Le plan Nature en ville 2024-2030 officiellement lancé

Dévoilé ce 30 septembre, le nouveau plan Nature en ville entre désormais dans sa phase d’exécution, qui s’échelonne jusqu’en 2030. Un panel de 26 actions réparties en quatre axes doit concourir à améliorer les connaissances, les stratégies territoriales et finalement la prise de décision des élus locaux et acteurs de l’aménagement en matière de préservation des espaces urbains de biodiversité et de renaturation. 

Cest lune des actions phares de la stratégie nationale Biodiversité 2030 qui se concrétise, le nouveau plan Nature en Ville 2024-2030, officiellement présenté ce 30 septembre, ambitionne de "faire du vivant un élément structurant de laménagement urbain". Ce travail de révision sinscrit dans la continuité du précédent Plan 2010 "Restaurer la nature en ville" - dont un bilan est dressé en annexe - et vise à mettre à jour le cadre défini il y a 15 ans lors du Grenelle de l'environnement, pour lutter contre l'érosion de la biodiversité et contribuer à latténuation et à ladaptation au dérèglement climatique en ville. Les attentes se sont multipliées, poussées par les évolutions législatives nationales et internationales, en particulier le règlement européen de restauration de la nature (avec lobjectif de restauration dici à 2030 de 20% des écosystèmes terrestres et zones marines de lUnion européenne) et lintroduction de lobjectif de zéro artificialisation nette (ZAN) dans le cadre de la loi Climat et Résilience. Renforcer la présence de la nature, cest également répondre à lenjeu dhabitabilité des espaces urbanisés, particulièrement vulnérables aux phénomènes d'îlots de chaleur urbains et de ruissellement.

Les travaux de révision du plan ont mobilisé toutes les parties prenantes (État, collectivités, entreprises, experts et citoyens) pour fixer une feuille de route à toutes les étapes des projets urbains (études, conception et réalisation). De cette démarche co-pilotée par la direction de lhabitat, de lurbanisme et du paysage et cinq partenaires porteurs dactions sur la nature en ville - lInstitut national de recherche pour lagriculture, lalimentation et lenvironnement (Inrae), la Fédération nationale des agences durbanisme (Fnau) ainsi que les associations Intercommunalités de France, Plante&Cité et la Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO) - a émergé une sélection de 26 actions réparties en quatre axes. 

Accélérer les changements de pratiques

Lobjectif est de réduire le décalage entre la vitesse de transformation nécessaire des villes face aux enjeux dadaptation aux effets du changement climatique et de lutte contre l’érosion de la biodiversité, et la réalité sur le terrain. Plusieurs freins opérationnels demeurent à la mise en œuvre des projets de nature en ville : compétition pour lusage du foncier, difficultés danticipation du coût complet des projets et manque de cohérence des actions à toutes les échelles. Et malgré le besoin sociétal plébiscité par 92% des Français qui estiment quil ny a pas assez de nature en ville, sy ajoutent des difficultés dacceptation par les citadins de certaines opérations de reconquête de la biodiversité. Le plan 2024-2030 a ainsi défini comme axe transversal majeur "lacculturation des citoyens et leur implication dans les actions de nature en ville". Et propose une séquence "comprendre/planifier/faire" qui sappuie sur le développement dune culture partagée. 

Mieux connaître pour faciliter la prise de décision 

Cest un premier axe dactions, dans lequel le rôle des atlas de la biodiversité communale (ABC) dans la planification urbaine est "à valoriser". Couvrant déjà plus de 3.600 communes, le dispositif des ABC doit donc "poursuivre son déploiement" et être mis en avant dans les démarches de planification territoriale, "afin notamment de mieux intégrer les enjeux liés à la nature en ville et den partager la connaissance avec les habitants". Des ressources seront par exemple mises à disposition des acteurs des territoires sur les liens entre ABC et documents durbanisme. Autre champ dactions : lobservation de la mortalité des arbres urbains et lanticipation des besoins futurs en graines, plants, substrat, ingénierie, entretien et gestion, etc. Les résultats de la recherche sur la nature en ville doivent venir enrichir les réflexions stratégiques des élus locaux et plans dactions de terrain et identifier les angles morts. Il sagit aussi de déployer de nouveaux programmes à lappui de la dynamique lancée, tels que Erable (mobilisation des élus par la recherche-action sur la biodiversité locale) et Popsu (plateforme dobservation des projets et stratégies urbaine), ou dapprofondir les programmes existants, à lexemple du projet de recherche Baum (biodiversité, aménagement urbain et morphologie), dont les travaux lancés en 2019 visent à concilier densification du bâti et biodiversité. 

