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Les maires appelés eux aussi à lutter contre la maltraitance animale

L'Assemblée nationale a adopté en première lecture une proposition de loi de la majorité visant à renforcer la lutte contre la maltraitance animale. Plusieurs mesures – relatives aux fourrières et refuges, aux pouvoirs des policiers municipaux et gardes-champêtres ou à la stérilisation des chats errants, qui deviendrait obligatoire – concernent au premier chef les collectivités.

Vu son intitulé, on aurait pu imaginer les débats sur la proposition de loi visant à renforcer la lutte contre la maltraitance animale – adoptée en première lecture à l'Assemblée ce 29 janvier à la quasi-unanimité (79 pour, 2 contre) – consensuels et paisibles. Pourtant, si la députée Sophie Auconie (UDI) s'est félicitée d'un débat tenu dans un "climat serein et apaisé, alors qu’il s’agit d’un sujet sensible", le texte aura tout de même donné lieu à plusieurs passes d'armes, notamment en commission.

L'absence des "mesures qui fâchent" fâche…

D'abord, en raison de ses absences. Le texte n'aborde pas les sujets qui fâchent : corrida, chasse à courre ou à la glu, déterrage des blaireaux, combats de coqs ou encore conditions d'élevage industriel (en cage notamment) manquent à l'appel. Ses auteurs –plusieurs députés du groupe LREM – ont dès lors été accusés de vouloir "se donner bonne figure et donner l’illusion qu’elle se préoccupe de la condition animale" (Bastien Lachaud, LFI) en vue de la prochaine élection présidentielle, avec une loi "d'affichage", qualifiée de loi "bisounours" ou "30 millions d'amis" par Olivier Falorni (LT). Également imputé à leur passif par leurs détracteurs, l'absence de soutien, à l'automne, à la proposition de loi de Cédric Villani (NI), jugée plus ambitieuse – ou coercitive, selon les points de vue – ou encore la création de la cellule Démeter, Bastien Lachaud accusant la majorité d'avoir ce faisant "employé toutes les ressources des gardiens de la paix […] au profit de syndicats agricoles productivistes pour traquer les lanceurs d'alerte de la maltraitance animale dans les élevages intensifs et les abattoirs". Rien de moins. Reste que le ministre de l'Agriculture avait annoncé en janvier 2020 un plan gouvernemental pour la protection et l'amélioration du bien-être animal prévoyant notamment l'interdiction de la castration à vif des porcelets ou l'interdiction du broyage des poussins à la fin 2021, mesures qui auraient fort logiquement pu trouver leur place dans ce texte…

… tout comme la présence d'autres suscite la controverse

Ensuite, en raison, à l'inverse, de plusieurs de ses dispositions emblématiques – singulièrement l'interdiction des élevages de vison pour leur fourrure, de détention de cétacés par les delphinariums et parcs zoologiques ou d'animaux sauvages par les cirques itinérants – qui, sans "fâcher très fort", ne suscitent pas moins de fortes oppositions, dans un sens ou dans l'autre. Pas tant en raison des objectifs poursuivis (encore que), que des conditions de leur mise en œuvre (les délais, notamment). Autant de mesures qui, rappelons-le, avaient été annoncées, avec un sens certain de l'anticipation, par la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, le 29 septembre dernier, sans que le gouvernement y joigne toutefois là-encore l'acte – un projet de texte – à la parole.

Pour les collectivités, fourrières et stérilisation des chats

Les mesures qui concernent directement les collectivités locales ont, elles, été plus consensuelles, sans pour autant être exemptes de débats. Si le texte – pour lequel le gouvernement a engagé la procédure accélérée – devait être adopté en l'état, retenons principalement que :
- les policiers municipaux et gardes champêtres pourront rechercher et constater le manquement à l'obligation d'identification des "carnivores domestiques", et le procès-verbal pourra être dressé par voie numérique ;
- ils pourront restituer sans délai à son propriétaire tout animal trouvé errant et dûment identifié, permettant d'éviter ainsi le placement en fourrière de l'animal et le paiement de frais à son détenteur ;
- chaque commune – ou, lorsqu'il exerce cette compétence, chaque EPCI – devra disposer d’une fourrière ou d’un refuge apte à l’accueil et à la garde des chiens et chats trouvés errants ou en état de divagation, cette fourrière ou ce refuge pouvant toutefois être mutualisé avec une autre commune ou un autre EPCI compétent. Rappelons que, pour l'heure, chaque commune doit déjà "disposer soit d'une fourrière communale […], soit du service d'une fourrière établie sur le territoire d'une autre commune, avec l'accord de cette commune". Initialement, la proposition de loi prévoyait de rendre obligatoire pour chaque commune ou chaque EPCI le fait de disposer d'une fourrière ou d'un refuge, sans prévoir de possible mutualisation, ce qui n'a pas manqué de susciter moult réactions. "Sans moyens financiers et humains à l’échelle nationale et sans une péréquation pour la prise en charge de cette cause, cet article sera parfaitement inopérant", avertissait Sébastien Jumel (GDR). "Ce qu’on va supprimer, c’est le fait de pouvoir déléguer la gestion de la fourrière à une autre commune, au profit d’une délégation à l’intercommunalité", alertait Julien Aubert (LR), soulignant les répercussions concrètes d'un tel dispositif : "On risque de se retrouver dans une situation où l’EPCI devra construire un local adapté au nouveau flux tandis que l’ancienne fourrière [mutualisée entre plusieurs communes ne relevant pas toujours d'une même EPCI] deviendra trop grande par rapport aux nouveaux besoins." La disposition fut donc réécrite en séance.
- cette fourrière ou ce refuge devra être apte à l'accueil et à la garde des chiens et chats concernés "dans des conditions permettant de veiller à leur bien-être et à leur santé" et leur gestionnaire sera tenu de suivre une formation relative au bien-être des animaux de compagnie et de transmettre au fichier national des informations relatives à leurs capacités d'accueil, à la traçabilité des animaux et à leur suivi sanitaire ;
- l'animal non réclamé par son propriétaire sera considéré comme abandonné au terme d'un délai franc de garde de 15 jours ouvrés, contre 8 aujourd'hui ;
- le maire, ou désormais le président d'EPCI, devra procéder à la capture de chats non identifiés, sans propriétaire ou sans détenteur, vivant en groupe dans des lieux publics de la commune, afin de faire procéder à leur stérilisation et à leur identification préalablement à leur relâcher dans ces mêmes lieux (disposition qui n'entrerait en vigueur que trois mois après la promulgation de la loi). En rendant obligatoire cette mesure aujourd'hui facultative – le maire peut y procéder à son initiative ou à la demande d'une association de protection des animaux –, les élus visent à enrayer la "prolifération de chats errants", "devenue un véritable problème dans certaines communes" (Aurore Bergé, LREM). Certains élus n'ont toutefois pas manqué de dénoncer l'absence de compensation du surcoût pour les collectivités (Olivier Falorni, en commission). Relevons toutefois que le "plan d'actions pour lutter contre l'abandon des animaux de compagnie" dévoilé par le ministre de l'agriculture le 21 décembre dernier – aux allures de copier-coller de la proposition de loi discutée – indique que "l'État contribuera financièrement aux campagnes de stérilisation aux côtés des collectivités et des associations". 20 millions du plan France Relance sont dédiés aux associations de protection animale et refuges, dont 14 millions pour améliorer leurs locaux ou augmenter leur capacité d'accueil.
 

 

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