Les collectivités confrontées à l'allongement de la durée des arrêts maladie de leurs agents
Du fait de l'augmentation de la moyenne d'âge de leurs agents, les collectivités sont confrontées à des arrêts maladie de plus en plus longs, qui engendrent un coût croissant. C'est ce que met en évidence une étude de la société Sofaxis (groupe Relyens), spécialiste de cette question. En repoussant l'âge correspondant à la fin de la vie active, les dernières réformes des retraites rendent la question plus aiguë. Dans ce contexte, les politiques visant à préserver l'employabilité des agents constituent des enjeux majeurs.
Depuis plus d'une dizaine d'années, la durée moyenne des arrêts maladie des agents territoriaux est en nette progression. Rien qu'entre 2015 et 2020, elle a augmenté de 37%. L'une des raisons majeures de ce phénomène est le vieillissement des agents employés par les collectivités, souligne l'étude de Sofaxis, qui ne traite que de la situation des agents titulaires. Depuis 2008, l'âge moyen des agents relevant de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales - la CNRACL - a cru de 0,3 à 0,4 an chaque année, pour atteindre 47,9 ans en 2020. Certes, les agents les plus âgés ne sont pas plus fréquemment absents que les plus jeunes, mais ils présentent des durées d’arrêt deux à trois fois plus longues, en moyenne, que leurs collègues plus jeunes. Cela se vérifie pour tous les types d'arrêts maladie. Dans ces conditions, les agents les plus âgés sont assez nettement majoritaires dans les arrêts les plus longs. S'agissant de la maladie ordinaire par exemple, les arrêts les plus longs (plus de 180 jours) concernent pour près de 60% des agents de 50 ans et plus.
La nature des métiers exercés par les agents est un autre facteur qui influence la durée des absences. "Les métiers à forte pénibilité physique ou psychologique sont les plus sensibles à l'aggravation des absences longues", fait remarquer Vincent Lelong, directeur général de Sofaxis. Ce constat vaut toutefois en temps normal, nuance-t-il. En effet, "dans le contexte de la pandémie de covid-19, qui entraîne un niveau de stress très fort et conduit à une indispensable adaptation de l'organisation", les agents exerçant les métiers administratifs et du management se trouvent eux aussi en première ligne.
Demi-traitement
L'augmentation de la durée moyenne des arrêts maladie - autrement dit la gravité des absences - mérite une attention particulière, parce qu'elle n'est pas sans conséquences, y compris pour les agents. En effet, s'il est considéré parfois dans l'opinion comme une garantie contre les aléas de la vie, le statut de la fonction publique présente en fait des limites. Lorsqu'un agent est placé en arrêt de maladie ordinaire, il passe à demi-traitement si le cumul de ses arrêts maladie dépasse 90 jours dans l'année. De plus en plus d'agents sont confrontés à cette règle : au sein des paiements d’indemnités journalières, la part des paiements à demi-traitement (pour la maladie ordinaire, la longue maladie et la longue durée) s'est élevée à 44% en 2020.
Pour les collectivités, les absences ont aussi un coût. Et celui-ci est d'autant plus élevé que les agents sont âgés. Ainsi, le coût de l'absence d'un agent de plus de 55 ans s'établit à 62 euros par jour en moyenne, contre 48 euros en moyenne pour son collègue de moins de 30 ans. Le surcoût (de 30%) tient à la durée plus longue des absences chez les plus âgés et au fait que le salaire augmente avec l'ancienneté.
La question est d'autant plus importante que sa place va encore croître dans les années à venir, du fait de la poursuite de l'augmentation de la moyenne d'âge des personnels. Ainsi, devenue majoritaire à partir de 2022 dans le total des effectifs de titulaires, la part des agents de plus de 50 ans devrait passer à plus de 57% dès 2025. Les réformes des retraites de 2010 et 2014 contribuent à cette évolution : en prenant l'hypothèse que les agents continuent à partir en retraite seulement lorsqu'ils atteignent le taux plein, l'âge de départ en retraite dans la fonction publique territoriale pourrait être repoussé à terme à 64,5 ans.
Employabilité durable
Les collectivités n'ont heureusement pas attendu 2022 pour découvrir la question de l'allongement des durées d'absence de leurs agents. "Le sujet de l'employabilité durable est très bien identifié par les collectivités" et celles-ci "sont de plus en plus outillées", constate Vincent Lelong, directeur général de Sofaxis. En outre, leurs initiatives obtiennent des résultats assez tangibles. Quand elles sont accompagnées par la société, les actions ayant pour objectif d'accompagner le maintien dans l'emploi ou le reclassement pérenne des agents enregistreraient des taux d'efficacité allant de 60% à 75%.
Par ailleurs, l'obligation pour les employeurs territoriaux de verser à partir de 2025 une aide minimale de 20% du coût de la couverture prévoyance de leurs agents - telle que prévue par l'ordonnance du 17 février 2021 sur la protection sociale complémentaire -, devrait permettre d'améliorer la prise en compte des conséquences des absences longues. Aujourd'hui, "plus de la moitié des agents territoriaux" seraient protégés par une couverture prévoyance permettant notamment le maintien de salaire en cas d'arrêt prolongé. Avec, dans ce cadre, des aides allant de 10 à 15 euros en moyenne.