Sinscrire dans les stratégies territoriales

Ce deuxième axe dactions répond à un réel besoin d'outiller les décideurs locaux pour identifier et prioriser les espaces à enjeux de préservation, de restauration ou de création de couvert végétal. Il doit notamment se traduire dans une cartographie nationale des espaces de nature, véritable état des lieux du couvert végétal en ville, quil soit herbacé ou arboré, sous forme de système dinformation géographique (SIG). Cest un préalable "à la définition dobjectifs nationaux et territorialisés, compatibles avec le règlement européen sur la restauration de la nature dans un cadre partagé avec les collectivités territoriales". Le plan Nature en ville doit également contribuer à renforcer les actions en faveur des trames écologiques en milieu urbain dans les stratégies territoriales, mais aussi à développer la connaissance, en capitalisant les bonnes pratiques, en particulier sur les trames blanches (pollution sonore) et brunes (biodiversité des sols) et consolider la trame noire (pollution lumineuse) dans les documents de planification et durbanisme. Poursuite du projet Muse ("intégrer la multifonctionnalité des sols dans les documents d'urbanisme") piloté par le Cerema, conduite dune étude pour accompagner lintégration de coefficients de pleine terre dans le règlement du PLU, dispositifs tels que Quartiers fertiles pour favoriser lagriculture urbaine, etc., font partie de la feuille de route. 

Repenser la place de la nature dans les projets daménagement 

Le mot dordre de ce troisième axe est la massification des opérations de renaturation dans les aires urbaines. Avec un levier primordial : la pérennisation des financements des actions de renaturation tels que le fonds vert (dont 120 millions ont déjà permis de financer plus de 800 projets de renaturation) ou les aides des agences de leau. La révision du plan Nature en ville doit en outre être loccasion dapprofondir les nouveaux modèles économiques daménagement avec la nature, intégrant les bénéfices tirés de la présence d’écosystèmes, cest-à-dire les réflexions en coût global, et mettant en avant les modes de gestions vertueux et économes (gestion sobre en eau et décarbonée, désimperméabilisation des sols, etc.). Pour faciliter des projets de renaturation à lingénierie complexe, toute une batterie doutils daide à la décision existent déjà, tels que Sésame sur lidentification des espèces à planter pour la végétalisation. Les recenser et poursuivre leur développement sur lensemble des phases "préserver/restaurer/créer /gérer les espaces de nature en ville", et en privilégiant la préservation de lexistant, constitue un des enjeux de laxe. Un "centre de ressources" eau et ville, sera notamment confié au Cerema et mis en ligne courant novembre. 

Une synergie devra par ailleurs être trouvée avec le prochain plan national dadaptation au changement climatique (PNACC) - toujours en cours de finalisation - pour prioriser les solutions fondées sur la nature. Dabord, en structurant les initiatives actuelles ciblant la biodiversité urbaine pour améliorer la résilience des villes -projet Life intégré ARTISAN (OFB), "Plus fraîche ma ville" (Ademe), la boussole de la résilience (Cerama)-, avant dimaginer dautres dispositifs. Cela suppose aussi dadapter les pratiques de gestion des espaces publics et privés. 

Promouvoir les dispositifs locaux de participation citoyenne

"Fédérer les acteurs pour développer une culture partagée", cest lobjectif du dernier axe du plan Nature en ville. Le bilan du précédent plan 2010 sur ce volet est plutôt positif, et a entre autres permis la création dun centre de ressource dédié "nature-en-ville.com". Valoriser les exemples, mettre en avant leurs bénéfices et les partager au public, notamment aux jeunes, lenjeu est central et renvoie à des mesures transversales qui sappuient sur un panel dacteurs, et au premier chef les collectivités qui peuvent jouer un rôle important pour favoriser la découverte de la nature en ville. Dautant quil sagit également de promouvoir les dispositifs locaux de participation citoyenne autour de projets de nature en ville, en sappuyant là encore sur les dispositifs existants (permis de végétaliser, budgets participatifs, concours local, actions ciblées des conseils de quartier, etc.). Des "ambassadeurs de la nature en ville" pourraient bien fleurir dans les quartiers. Enfin, il est prévu d'accélérer la montée en compétence "nature en ville" des acteurs, en développant des offres de formation ciblées aux élus et agents territoriaux, dans les métiers de lurbain (architectes, urbanistes, ingénieurs, paysagistes, etc.) et auprès des acteurs de la rénovation urbaine pour les sensibiliser aux impacts de leurs opérations sur les espèces.