Les propositions chocs de la mission d’information sur les dépenses fiscales et budgétaires en faveur du logement
Dans un contexte de crise du logement qui se renforce, la mission d’information sur les dépenses fiscales et budgétaires en faveur du logement et de l’accession à la propriété s’appuie sur un bilan des dispositifs existants pour faire des propositions à la fois de court terme et structurelles.
Après avoir auditionné plus d’une soixantaine de professionnels et d’élus, les députés Charles de Courson (Marne/LIOT) et Daniel Labaronne (Indre-et-Loire/Renaissance) ont présenté mercredi 19 juillet devant la commission des finances de l’Assemblée nationale les résultats de leurs travaux, à savoir un bilan de l’arsenal existant en matière de financement de la politique du logement ainsi qu’une partie des 48 recommandations contenues dans le rapport adopté en fin de séance. Les députés ont rappelé en introduction que 38,2 milliards d’euros avaient été dépensés en 2021 en France pour le logement, soit 1,5% du PIB national. "Un niveau contenu depuis les années soixante-dix", reconnaît Daniel Labaronne, mais qui reste très élevé en comparaison de nos proches voisins européens, poursuit le député : en Italie, l’engagement pour le logement représente selon les données les plus récentes 0,53% du PIB quand l’Allemagne atteint 0,45%.
Au-delà de ce comparatif européen, les rapporteurs conviennent que les données "complètes, fiables et cohérentes" manquent cruellement pour documenter la question, sans compter que les éléments disponibles pour l’évaluation de la politique du logement "sont tout à fait lacunaires", regrette le député d’Indre-et-Loire. À l’appui de sa démonstration, il souligne que le taux réduit de TVA applicable sur les travaux d’amélioration de l’habitat "n’a fait l’objet d’aucune évaluation depuis 5 ans", alors même que le dispositif représente une dépense fiscale de l’ordre de 4,5 M€ par an.
L’enjeu majeur du retour sur le marché des logements vacants
Les rapporteurs font également le constat qu’en France "la bonne santé du logement semble devoir reposer sur la construction de logements neufs", soit quelques 350.000 unités par an. Ce qui, au final, ne représente qu’à peine 1% des 37 millions de logements existants - dont 30 millions de résidences principales - et que depuis une quinzaine d’années, ajoute Daniel Labaronne, "on dénombre 1 million de logements vacants supplémentaires". Conclusion : avant d’envisager de construire davantage, peut-être faudrait-il se pencher sérieusement sur la problématique de la rénovation du bâti "qui devient un enjeu majeur !" Dans l’ordre des priorités, les rapporteurs pointent ainsi la nécessité d’une "remise des logements vacants sur le marché" qui permettrait, à la fois, d’augmenter l’offre de locations abordables, de répondre à "l’impératif de sobriété foncière" tout en alimentant le grand chantier de la rénovation énergétique. "Si 10% des 3,5 millions de logements vacants étaient remis sur le marché, cela correspondrait au volume de logements neufs construits chaque année", souligne Daniel Labaronne.
"Nous devons changer de méthode"
Pour atteindre ces objectifs, "nous devons changer de méthode", préconise Charles de Courson, à travers une plus grande "territorialisation des dispositifs en faveur du logement". "Pas simplement, explique-t-il, pour déconcentrer les compétences mais pour donner aux acteurs locaux un pouvoir d’expérimentation et d’adaptation concernant les aides budgétaires et fiscales". Le député propose ainsi de modifier les seuils, les plafonds d’aides ainsi que leur calcul afin de mieux coller aux réalités locales ; d’adapter les zonages à l’échelle locale ; ou encore d’inciter les collectivités à s’emparer des outils qui marchent, notamment en matière d’aides à la pierre. "Ces dispositifs sont plus efficaces quand vous impliquez les acteurs locaux", constate Charles de Courson qui estime que cette plus grande implication doit aller de pair avec une plus grande responsabilisation des collectivités locales.
Choisir entre APL pour les étudiants ou avantage fiscal pour les parents
Sur la question des APL, Charles de Courson suggère que les familles soient amenées à faire un choix entre d’une part, l’avantage fiscal pour les parents (demi-part ou part fiscale entière) et d’autre part le bénéfice de l’APL pour l’enfant étudiant, "car cumuler ces deux mesures n’est pas acceptable". Il propose également de supprimer l’exonération d’IS dont bénéficie le secteur social et compenser cette suppression pour soutenir les bailleurs qui investissent le plus. Faisant le constat d’une "embolisation" de la mobilité au sein du parc social, le député propose de renforcer les incitations à quitter les logements sociaux en abaissant le seuil à partir duquel une sortie du parc est obligatoire. Un seuil jugé "beaucoup trop élevé" par le député qui propose également d’abaisser celui à partir duquel le supplément de loyer de solidarité s’applique "et de le calculer à partir de l’écart entre le loyer de marché et les plafonds de loyers du parc social". Les rapporteurs mettent également en avant la nécessité "de revoir de fond en comble la fiscalité locative" jugée trop favorable pour les meublés de tourisme aujourd’hui "imposés sur 29% du montant des loyers perçus", soit bien en deçà du taux d’imposition des locations nues. Le rapport préconise également de "recentrer le PTZ dans le neuf en zone tendue afin de l’adapter à l’objectif de lutte contre l’artificialisation des sols".
Enfin, s’agissant de la rénovation énergétique, Daniel Labaronne évoque la création "d’une grande banque à l’image de la BPI qui permettrait de massifier les choses".