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Sports - Les ligues professionnelles comptent sur les pouvoirs publics pour financer les enceintes sportives

Quand en janvier dernier, le ministre des Sports, David Douillet, s'était demandé : "Pourquoi l'Etat doit-il financer les stades de l'Euro 2016 ?" et avait remis en cause la légitimité des aides de l'Etat et des collectivités locales dans les investissements du sport professionnel, ce dernier secteur avait encaissé le coup. La réplique est venue le 7 mars par l'intermédiaire d'un document de l'Association nationale des ligues de sport professionnel (ANLSP) intitulé : "2012-2017 - Pour un nouveau partenariat avec le sport professionnel." Pour cette association qui regroupe les ligues professionnelles de basket-ball, de football, de handball, de rugby et de volley-ball et leurs 158 clubs, "les clubs et les sportifs professionnels sont des acteurs participant de manière très importante à l'environnement économique et de la cohésion sociale de leur territoire [sic]. Ils doivent, à ce titre, pouvoir bénéficier de mesures de soutien au même titre que toute entreprise […]". Dans son document diffusé auprès des responsables politiques et administratifs, l'ANLSP rappelle que le sport professionnel, avec ses 15 millions de spectateurs et ses 165 millions de téléspectateurs, est le "premier spectacle vivant de France". Et évoque un "creuset unique d'unité nationale et régionale […], une aventure humaine et un formidable ascenseur social", et même un "domaine sacré et sensible […]".

Pour un "Oséo" du sport

Et ce "domaine sacré et sensible" devrait faire l'objet de toutes les attentions, en particulier dans le domaine - crucial en termes financiers - des enceintes sportives, qualifié d"'enjeu national" par les ligues. Parmi les dix-huit propositions de l'ANLSP, cinq sont ainsi consacrées à "favoriser l'avènement d'enceintes sportives modernes". Mais si "l'optimisation de l'exploitation de ces dernières est une condition à la mise en place d'un modèle économique moins dépendant des subventions publiques", ce n'est pas pour autant que les ligues professionnelles entendent investir dans leur outil de travail sans recourir aux aides de l'Etat ou des collectivités. Pour elles, en effet, "la réalisation de ces projets appelle […] la mise en oeuvre de moyens financiers importants tant pour le secteur public que le secteur privé". Et l'ANLSP d'appeler de ses vœux un Oséo du sport : "Au croisement de l'Etat, des collectivités territoriales, de la Caisse des Dépôts et du monde de l'entreprise, l'enjeu national des enceintes sportives dans un mécanisme général qu'est l'Oséo ou inspiré de ce modèle pourrait être une réponse particulièrement efficace à la problématique actuelle à laquelle sont confrontés de nombreux clubs dans leurs projets d'investissement."

Pour des collectivités garantes des emprunts des clubs

Sur le chapitre de la construction ou de la rénovation des enceintes sportives, l'ANLSP va plus loin. Pour elle, "l'accès au financement et l'obtention de bonnes conditions passent par des garanties publiques de l'Etat et des collectivités territoriales". Une possibilité aujourd'hui explicitement interdite par la loi, et notamment l'article L.113-1 du Code du sport qui prohibe l'octroi de garantie d'emprunt par les collectivités locales et leurs groupements aux clubs sportifs. Un paradoxe pour l'ANLSP qui rappelle que "les collectivités territoriales peuvent par ailleurs garantir les emprunts aux entreprises privées à hauteur de 50 à 80% de l'emprunt."
L'ANLSP souhaite encore que le statut des clubs dans l'enceinte et la relation avec l'exploitant puissent faire l'objet d'une évolution juridique dans les schémas de partenariat public-privé, de façon à intéresser le club à l'exploitation de l'enceinte y compris en dehors de ses propres matchs. Pour cela, précise l'ANLSP, "il paraît nécessaire de modifier les dispositions du Code général des collectivités territoriales afin de permettre la mise en oeuvre de procédures d'attribution de contrats de partenariat dans lesquelles l'attributaire retenu serait associé au(x) club(s) dans une société de projet".

Pour une taxe pérenne en faveur du financement des stades

Enfin, les ligues sportives professionnelles entendent sécuriser l'accès au partenariat public-privé en assouplissant le reconnaissance de la qualité de service public. "Le Conseil d'Etat [semblant] exclure que l'exploitation d'une enceinte sportive affectée exclusivement au besoin d'un club sportif professionnel puisse être qualifiée de service public", il paraîtrait opportun à l'ANLSP que la réalisation des enceintes sportives déclarées d'intérêt général et initiées par des collectivités territoriales puisse faire l'objet d'un contrat de partenariat ou d'une procédure de délégation de service public, indépendamment de la qualification ou non de service public.
Loin de s'émanciper, les ligues professionnelles souhaitent, par les mesures qu'elles proposent, impliquer toujours davantage la puissance publique, Etat ou collectivités, dans des partenariats avec les clubs sportifs. Et à David Douillet qui appelait encore le football professionnel à utiliser les importantes ressources que lui procure la vente de ses droits audiovisuels pour le financement de ses stades, l'ANLSP renvoie la balle en demandant au contraire de pérenniser au-delà de 2015 la taxe spéciale sur la Française des jeux pour le financement des travaux des stades de l'Euro 2016. Il eût été difficile de prendre plus à contrepied les propos du ministre des Sports.

 

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