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Démocratie locale - Les outils numériques pour "augmenter" la démocratie participative

Alors que s'ouvre à Paris le sommet mondial du Partenariat pour un gouvernement ouvert (PGO), les regards se tournent vers les territoires qui utilisent d'ores et déjà des outils numériques pour mieux communiquer avec les citoyens. La France ne manque ni de collectivités pilotes ni de start-up audacieuses. Les "civic techs" avancent encore cependant à tâtons et les décideurs locaux sont en demande de retours d'expérience pour comprendre comment dialoguer au mieux avec leurs administrés.

Durant trois jours, le sommet mondial du Partenariat pour un gouvernement ouvert (PGO) va animer la capitale française. L'organisme multilatéral, présidé actuellement par la France, se donne pour ambition d'améliorer la participation des citoyens à l'action publique, en promouvant la transparence, en luttant contre la corruption, mais aussi en explorant la place des nouvelles technologies dans le processus démocratique. La présidence française, qui souhaite attirer dix nouveaux pays membres dans le giron de cette initiative, profite également de cette vitrine pour valoriser les efforts fournis dans l'Hexagone. La ville de Paris s'est notamment saisie du dossier en hébergeant une partie de l'événement, en animant une séquence spécialement dédiée aux territoires ce vendredi 9 décembre et en mobilisant d'autres villes mondiales pour les convier au sommet.

Atteindre de nouveaux publics et valoriser l'action municipale

En France, bien au-delà des seules métropoles, des territoires divers explorent le potentiel des outils numériques pour tisser de nouveaux modes de contact avec la population. Le besoin provient souvent de l'insuffisance des communications traditionnelles pour atteindre l'ensemble des publics. "Nous avons besoin d'une complémentarité des medias", observe par exemple Christophe Boissonnade, adjoint au maire de Voisins-le-Bretonneux délégué à la ville numérique. "En parallèle des publications papier, l'application mobile et les réseaux sociaux nous permettent d'atteindre une tranche d'âge souvent moins impliquée dans les actions municipales", témoigne-t-il. Dans une ville qui compte beaucoup d'actifs allant travailler autre part dans l'agglomération parisienne, les outils digitaux constituent aussi un lien avec la commune, en permettant de mieux comprendre l'utilité de la collectivité et ses actions concrètes. Camille Morillon, webmestre à la ville de Vernon, le confirme : "Notre appli municipale Fluicity est principalement consultée tôt le matin ; elle permet à ceux qui vont travailler à Paris de se tenir au courant de la vie locale."
Au-delà de la diffusion d'informations, les outils numériques permettent de faire peu à peu évoluer les modes de décision au sein de la collectivité, tout en valorisant l'action publique. "Avec l'appli mobile Voisins 78, précise Christophe Boissonnade, on peut signaler des anomalies constatées dans l'espace public communal. Après un temps de concertation, de pédagogie et d'acculturation, l'outil fait fureur auprès des services qui traitent rapidement les demandes des habitants. Et ces derniers le leur rendent bien, en faisant également remonter des signalements positifs : une bonne surprise pour les agents, plus habitués à n'échanger qu'avec les mécontents." L'appli mobile compte plus de 1.400 utilisateurs actifs, une belle performance pour une commune comptant 4.500 ménages. Pour progresser dans la mise en place d'un véritable système d'intelligence collective, Voisins prépare maintenant la sortie imminente d'un réseau social local, en open source. A Vernon, l'appli mobile a déjà fait remonter des propositions simples adoptées par la municipalité, telles que l'installation d'un plus grand parking à vélo près de la gare. A Bougival, qui utilise l'appli participative Vooter, les votes des habitants ont permis l'implantation d'une station Autolib ou encore la mise en place d'un terrain de badminton en libre service.

Les territoires en cours d'acculturation

Au-delà des expériences de quelques communes et des opérations médiatisées de budget participatif, la plupart des collectivités sondent le terrain et attendent les premiers retours d'usage. "Les acteurs de la civic tech ont peu de difficultés à ouvrir les portes des collectivités", résume Stéphane Bequin, co-fondateur de la start-up Vooter. "Il y a une réelle curiosité de la part des territoires, de même qu'un besoin d'y voir plus clair, sur un marché à la fois jeune et encore complexe." Tant du côté des collectivités que des entrepreneurs, on constate que les structures locales ont besoin à la fois d'élus volontaires et d'administrations mobilisées, pour prendre le virage du participatif. Du côté des start-uppers, traiter avec une collectivité peut également exiger un temps d'acclimatation, même si leur souplesse et leur besoin de retours d'usage plait souvent aux territoires qui leur font confiance.
Le numérique change naturellement les modes de travail, tant en interne que dans les relations avec les administrés. Mais peut permettre de gagner en efficience, en adaptant mieux les services urbains aux préférences des usagers, ou encore en mettant en place des méthodes de concertation plus agiles. En veillant toujours, cependant, à n'exclure aucune population. Un risque réel mais faible. Pour l'heure, les décideurs locaux sont encore loin de confondre les agoras numériques avec la voix des urnes.