Le régime spécial applicable aux forêts de protection assoupli

Publié au Journal officiel du 31 décembre 2023, un décret modifie le régime spécial applicable dans les forêts de protection en élargissant notamment la liste des travaux autorisés en leur sein.

Un décret du 29 décembre 2023 modifie le régime des forêts de protection.

En premier lieu, il assouplit les modalités de modification du classement de ces forêts. Normalement prise par décret en Conseil d’État, la décision de modification du classement peut désormais également l’être par arrêté du ministre chargé des forêts, dans la mesure où elle répond aux trois conditions suivantes : elle a pour seul objet le retrait de certaines parcelles ou parties de parcelles du périmètre ; les différents retraits opérés depuis le dernier décret n’excèdent pas 2% de la superficie classée, dans la limite de 100 hectares au total ; elle ne compromet pas les enjeux ayant entraîné le classement. 

Cette modification est principalement motivée par la volonté "de corriger des erreurs manifestes, à savoir la présence de parcelles non boisées lors du classement initial de la forêt, mais aussi afin de pouvoir réaliser un projet ayant un intérêt public aussi digne d’intérêt que la protection de la forêt, lié par exemple à la sécurité routière au niveau de routes traversant les grands massifs classés". Lors de la consultation du public, cette disposition avait été fortement contestée (749 avis défavorables, soit 96,5% des avis reçus). Le ministère souligne toutefois que cette demande de modification "émane du Conseil d’État lui-même" et que le nouveau dispositif ne modifie par la procédure d’information et de consultation du public.

En deuxième lieu, il revoit le régime spécial qui leur est applicable.

• D’abord, afin de permettre la réalisation de travaux – jusqu’ici interdits – liés à la prévention des risques naturels d’une part, et à l’accueil du public (équipements légers démontables) d’autre part et ce, afin de permettre une gestion forestière "multifonctionnelle" (jusqu’ici, seuls les travaux qui avaient pour but de créer des équipements liés à une valorisation économique et écologique de la forêt de protection étaient possibles). 

• Il dispose également que les travaux de surveillance, d'entretien, de remplacement et de maintenance relatifs à des canalisations, des réseaux enterrés d'eau, d'électricité ou des réseaux filaires, sont également autorisés, alors que ne l’étaient jusqu’ici que les travaux de surveillance, d'entretien et de maintenance relatifs à des canalisations de transport de gaz, d'hydrocarbures et de produits chimiques implantées antérieurement au 31 décembre 2010. À noter que le ministère a finalement supprimé la possibilité initialement prévue de travaux d’implantation de réseaux de gaz, d’hydrocarbures et de produits chimiques, au motif que "les éventuelles fuites de ce type de produits peuvent avoir des conséquences dramatiques".

• Il introduit enfin une nouvelle sous-section rendant possible, sous conditions, des travaux dits "légers" et "non directement au bénéfice de la forêt". Il s’agit : de travaux de maintenance, réhabilitation, entretien et extension limitée d'immeubles, d'infrastructures et d'installations existantes ; de travaux d'implantation de canalisations, de réseaux enterrés d'eau ou d'électricité ou de réseaux filaires ; de nouveaux aménagements légers et nécessaires à l'exercice des activités agricoles, pastorales et forestières ; sur une emprise temporaire, de travaux nécessaires à l'entretien et à l'aménagement d'une infrastructure publique ou à la réalisation d'un projet d'utilité publique situés en dehors d'une forêt de protection. 

Dans tous les cas, ces travaux ne devront pas compromettre les exigences de conservation ou de protection des boisements, ne devront pas modifier fondamentalement la destination forestière des terrains et ne devront pas être susceptibles de nuire à la conservation de l'écosystème forestier ou à la stabilité des sols dans le périmètre de protection. Ils sont en outre conditionnés à l’octroi d’une autorisation délivrée par le préfet, qui disposera de quatre mois pour prendre sa décision – à compter de la réception du dossier complet de demande – après consultation du conseil scientifique régional du patrimoine naturel et de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites.

Là encore, les avis du public étaient majoritairement défavorables, plaidant pour l’essentiel pour une "sanctuarisation" des forêts de protection.

 
  • Propriétés forestières : abaissement du seuil à partir duquel un plan simple de gestion doit être établi

La loi du 10 juillet 2023 visant à renforcer la prévention et la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie (voir notre article du 12 juillet 2023) a abaissé à vingt hectares le seuil à partir duquel les bois et forêts des particuliers doivent être gérés conformément à un plan simple de gestion agréé (surface valable pour une parcelle forestière d’un seul tenant ou un ensemble de parcelles situées dans une même zone géographique, définie par décret). Un décret publié au Journal officiel du 28 décembre 2023 en précise les modalités.

Il charge le Centre national de la propriété forestière d’informer les propriétaires nouvellement soumis à cette obligation. C’est en revanche au centre régional de la propriété forestière qu’il revient de déterminer le délai imparti – qui ne peut être inférieur à un an – à chaque propriétaire concerné pour présenter à son agrément un projet de plan. Ces projets de plan devront dans tous les cas être présentés à son agrément :
- avant le 12 juillet 2026 lorsque les bois et forêts des propriétaires concernés ne sont pas gérés conformément à un règlement type de gestion ou à un code des bonnes pratiques sylvicoles en vigueur à la date du 12 juillet 2023 ou lorsqu’ils sont gérés conformément à de tels documents expirant entre le 12 juillet 2023 et le 12 juillet 2026 ;
- avant le 12 juillet 2028 lorsque les bois et forêts des propriétaires concernés sont gérés conformément à de tels documents en vigueur à la date du 12 juillet 2023 et expirant après le 12 juillet 2026.

Le décret précise enfin que ne relèvent pas du régime d’autorisation administrative les bois et forêts nouvellement soumis à l’obligation d’un plan simple de gestion en application de ces dispositions tant que le délai de présentation du plan au centre régional n’est pas expiré.

 
Références : décret n° 2023-1402 du 29 décembre 2023 relatif à la modification du classement comme forêt de protection et au régime spécial prévu à l'article L. 141-4 du code forestier, Journal officiel du 31 décembre 2023, texte n°63 ; décret n° 2023-1281 du 26 décembre 2023 précisant la mise en œuvre de l'obligation instituée par l'article L.312-1 du code forestier dans sa rédaction issue de l'article 30 de la loi n° 2023-580 du 10 juillet 2023 visant à renforcer la prévention et la lutte contre l'intensification et l'extension du risque incendie, Journal officiel du 28 décembre 2023, texte n° 66.
 

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