une réunion avec les représentants des trois grandes associations d'élus locaux, cette promesse perd subitement un peu de son actualité.