Le président du CFL prône le retour de la CVAE dans les caisses des collectivités
Alors que le gouvernement recherche 40 milliards d'euros d'économies dans les dépenses publiques, certains proposent de stopper la baisse de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). André Laignel, président du Comité des finances locales (CFL), vient d'aller plus loin, en plaidant pour une réaffectation de cet impôt aux collectivités.
André Laignel, le président du Comité des finances locales (CFL), a proposé le 2 octobre - à huit jours de la présentation du projet de loi de finances (PLF) pour 2025 - que le produit de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) restant perçu par l'État soit affecté aux collectivités territoriales, ce qui permettrait selon lui d'accroître leur autonomie fiscale, considérablement réduite ces deux dernières décennies.
La loi de finances pour 2023 a décidé la réduction de moitié de la CVAE en 2023, avant sa suppression totale à compter de 2024. Ce faisant, elle a affecté les recettes restantes de CVAE au budget de l'État. Mais devant de premières difficultés budgétaires, la loi de finances pour 2024 a étalé la suppression de cet impôt sur les entreprises, celui-ci devant disparaître en 2027. D'ici là, l'État doit bénéficier de cette imposition décroissante.
"Je propose que cette moitié" de CVAE encore perçue par l'État "soit redonnée aux collectivités territoriales", a déclaré le maire d'Issoudun, qui était auditionné par la commission des finances de l'Assemblée nationale. L'objectif serait de permettre aux collectivités de "reconquérir des capacités fiscales", a fait valoir André Laignel. Autrement dit une part d'autonomie fiscale. En effet, si les bénéficiaires de la CVAE (en 2022 principalement les intercommunalités et les départements) ne pouvaient pas fixer le taux de cette taxe, celle-ci était calculée en fonction de données propres à chaque territoire.
"Ça pourrait être une première étape"
En outre, le retour de la CVAE dans le giron local ne coûterait "rien", a soutenu le président du CFL, puisqu'une partie de la TVA affectée aujourd'hui aux collectivités en compensation de la perte de la CVAE serait rendue à l'État. Au passage, cet échange pourrait s'avérer positif pour les comptes des collectivités locales. En effet, la TVA, qui avait été présentée comme un impôt très dynamique par les gouvernements successifs, a considérablement décéléré, les dernières prévisions tablant sur une évolution de +1,3% en 2024.
"Je ne sais pas si on pourra rétablir la CVAE d'un seul coup, mais en tout cas ça pourrait être une première étape", a estimé l'élu, en qualifiant sa proposition de "concrète, positive et réaliste".
La discussion parlementaire qui interviendra dans les semaines suivant la présentation - le 9 octobre devant le CFL et le lendemain en conseil des ministres - du PLF 2025 sera l'occasion d'aborder la question de la poursuite de la baisse de la CVAE l'année prochaine. Mais cette trajectoire pourrait être remise en cause. À gauche, le président de la commission des finances, le LFI Éric Coquerel, a jugé qu'un tel choix serait "judicieux" dans le contexte d'un déficit supérieur à 6% du PIB en 2024, si rien n'est fait.
Le 30 septembre, le président d'Intercommunalités de France, Sébastien Martin (LR), s'était montré favorable devant la presse à l'ouverture d'un débat sur la suspension de la baisse progressive de la CVAE. "C'est un élément de prudence" et un enjeu de "3 à 4 milliards d'euros", avait-il souligné.
"Recréer le lien fiscal"
Mais comme la CVAE bénéficie davantage aux territoires qui accueillent les sièges des entreprises, "les communes des Hauts-de-Seine seraient les grandes gagnantes" de la réaffectation aux collectivités de cet impôt, a alerté la députée (Droite républicaine) de Savoie, Émilie Bonnivard.
Pour restituer aux communes des marges d'autonomie fiscale, André Laignel a également mis en avant la proposition de création d'une "contribution territoriale universelle", souhaitée par l'Association des maires de France (AMF), dont il est le premier vice-président délégué. Les maires regrettent qu'avec la suppression de la taxe d'habitation, de nombreux citoyens ne participent plus par l'impôt au financement des services publics locaux. La contribution créée pourrait être "symbolique", a-t-il dit, évoquant une somme de "10 euros pour un foyer modeste". Cet impôt "pourrait être compensé pour que ce ne soit pas une charge supplémentaire" pour les contribuables, a précisé l'élu. Il a ainsi proposé que les foyers imposables sur le revenu bénéficient d'une déduction.
FCTVA en danger ?
Le président du CFL s'est par ailleurs alarmé de la décision prise par le gouvernement Attal d'"amputer" le fonds vert de 1,5 milliard d'euros en 2025. "D'après toutes les informations que j'ai eues", cette option "sera confirmée dans la loi de finances", a confié à ce moment-là Éric Coquerel. Si ce choix était confirmé lors du vote définitif du texte, environ "5 milliards d'euros liés au verdissement de notre pays disparaîtraient", a déploré André Laignel, en expliquant qu'un euro de subvention entraîne une dépense des collectivités comprise entre trois et quatre euros.
L'édile a aussi défendu le fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) contre la tentation de l'administration de Bercy de vouloir le raboter à l'occasion des débats sur le PLF 2025. "Nous avons construit nos plans de financement" en prenant en compte ce "remboursement partiel" de plus de 7 milliards d'euros en 2024, obtenu sur les dépenses d'investissement, a-t-il expliqué. La remise en cause du dispositif "entraînerait des reculs considérables en matière de modernisation de nos territoires, a-t-il alerté.